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[ 22 février 2024 ] Imprimer

Sur les paris en ligne

La pratique des jeux d’argent et de hasard en ligne s’installe durablement en France et ce secteur brasse beaucoup d’argent. Avec les événements sportifs mondiaux de l’année 2024 à venir sur le territoire, Dalloz Actu Étudiant s’interroge grandement sur les règles applicables aux paris en ligne. Guilhem Julia, maître de conférences en droit privé, directeur du Master 2 « Droit des activités numériques » de la Faculté de droit de l’Université Sorbonne Paris Nord, nous fait le grand plaisir de nous éclairer par ses réponses.

Quelle est la réglementation des paris en ligne ?

En 2022, les paris sportifs en ligne ont généré un produit brut des jeux (total des sommes jouées moins le total des sommes reversées aux joueurs) de plus de 1,3 milliard d’euros.

Contrairement aux jeux de hasard « en dur » relevant principalement du monopole de la Française des Jeux et des casinos, les jeux de hasard en ligne sont ouverts à la concurrence. Ils comprennent les paris sportifs et hippiques et le jeu de poker.

La réglementation des paris en ligne existe depuis 2010 et repose sur un principe : seul un opérateur agréé par l’État est autorisé à proposer ce service sur Internet. À ce jour, 16 opérateurs bénéficient de cet agrément. Pour autant, l’essentiel du chiffre d’affaires du secteur est réalisé par trois d’entre eux.

Précisons également que le droit au pari sportif appartient d’abord à l’organisateur de la manifestation sportive qui le commercialise ensuite auprès d’un opérateur agréé.

Y a-t-il un dispositif particulier pour la protection des mineurs ?

La politique de réglementation des jeux en ligne poursuit trois objectifs : la prévention du jeu pathologique, la lutte contre le blanchiment d’argent et la protection des mineurs.

Sur ce dernier point, le Code de la sécurité intérieure est très clair : le mineur, même émancipé, ne peut pas prendre part à un jeu de hasard en ligne (art. L. 320-7). Lors de son inscription en ligne, le joueur doit donc télécharger sa carte d’identité afin que soit contrôlée sa capacité. Il n’est pas certain que le procédé suffise à empêcher un mineur de jouer en ligne...  

Quelle Autorité les met en œuvre ? 

L’autorité de référence est l’Autorité nationale des jeux (ANJ), créée le 1er janvier 2020, qui remplace l’ancienne autorité, l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL). Sa mission consiste à délivrer les agréments aux opérateurs désireux de proposer des services de paris sportifs.

La loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 fixe les conditions dans lesquelles l’agrément est délivré. Pour l’obtenir, l’opérateur doit, entre autres, préciser les modalités d’exploitation de son site, prouver sa solidité financière et sa conformité à la législation applicable. L’agrément est délivré pour une durée de 5 ans renouvelable.

Comment intervient la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ?

Contrat de consommation, le contrat de pari sportif est soumis à la législation relative aux pratiques commerciales déloyales.

Dans un communiqué publié le 2 novembre 2023, la DGCCRF a rendu compte d’une récente enquête destinée à contrôler la loyauté des sites proposant des conseils en matière de paris sportifs. Sur 11 entreprises contrôlées, 4 sont apparues en infraction pour avoir affirmé à tort qu'un produit ou un service augmentait les chances de gagner de l’argent.

Ces dérives rappellent celles de plusieurs influenceurs condamnés pour avoir délivré de fausses – voire dangereuses – informations à leurs internautes. La loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 est venue réguler ces dérives. À l’approche des prochains Jeux olympiques, une loi semblable serait certainement opportune en matière de paris sportifs.

Le questionnaire de Désiré Dalloz

Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ?

Il s’agit du concours d’éloquence Oratio organisé par la Faculté de droit de Rouen où j’ai fait mes études. Étudiant en 2e année de Licence, j’avais accédé à la finale du concours qui proposait des joutes sur des sujets décalés du type : « L’amour est un bouquet de violettes » ou « Vive le vent d’hiver ».

J’avais décidé d’inclure dans chacune de mes plaidoiries un tour de magie en lien avec le sujet. Je me démarquais ainsi de mes concurrents et réunissais mes deux passions : le droit et la prestidigitation ... ! 

Quels sont votre héros et votre héroïne de fiction préférés ?

Guido, héros du film La vie est belle de Roberto Benigni me touche particulièrement. Ce personnage déploie une générosité, une inventivité et un humour à toute épreuve. Il agit ainsi au début de l’histoire pour rencontrer et faire la cour à sa femme et ensuite pour protéger son fils de l’horreur du camp nazi dans lequel ils se trouvent enfermés. Cet amour inconditionnel pour sa femme et son fils me donne des frissons à chaque vision du film…

Concernant l’héroïne, je pense à la mère dans le roman En attendant Bojangles de Olivier Bourdeaut. Une femme insaisissable (elle change de nom plusieurs fois au cours de l’histoire !), atteinte d’une maladie qui la fait vivre dans sa propre réalité et à laquelle elle succombe. En dépit de son dénouement, le roman distille mille bulles de bonheur, tant la mère fait de sa vie une fête permanente dans laquelle elle entraîne mari et enfant. Ici encore, il est question d’un amour familial plus fort que tout et d’une imagination totalement au pouvoir... 

Quel est votre droit de l’homme préféré ?

Aujourd’hui, plus que jamais, il faut rappeler l’importance du droit au respect de la vie privée, « le droit d’être laissé tranquille » disait Carbonnier. Notre société numérique hyperconnectée nous enjoint quotidiennement d’exposer et de partager des fragments de nous de plus en plus intimes : nos goûts, nos projets, nos envies, nos rencontres…

Ces éléments génèrent un nombre croissant de données personnelles qui alimentent le marché de l’économie numérique. Il faut relever le défi de restaurer le droit au respect de la vie privée, notamment au sein de la jeune génération dont les habitudes numériques, très ancrées, contredisent souvent ce droit.

 

Auteur :MBC


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