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Droit administratif général
QPC : la condition de bonne moralité pour devenir magistrat n’est pas contraire à la Constitution
Mots-clefs : QPC, Magistrat, Recrutement, Candidat, Bonne moralité, Conformité
La « bonne moralité » est une condition nécessaire pour accéder aux fonctions de magistrat. Pour la première fois, le 5 octobre 2012, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur une question relative aux conditions de moralité exigées pour remplir certains emplois.
En l’espèce, une jeune fille, titulaire en 2010 d’un master en droit, mention « carrières judiciaires et sciences criminelles », s’est vu refuser l’autorisation de se présenter aux épreuves de la session 2011 du premier concours d’accès à l’École nationale de la magistrature par une décision du garde des Sceaux du 1er juin 2011, en raison de faits de conduite en état alcoolique en date du 2 mars 2008. « Ce comportement empêche de considérer que Mlle X. remplit la condition de bonne moralité exigée par le 3° de l’article 16 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature » (V. les conclusions du rapporteur public, Mme Suzanne von Coester, ss. CE, QPC, 17 juill. 2012, Mlle X., n° 358648). Cette jeune fille a saisi le Tribunal administratif d’une demande d’annulation de la décision du ministre de la Justice et a soulevé une QPC, transmise au Conseil d’État relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution concernant la « bonne moralité », notamment en ce que les dispositions du 3° de l’article 16 de l’ordonnance précitée méconnaîtraient la compétence confiée au seul législateur organique par l'article 64 de la Constitution, et affecteraient en conséquence le principe d'égal accès des citoyens aux places et emplois publics garanti par l'article 6 de la Déclaration de 1789. Le 5 octobre 2012, le Conseil constitutionnel a rendu sa décision et a estimé que « les dispositions contestées ont pour objet de permettre à l’autorité administrative de s’assurer que les candidats présentent les garanties nécessaires pour exercer les fonctions des magistrats, et en particulier, respecter les devoirs qui s’attachent à leur état. » Ainsi, l’autorité administrative est compétente pour apprécier, sous le contrôle du juge administratif, les faits de nature à mettre sérieusement en doute l’existence de ces garanties. Le législateur organique n’a pas l’obligation, au sens de l’article 6 de la Déclaration de 1789, de préciser la nature de ces faits et les modalités selon lesquelles ils sont appréciés. Le législateur organique n’a donc pas méconnu l’étendue de sa compétence et les dispositions contestées (« être de bonne moralité ») « sont conformes à la Constitution ».
Selon le commentaire du Conseil constitutionnel, la question relative aux conditions de recrutement des magistrats n’était pas de savoir, si en elle-même, la notion de bonne moralité était ou non suffisamment précise, mais si cette notion conférait à l’autorité administrative un pouvoir arbitraire. Le Conseil précise qu’il ne s’agit pas d’un pouvoir arbitraire mais d’un pouvoir discrétionnaire de l’Administration quant à l’appréciation de ce critère, l’autorité administrative étant habilitée à décider de la bonne moralité sous le contrôle du juge administratif.
Cons. const., 5 oct. 2012, Mme Élisabeth B., n° 2012-278 QPC.
Références
■ Article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789
« La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.»
■ Article 64 de la Constitution de 1958
« Le Président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire.
Il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature.
Une loi organique porte statut des magistrats.
■ Article 16 de l’ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature
« Les candidats à l'auditorat doivent :
1° Être titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation d'une durée au moins égale à quatre années d'études après le baccalauréat, que ce diplôme soit national, reconnu par l'État ou délivré par un État membre de la Communauté européenne et considéré comme équivalent par le ministre de la justice après avis d'une commission dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'État, ou d'un diplôme délivré par un institut d'études politiques, ou encore avoir obtenu le certificat attestant la qualité d'ancien élève d'une école normale supérieure. Cette exigence n'est pas applicable aux candidats visés aux 2° et 3° de l'article 17 ;
2° Être de nationalité française ;
3° Jouir de leurs droits civiques et être de bonne moralité ;
4° Se trouver en position régulière au regard du code du service national.
5° Remplir les conditions d'aptitude physique nécessaires à l'exercice de leurs fonctions et être reconnus indemnes ou définitivement guéris de toute affection donnant droit à un congé de longue durée. »
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