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[ 11 octobre 2017 ] Imprimer

Droit des obligations

A propos de l’application dans le temps de l’ordonnance du 10 février 2016

Mots-clefs : Réforme du droit des contrats, Mandat, Agent immobilier, Offres, Promesses, Contrat de travail, Application de la loi dans le temps

L’évolution du droit des obligations résultant de l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016, conduit à apprécier différemment, outre le mandat d’agent immobilier, la portée des offres et promesses de contrat de travail.

La réforme du droit des contrats suscite un contentieux déjà assez nourri sur son application aux contrats en cours. Une chambre mixte avait déjà rendu sur ce point un arrêt qui avait retenu l’attention (Ch. mixte, 24 févr. 2017, n° 15-20.411). Deux nouveaux arrêts rendus le 20 septembre, par la première chambre civile, et, le 21 septembre, par la chambre sociale de la Cour de cassation présentent à leur tour un grand intérêt. 

Le premier arrêt, rendu le 20 septembre 2017, a trait à la possible ratification des actes accomplis par un agent immobilier sans mandat. Le second arrêt, en date du 21 septembre 2017, concerne la distinction entre l’offre de contrat de travail et la promesse unilatérale d’un tel contrat.

Dans leurs deux arrêts, les Chambres de la Cour de cassation se prononcent au vu de « l’évolution du droit des obligations résultant de l’ordonnance n°2016-131 du février 2016 ». 

Ainsi, dans sa décision, la première Chambre civile, pour décider si la ratification était possible, se fonde les définitions de la nullité absolue et de la nullité relative telles qu’elles sont énoncées dans la loi nouvelle, qu’elle applique donc à un contrat de mandat en cours, lors de son entrée en vigueur. La Cour rend donc sa décision à la lumière de la réforme et écarte donc la règle traditionnelle de la survie de la loi ancienne pour les effets futurs des contrats conclus avant son entrée en vigueur. Reste que cette entorse à ce principe fondamental n’est que relative dans la mesure où la loi nouvelle n’est précisément que la réplique de la loi ancienne. En effet, avant la réforme, la jurisprudence avait adopté les définitions de la nullité relative et de la nullité absolue que celle-ci retient, ainsi que le même critère de distinction entre les deux catégories de nullité. Tant et si bien qu’au fond, la Cour, même si elle applique la loi nouvelle au contrat litigieux en cours, ne modifie pas pour autant la loi ancienne.

Plus important est, sur ce point de l’application d’une loi nouvelle aux contrats en cours, l’arrêt de la Chambre sociale. En effet, dans sa motivation, la Cour, en s’inspirant de la réforme, énonce une distinction entre l’offre de contrat de travail et la promesse unilatérale de contrat de travail qui constitue une innovation par rapport à l’état du droit antérieur, donc par rapport à la loi ancienne sous l’empire de laquelle l’acte litigieux avait été conclu. Elle affirme, en effet, que la rétractation d’une promesse pendant le délai fixé par l’offrant ou pendant le délai raisonnable d’acceptation, ne peut pas être sanctionné par la formation force du contrat offert (ce qui n’est pas nouveau), et que la révocation de la promesse pendant le délai d’option n’empêche pas la formation du contrat nouveau (ce qui tranche avec la règle jurisprudentielle antérieure). En somme, la Cour, même si elle a finalement décidé que l’acte litigieux ne constituait qu’une offre a implicitement admis que la réforme pouvait s’appliquer à des contrats en cours. En effet, si elle avait qualifié l’acte litigieux de promesse unilatérale de contrat de travail, elle aurait alors décidé que le contrat était formé à la suite du consentement du bénéficiaire et que celui-ci pouvait obtenir des dommages-intérêts en raison de la rupture de ce contrat par le promettant-employeur. En somme, cet arrêt est extrêmement intéressant car on peut en induire que la Cour admet l’application de la réforme aux contrats en cours : une décision relative à un contrat en cours lors de l’entrée en vigueur de la réforme peut être rendue à la lumière de celle-ci et, en définitive, le principe de la survie de la loi ancienne peut donc être écartée assez aisément par la Cour de cassation… Ce qui se discute.     

Civ. 1re, 20 sept. 2017, no 16-12.906

Soc. 21 sept. 2017, n° 16-20.103

Référence

■ Ch. mixte, 24 févr. 2017, n° 15-20.411 P : D. 2017. 793, obs. N. explicative de la Cour de cassation, note B. Fauvarque-Cosson ; ibid. 1149, obs. N. Damas ; AJDI 2017. 612, obs. M. Thioye ; AJ Contrat 2017. 175, obs. D. Houtcieff ; RTD civ. 2017. 377, obs. H. Barbier.

 

Auteur :P. M.


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