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[ 9 novembre 2012 ] Imprimer

Droit administratif des biens

Gestion du domaine public communal et liberté du commerce et de l’industrie

Mots-clefs : Liberté du commerce et de l’industrie, Pouvoir de police du maire, Gestion des musées, Domanialité publique, Gestion du domaine public communal, Photographies, Œuvres d’art

Un maire peut refuser l’autorisation de photographier des œuvres d’un musée réalisées à des fins commerciales, ces prises de vues devant être regardées comme une utilisation privative du domaine public mobilier. La décision de refus ne porte pas atteinte au principe de la liberté du commerce et de l’industrie.

Une entreprise, spécialisée notamment dans la photographie d’œuvres d’art à destination des éditeurs d’art, d’ouvrages scolaires ou de presse, avait demandé au maire de Tours l’autorisation de prendre des clichés de certaines œuvres appartenant aux collections du musée des Beaux-Arts de la commune. À la suite du rejet implicite de cette demande, cette entreprise a saisi le juge administratif qui a confirmé en première instance le refus du maire ; la cour administrative d’appel de Nantes a ensuite annulé ce jugement (CAA Nantes 4 mai 2010, EURL Photo Josse). Le maire forme alors un pourvoi devant le Conseil d’État qui annule la décision de la cour administrative d’appel de Nantes.

Les collections des musées font partie du domaine public mobilier de la personne publique propriétaire (CGPPP, art. L. 2112-1, 8°) ; en l’espèce, les œuvres du musée des Beaux-Arts appartiennent à la commune de Tours.

Le Conseil d’État rappelle dans cette affaire le principe selon lequel « l'autorité chargée de la gestion du domaine public peut autoriser une personne privée à occuper une dépendance de ce domaine ou à l'utiliser en vue d'y exercer une activité économique, à la condition que cette occupation ou cette utilisation soit compatible avec son affectation et sa conservation ; … la décision de refuser une telle autorisation, que l'administration n'est jamais tenue d'accorder, n'est pas susceptible, par elle-même, de porter atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie, dont le respect implique, d'une part, que les personnes publiques n'apportent pas aux activités de production, de distribution ou de services exercées par des tiers des restrictions qui ne seraient pas justifiées par l'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi et, d'autre part, qu'elles ne puissent prendre elles-mêmes en charge une activité économique sans justifier d'un intérêt public » (v. CE 23 mai 2012, Régie autonome des transports parisiens (RATP)).

Ainsi, le principe constitutionnel de liberté du commerce et de l’industrie doit se concilier avec l’occupation ou l’exploitation privative du domaine public. Selon le Conseil d’État, la cour administrative a commis une erreur de droit en jugeant que le maire de Tours avait méconnu le principe de la liberté du commerce et de l’industrie. En effet, la collectivité publique affectataire de collections de musées peut, dans le respect du principe d’égalité, refuser l’usage privatif de ce domaine public mobilier, sans que puisse être opposé à ce refus aucun droit fondé, sur le principe de la liberté du commerce et de l'industrie, à exercer une activité économique sur ce domaine public.

CE 29 oct. 2012, Commune de Tours, n° 341173

Références

 CAA Nantes 4 mai 2010, EURL Photo Josse, n° 09NT00705, AJDA 2010. 1475, note Degommier.

■ CE 23 mai 2012, Régie autonome des transports parisiens (RATP), n° 348909, au Lebon ; AJDA 2012. 1037ibid. 1129, tribune Braconnier RDI 2012. 566, obs. Foulquier.

■ Article L. 2112-1 du Code général de la propriété des personnes publiques

« Sans préjudice des dispositions applicables en matière de protection des biens culturels, font partie du domaine public mobilier de la personne publique propriétaire les biens présentant un intérêt public du point de vue de l'histoire, de l'art, de l'archéologie, de la science ou de la technique, notamment : 

1° Un exemplaire identifié de chacun des documents dont le dépôt est prescrit aux fins de constitution d'une mémoire nationale par l'article L. 131-2 du code du patrimoine ; 

2° Les archives publiques au sens de l'article L. 211-4 du code du patrimoine ; 

3° Les archives issues de fonds privés entrées dans les collections publiques par acquisition à titre onéreux, don, dation ou legs ; 

4° Les découvertes de caractère mobilier devenues ou demeurées propriété publique en application du chapitre 3 du titre II et du chapitre 1er du titre III du livre V du code du patrimoine ; 

5° Les biens culturels maritimes de nature mobilière au sens du chapitre 2 du titre III du livre V du code du patrimoine ; 

6° Les objets mobiliers classés ou inscrits au titre du chapitre 2 du titre II du livre VI du code du patrimoine ou situés dans un immeuble classé ou inscrit et concourant à la présentation au public de parties classées ou inscrites dudit immeuble ; 

7° Les objets mobiliers autres que ceux mentionnés au 6° ci-dessus, présentant un intérêt historique ou artistique, devenus ou demeurés propriété publique en application de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État ; 

8° Les collections des musées ; 

9° Les œuvres et objets d'art contemporain acquis par le Centre national des arts plastiques ainsi que les collections d'œuvres et objets d'art inscrites sur les inventaires du Fonds national d'art contemporain dont le centre reçoit la garde ; 

10° Les collections de documents anciens, rares ou précieux des bibliothèques ; 

11° Les collections publiques relevant du Mobilier national et de la Manufacture nationale de Sèvres. »

 

Auteur :C. G.


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