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[ 13 juin 2019 ] Imprimer

Droit des sûretés et de la publicité foncière

Cautionnement non daté : sa validité reste inchangée

L’absence de date dans la mention manuscrite n’est pas une cause de nullité de l’acte de cautionnement.

Une banque avait conclu avec une société deux contrats de crédit-bail portant sur des matériels et une personne physique s’était rendue caution de leur exécution. À la suite de la mise en liquidation judiciaire de la société, la banque avait assigné en paiement la caution, qui lui avait en défense opposé la nullité de ses engagements pour absence de date.

La cour d’appel annula les actes de cautionnement souscrits au motif que, même si la datation de l’engagement de caution n’est pas une mention légalement prescrite à peine de nullité, il n’en demeure pas moins que celle-ci a a une incidence sur le point de départ de la durée déterminée de l’engagement qui doit, quant à elle, être impérativement précisée dans la mention manuscrite ; or aucune des clauses des actes de cautionnement ne précisait ce point de départ ni n’indiquait qu’il correspondrait à la date d’exécution du contrat cautionné, outre le fait qu’aucun autre élément ne permettait d’établir à quelle date la caution avait apposé la mention manuscrite, de sorte qu’il n’était même pas certain qu’au jour de son engagement, celle-ci connaissait la date de début du contrat et que l’omission de cette date dans la mention manuscrite avait par surcroît nécessairement affecté la compréhension, par la caution, de la portée de ses engagements.

Concrètement justifié, ce raisonnement est juridiquement invalidé par la chambre commerciale de la Cour de cassation au visa des articles 2292 du Code civil et L. 341-2 du Code de la consommation, ce dernier dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, celle-ci affirmant sans réserve pour justifier la cassation de la décision des juges du fond que « l’absence de date sur l'acte de cautionnement ou dans la mention manuscrite n’est pas une cause de nullité de cet acte ».

Cette décision mérite d’être relevée en ce qu’elle confirme l’interprétation stricte qui doit être faite des dispositions relatives au cautionnement, figurant au visa, et notamment de l’article 2292 du Code civil, selon lequel « le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ». Alors que la même chambre avait déjà eu l’occasion de juger que « l'absence de date sur l'acte de cautionnement ne peut fonder une action en nullité » (Com. 1er févr. 2011, n° 09-17.411), elle vient ici ajouter que l’absence de date dans la mention manuscrite est tout aussi indifférente. 

De la même façon que la Haute cour considère depuis longtemps que l’engagement de la caution pour une somme indéterminée n’en est pas moins valable dès lors que cette somme est déterminable et qu’il est acquis que la caution avait, de façon non équivoque, la connaissance de la nature et de l’étendue de l’obligation contractée (Civ. 1re, 12 nov. 1987, n° 86-12.340 ; Civ. 1re, 10 mai 1988, n° 86-16.000 ; Com. 22 nov. 1988, n° 86-15.095), il ressort de la jurisprudence rendue à propos des cautionnements non datés que l’exigence d’un cautionnement exprès est suffisamment satisfaite par le constat de la volonté ferme et non équivoque de la caution de s’engager. Tel était le cas, en l’espèce, l’étendue du cautionnement ayant été suffisamment déterminée dans la mesure où la caution était tenue dans les mêmes termes que le débiteur principal à garantir le paiement d’une dette déterminée et que les points de départ de leurs engagements respectifs coïncidaient, peu important que la caution en ait ignoré la date exacte lors de la souscription de son engagement de caution.

Com. 15 mai 2019, n°17-28.875

 

Auteur :Merryl Hervieu


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