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Contrats spéciaux
Exclusion du mandat apparent entre notaires
Mots-clefs : Notaire, Mandat, Mandataire apparent, Exclusion, Notaire instrumentaire, Acte dressé avec le concours d'un confrère
Le mandat apparent ne peut être admis pour l'établissement d'un acte par un notaire instrumentaire avec le concours d'un confrère, les deux officiers publics étant tenus de procéder à la vérification de leurs pouvoirs respectifs.
D’aucuns soulignent, quand d’autres la souhaitent, la régression progressive du domaine du mandat apparent (v. Ph. le Tourneau). L’arrêt rapporté en donne une illustration significative en matière notariale.
En l’espèce, un notaire rédige un projet de promesse de vente du garage appartenant à un couple de particuliers. Ces derniers ayant, par la suite, refusé de finaliser la vente, l’acheteur les a assignés en réalisation de la vente. Pour accueillir la demande et juger la vente parfaite, les juges du fond relèvent, s’appuyant sur la théorie du mandat apparent, un ensemble d’éléments permettant de convaincre, légitimement, l’acheteur et son notaire que le notaire des vendeurs avait le pouvoir d’engager ces derniers et, notamment, de fixer le prix de vente du bien. Les vendeurs se pourvoient alors en cassation. La première chambre civile censure l’arrêt d’appel au motif que le mandat apparent ne peut être admis pour l’établissement d’un acte par un notaire instrumentaire avec le concours d’un confrère, les deux officiers publics étant tenus de procéder à la vérification de leurs pouvoirs respectifs.
La même solution avait déjà été retenue par la troisième chambre civile (Civ. 3e, 13 mai 2009). Partagée, cette position se fonde sur la nécessaire exclusion, dans cette hypothèse, de la légitimité de la croyance du tiers dans les pouvoirs de celui avec lequel il a traité. En effet, à côté du mandat véritable, la jurisprudence a découvert le mandat apparent, en vertu duquel une personne X est engagée comme si elle était un mandant, parce qu’un tiers Y a cru qu’une autre personne Z, avec laquelle il a traité, était le mandataire de la première. Le fait (l’apparence) crée le droit.
La croyance légitime du tiers se présente comme l’unique condition, en jurisprudence, de l’application de la théorie (depuis Ass. plén. 13 déc.1962). Cela étant, les contours de cette notion de croyance légitime sont flous. Il ressort néanmoins de la jurisprudence qu’outre les circonstances objectives liées à l’acte lui-même, le juge doit d’abord s’attacher à l’acte écrit pour déceler si, effectivement, l’intermédiaire a déclaré agir au nom d’autrui, ou a donné à croire qu’il agissait ainsi. Une circonstance subjective, tirée de la bonne foi du tiers, est également prise en compte. Inhérente à la croyance légitime, la bonne foi est présumée dès lors que les « circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les pouvoirs du mandataire apparent », selon la formule consacrée par les juges.
Les circonstances retenues par la jurisprudence sont diverses, et insusceptibles d’être énumérées. Cependant, on remarque que la qualité du tiers, principalement sa profession, est souvent prise en considération. Ainsi la Cour de cassation a-t-elle pu écarter la croyance légitime d’une banque en un mandat apparent d’un de ses clients, ou celle d’un syndic dès lors que l’acte litigieux ne relevait pas des attributions normales de l’avocat avec lequel il traitait. Elle a encore retenu que le mandat apparent ne peut tenir en échec la règle impérative selon laquelle l’agent immobilier doit détenir un mandat écrit (Civ. 1re, 31 janv. 2008).
De façon plus générale, au-delà du cas de l’agent immobilier, la multiplicité des réformes législatives régissant les actes accomplis par représentation conduit à un reflux du jeu du mandat apparent. En l’espèce, plus que sa profession à proprement parler, c’est la qualité d’officier public du notaire qui exclut la légitimité de la croyance ; comme le relève la Cour de cassation, en cette qualité, ce dernier était tenu de procéder à la vérification des pouvoirs du confrère avec le concours duquel l’acte en cause fut établi. Le mandat apparent ne profite donc pas à celui qui aurait pu et dû vérifier les pouvoirs. Dans ce cas, sa bonne foi présumée est, de ce fait, immédiatement combattue.
Civ. 1re, 20 mars 2013, n°12-11.567
Références
■ Ph. le Tourneau, Droit de la responsabilité et des contrats 2012/2013, Dalloz, coll. « Dalloz Action », 2012, n°4021.
■ Civ. 3e, 13 mai 2009, n°08-16.720.
■ Ass. plén. 13 déc.1962, D. 1963. 277.
■ Civ. 1re, 31 janv. 2008, n°05-15.774.
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