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[ 24 octobre 2014 ] Imprimer

Le renouveau juridique

Au cours de la 6e édition du Salon du livre juridique qui s’est tenue au Conseil constitutionnel le 11 octobre 2014, Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale, a remis le Prix du livre juridique à Bernard Stirn (président de la Section du contentieux du Conseil d'État) et Yann Aguila (avocat au barreau de Paris) pour leur ouvrage Droit public français et européen, publié en juillet 2014 aux éditions Dalloz et Presses de Sciences Po. Enseignants tous les deux cette discipline, Dalloz Actu Étudiant a souhaité mesurer l’étendue du renouveau annoncé.

Prenant la suite du Droit administratif français rédigé pendant sept éditions par l’éminent et regretté Guy Braibant (aussi coauteur des précieux Grands arrêts de la jurisprudence administrative), votre ouvrage annonce le renouveau du droit public. Pourquoi une 8e édition du Droit administratif français n’était, selon vous, plus concevable ? Comment définiriez-vous aujourd’hui cette matière à un étudiant de première année de droit ?

B. S. : Le droit administratif français était fortement marqué par la pensée et par la personnalité du président Guy Braibant. Après son décès, en 2008, perpétuer son ouvrage impliquait de le reprendre en restant certes fidèle à l’approche et à la méthode mais en écrivant un ouvrage adapté aux évolutions du droit, à celles de l’enseignement à Sciences Po, et aussi au temps qui passe. D’où le Droit public français et européen

Aujourd’hui le droit public se situe, en effet, sur tous les grands sujets, dans le cadre européen, en même temps qu’un droit européen se construit, à partir des interactions entre le droit de l’Union européenne, le droit de la convention européenne des droits de l’homme et les différents droits nationaux.

Vous précisez : « Suprématie de la Constitution et primauté de l’ordre juridique de l’Union pourraient sembler se contredire. Les principes constitutionnels nationaux ne sont toutefois guère différents, quant à leur contenu, des règles sur lesquelles repose l’ordre juridique européen. Aussi la nécessaire conciliation entre les deux primautés est-elle possible ». En qualité de président de la Section du contentieux pour l’un et avocat pour l’autre, pouvez-vous témoigner de cette conciliation ? Avez-vous constaté un recours croissant au « visa » énonçant une règle européenne dans les décisions rendues par le Conseil d’État ? Pourrait-on imaginer, dans un futur proche, une évolution dans ce sens au détriment de la norme nationale ?

Y. A. : On observe une convergence des juridictions européennes et nationales, autour de principes directeurs partagés. La Cour de justice de l’Union européenne fait application de principes généraux du droit qui, en vertu du traité sur l’Union européenne lui-même, résultent des « traditions constitutionnelles communes aux États membres ».

À leur tour, les juridictions nationales s’inspirent des principes européens, pour créer ou interpréter les principes du droit interne. Tel a été le cas du Conseil d’État lorsqu’il a consacré le principe de sécurité juridique (CE, 24 mars 2006, KPMG), ou celui du Conseil constitutionnel, qui a posé une exigence constitutionnelle proche du principe de confiance légitime (Cons. const. 19 déc. 2013, Loi de financement de la sécurité sociale).

Les juridictions françaises n’ont pas pour habitude de citer dans leurs décisions leurs sources d’inspiration, mais l’influence européenne est ici manifeste. Dans ce jeu de fertilisations réciproques naît un droit public français et européen.

Issu des cours que vous dispensez, notamment à Sciences Po, cet ouvrage replace les questions juridiques dans une perspective plus globale, décrit les réalités de la vie administrative tout en s’interrogeant sur les enjeux de la réforme de l’État. Cette approche novatrice traduit-elle aussi la nécessité de revoir les méthodes d’enseignement au sein des Universités françaises ? Faut-il abandonner les traditionnels cours théoriques et impersonnels d’amphi et privilégier les cours participatifs, les groupes de réflexion, les conférences de professionnels, les case book ?

B. S. : Il est difficile d’avoir une idée arrêtée sur le sujet mais une réflexion d’ensemble serait bienvenue.

 

Questionnaire de Désiré Dalloz

Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ?

B. S. : La découverte de la conférence de méthode en première année de Sciences Po.

Y. A. : Les cours du professeur Christian Atias, parce qu’il était capable d’éveiller les esprits en commentant d’une façon lumineuse, durant tout un cours, un seul article du Code civil.

Quel est votre héros de fiction préféré ? Pourquoi ?

B. S. : Le narrateur de À la recherche du temps perdu. Parce qu’il porte le plus fort des regards sur les hommes sans se faire d’illusion sur lui-même.

Y. A. : Le Petit Prince. À cause de la couleur du blé…

Quel est votre droit de l’homme préféré ? Pourquoi ?

B. S. : La liberté individuelle. Parce que tout en dépend.

Y. A. : Je ne saurais mieux dire : également la liberté individuelle, parce qu’elle est à la base de tous les progrès de l’humanité.

 

Auteur :A. T.


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