Actualité > À la une

À la une

[ 5 mars 2018 ] Imprimer

Droit des sociétés

Action en revendication : intervention de l’affactureur et étendue des restitutions

Mots-clefs : Clause de réserve de propriété, Affacturage, Revendication du prix de vente, Redressement judiciaire, liquidation judiciaire

L’arrêt du 24 janvier 2018 de la chambre commerciale de la Cour de cassation intervient dans le contexte particulier mêlant vente avec réserve de propriété, procédures collectives et affacturage.

En l’espèce, une société a vendu du matériel avec une clause de réserve de propriété. Ledit matériel fut par la suite revendu et la créance à l’encontre du sous-acquéreur fut cédée à une société d’affacturage. L’acquéreur fut par la suite placé en redressement puis liquidation judiciaires. Le vendeur initial, qui n’avait pas été payé, revendiqua le matériel auprès de l’administrateur. Ce dernier accepta, mais pour un montant moindre que celui réclamé. Insatisfait, le vendeur revendiquant saisit le juge-commissaire. Parallèlement, la société d’affacturage contesta l’acceptation partielle de l’administrateur et décida d’intervenir à l’instance introduite par le vendeur revendiquant devant le juge-commissaire. Cette intervention fut déclarée irrecevable et le liquidateur fut condamné à payer au vendeur revendiquant le montant intégral du prix de vente.

La Cour de cassation devait donc répondre à deux questions : l’intervention de la société d’affacturage et l’étendue des restitutions en vertu de la clause de réserve de propriété. 

L’intervention de la société d’affacturage

Sur le premier point, elle décida, à l’instar de la cour d’appel, que l’action en revendication, qui tend à la seule reconnaissance du droit de propriété du revendiquant aux fins d’opposabilité de ce droit à la procédure collective, est strictement réglementée par l’article L. 624-17 du Code de commerce. Dès lors, à défaut d’acquiescement à la demande par l’administrateur ou en cas de contestation de l’acquiescement donné par ce dernier, le juge-commissaire ne peut être saisi que par le revendiquant, le débiteur ou le mandataire de justice. Toute autre personne, telle une société d’affacturage, ne peut intervenir volontairement à l’instance ou formuler une réclamation contre l’acte d’acquiescement. L’article L. 621-9 du Code de commerce ne pouvait donc pas dans cette hypothèse recevoir application.

L’étendue des restitutions en vertu de la clause de réserve de propriété

Sur le second point, la chambre commerciale cassa et annula pour manque de base légale l’arrêt de la cour d’appel de Versailles. Cette dernière avait en effet rejeté la demande du liquidateur tendant à exclure du champ des restitutions à la société revendiquante, les créances transférées à l'affactureur. L’arrêt d’appel retenait en effet qu’il n'appartenait ni au tribunal ni à la cour d'appel de statuer sur une telle demande : ils ne pouvaient statuer que sur l’action en revendication, laquelle tend seulement à la reconnaissance du droit de propriété du revendiquant aux fins d'opposabilité de ce droit à la procédure collective. Visant les articles L. 624-18R. 624-16 et R. 641-31, II, du Code de commerce ainsi que l'article 2372 du Code civil, la Cour de cassation considéra quant à elle que « le droit de propriété du vendeur sous réserve de propriété, dont le bien a été revendu et n'a pas été payé à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective, se reporte sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur, de sorte que le mandataire judiciaire ou le liquidateur ne doit remettre au revendiquant subrogé que le montant qui lui a été versé après l’ouverture de la procédure par le sous-acquéreur ou un tiers subrogé dans les droits du débiteur contre le sous-acquéreur ». Dès lors, la cour d’appel aurait dû rechercher si le liquidateur avait reçu les sommes revendiquées après le jugement d’ouverture de la procédure collective, soit du sous-acquéreur, soit de l'affactureur subrogé dans les droits du débiteur. Seules ces sommes pourront faire l’objet d’une restitution. 

Com. 24 janvier 2018, n° 16-20.589 et 16-22.128

Références

 ■ Fiches d’orientation Dalloz : Réserve de propriété et Affacturage

 

Auteur :Fernanda Sabrinni


  • Rédaction

    Directeur de la publication-Président : Ketty de Falco

    Directrice des éditions : 
    Caroline Sordet
    N° CPPAP : 0122 W 91226

    Rédacteur en chef :
    Maëlle Harscouët de Keravel

    Rédacteur en chef adjoint :
    Elisabeth Autier

    Chefs de rubriques :

    Le Billet : 
    Elisabeth Autier

    Droit privé : 
    Sabrina Lavric, Maëlle Harscouët de Keravel, Merryl Hervieu, Caroline Lacroix, Chantal Mathieu

    Droit public :
    Christelle de Gaudemont

    Focus sur ... : 
    Marina Brillié-Champaux

    Le Saviez-vous  :
    Sylvia Fernandes

    Illustrations : utilisation de la banque d'images Getty images.

    Nous écrire :
    actu-etudiant@dalloz.fr