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[ 25 octobre 2012 ] Imprimer

Du doctorat en droit et de l'accès à la profession d'avocat, fin et suite

Les organes représentatifs de la profession d'avocat s'étaient beaucoup exprimés depuis quelques mois sur le fait qu'il y aurait « trop d'avocats ».

Le bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Paris en avait rendu compte, le Conseil national des Barreaux (CNB) également, et ils avaient mêmes trouvé l'oreille attentive de la Cour des comptes qui, dans un référé récent, se montrait sceptique sur le devenir des étudiants en droit dans la profession d'avocat.

Classiques propos de crise, empreints de malthusianisme et qui s'était prolongé, réflexe habituel du malthusianisme en des propositions visant à restreindre l'accès à la profession d'avocat et en particulier de supprimer la passerelle permettant aux docteurs en droit de ne pas passer l'examen d'entrée aux écoles d'avocat.

Cette restriction s'appuyait sur des arguments connus : les docteurs en droit seraient d'un niveau moindre, leur diplôme ne vaudrait pas celui dont atteste l'entrée à l'École du barreau, ils auraient pu bénéficier de « complaisances »… Un membre du CNB, dans une récente interview donnait même une illustration fort proche des pains aux chocolats de Jean-François Copé : on aurait permis à des personnes ayant échoué trois fois à l'entrée au CRFPA, de boucler et de soutenir des thèses en six mois, pour bénéficier de la fameuse passerelle.

La proposition du CNB a suscité, dans le milieu des doctorants et des avocats docteurs une forte contestation qui s'est traduite par une pétition qui a recueilli en quelques jours plus de 2 500 signatures.

Devant cette levée de boucliers, la garde des Sceaux a pris récemment position en indiquant que la proposition du CNB ne serait pas suivie par les pouvoirs publics et que la passerelle serait maintenue.

Fin donc, de l'affaire.

Mais pourtant il serait tout à fait improductif de ne pas s'appuyer sur ce débat pour réfléchir à deux questions très importantes : d'abord le statut des doctorants, ensuite le statut des élèves avocats.

S'agissant du statut des doctorants, il faut avoir la lucidité de reconnaître que certaines des critiques formulées par la profession d'avocat sont en partie exactes bien que beaucoup trop caricaturales. : oui il est vrai que certaines soutenances de thèses ont pu être laxistes ; oui, il y a des docteurs en droit dont le niveau est médiocre ; oui, certains d'entre eux essayent ce faisant d'échapper aux contraintes de l'examen.

Pour mettre fin à ces critiques, il convient de poursuivre les efforts menés par le Conseil national des Universités (CNU) depuis cinq ans : réapparition des mentions honorables, réduction de l'attribution des félicitations, rapports des soutenances sévères. Ces efforts sont à l'origine d'une prise de conscience sur la qualité du doctorat qui commence se faire jour.

Il serait sans doute souhaitable, pour prolonger cette logique que la passerelle vers la profession d'avocat ne soit plus automatique mais fasse l'objet d'un examen par commission, composée d'un universitaire et d'un avocat docteur qui permettrait de filtrer les éventuels abus.

S'agissant du statut des élèves avocats, il faudrait aussi réfléchir à une évolution qui permettrait, en complétant les deux années d'études à l'École du barreau par une troisième année (en alternance par exemple université/cabinet) de permettre de délivrer un diplôme de docteur aux élèves avocats qui s'appuierait sur les travaux réalisés durant le PPI, la formation reçue à l'École et la rédaction d'un travail de recherche, dans la lignée des thèses soutenues par les médecins.

Cela participerait à la valorisation et à la reconnaissance de cette formation qui, elle aussi, fait aujourd’hui encore l'objet de critiques.

On voit donc qu'il est possible de sortir de ce conflit par le haut et d'en faire le point d'appui à une réflexion sérieuse et fructueuse sur le statut du doctorat en droit.

 

Auteur :Frédéric Rolin


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