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Inefficacité d’une clause d’exclusion de la garantie des vices cachés : assimilation du vendeur-constructeur au vendeur professionnel
Mots-clefs : Vente, Garantie des vices cachés, Clause d'exclusion de la garantie des vices cachés, Action estimatoire
Pour statuer sur l’action estimatoire exercée par l’acquéreur, le juge doit rechercher, comme il le lui était demandé si, en sa qualité de constructeur, le vendeur pouvait ignorer les vices de l’ouvrage.
Conséquence de l’obligation du vendeur de délivrer la chose convenue, la garantie des vices cachés, prévue par les articles 1641 et suivants du Code civil, autorise l’acquéreur d’une chose affectée d’un défaut à exercer, à son choix (art. 1644 C. civ.), l’action rédhibitoire (résolution de la vente) ou l’action estimatoire (réduction du prix). L’article 1643 du code civil prévoit néanmoins expressément que la garantie des vices cachés peut être écartée par la volonté des parties.
C’est cette faculté qui avait été exercée en l’espèce : l’acte authentique constatant une vente immobilière contenait une clause d’exclusion de la garantie des vices cachés. Une fissure étant apparue sur un mur qui avait été construit par les vendeurs, ces derniers se sont prévalus de la clause d’exclusion de garantie pour s’opposer à l’action estimatoire exercée par l’acquéreur.
Conformément aux termes de l’article 1643 du code civil, la stipulation d’une exclusion de garantie des vices cachés ne saurait développer ses effets au profit du vendeur de mauvaise foi, c’est-à-dire celui qui connaissait le défaut (v. par ex. Civ. 3e, 16 déc. 2009). C’est pourquoi, pour débouter l’acquéreur de ses demandes, la cour d’appel s’appuyait sur la bonne foi des vendeurs dont l’acquéreur n’apportait pas la preuve, en dépit des circonstances, qu’ils avaient eu connaissance du vice affectant la construction.
Mais c’était sans compter avec une solution originale retenue par la troisième chambre civile de la Cour de cassation en 2011 à l’égard du vendeur-constructeur. La jurisprudence fait peser sur le vendeur professionnel une présomption irréfragable de connaissance des vices de la chose qui lui interdit de se prévaloir d'une stipulation excluant sa garantie pour vices cachés. Or, dans une affaire où un vendeur avait réalisé, avec le concours d’un artisan plombier-chauffagiste, la transformation du système de chauffage de son immeuble avec installation d’un poêle à l’origine d’un incendie, les juges du droit ont approuvé la cour d’appel d’avoir assimilé ce vendeur à un vendeur professionnel tenu de connaître les vices dès lors qu’il s'était comporté en qualité de maître d'œuvre, qu'il avait acheté les matériaux, conçu et en partie réalisé l'installation litigieuse (Civ. 3e, 9 févr. 2011). Cet arrêt semble étendre à tout vendeur-constructeur une solution rigoureuse qui n’avait été appliquée auparavant qu’à des vendeurs dont les compétences techniques liées à leur profession jouaient en faveur de leur assimilation au vendeur professionnel (comp. pour un technicien du bâtiment : Civ. 3e, 26 févr. 1980 ; pour un artisan-maçon : Civ. 3e, 27 sept. 2000 ; pour un ingénieur des travaux publics, ancien dirigeant d’une entreprise de bâtiment : Civ. 3e, 26 avr. 2006).
C’est cette solution qui était invoquée par le moyen au pourvoi pour critiquer la décision des juges d’appel, avec succès puisque l’arrêt est cassé au visa des articles 1641 et 1643 du Code civil, la Cour de cassation reprochant à la cour d’appel de n’avoir pas recherché si, en sa qualité de constructeur, le vendeur pouvait ignorer les vices de l’ouvrage.
Civ. 1re, 11 avr. 2012, no 11-13.198, inédit
Références
■ Civ. 3e, 16 déc. 2009, no 09-10.540.
■ Civ. 3e, 9 févr. 2011, no 09-71.498, Bull. civ. III, n° 24, D. 2011. 1328, note J.-P. Storck.
■ Civ. 3e, 26 févr. 1980, no 78-15.556, Bull. civ. III, no 47, Gaz. Pal. 1981. 2. 646, note Leneveu.
■ Civ. 3e, 27 sept. 2000, no 99-10.297, D. 2001. 2628, note J.-P. Storck.
■ Civ. 3e, 26 avr. 2006, no 04-18.466, Bull. civ. III, no 106 ; CCC 2006, n° 155, note Leveneur.
■ Code civil
« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. »
« Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie. »
« Dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par experts. »
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