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Droit du travail - relations individuelles
À travail égal, salaire égal !
Mots-clefs : Droit social, « À travail égal, salaire égal », Date d’embauche, Justification de la disparité de traitement (non)
La seule circonstance que des salariés aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif ne saurait suffire à justifier des différences de rémunération entre eux, lesquelles portent alors atteinte au principe « à travail égal, salaire égal ».
Deux salariés de l’URSAFF, l’un ayant été engagé le 1er juin 1989 en qualité d'agent de contrôle des employeurs et devenu inspecteur degré 1 le 1er juillet 1997, l’autre le 5 juin 1984 en qualité d'agent de contrôle des employeurs et devenue inspectrice degré 1 à compter du 1er mai 2002, faisaient partie d’un groupe de quatre inspecteurs en poste promus au niveau 7 avec effet au 1er juin 2009, tandis qu'un autre inspecteur avait bénéficié de cette promotion dès le 1er mai 2008.
Estimant qu'ils auraient dû avoir droit à la même promotion dès cette date (1er mai 2008), ces deux salariés réclamaient devant le juge prud’homal le paiement d'arriérés de salaires. Leur employeur leur avait refusé en vertu d’une disposition de leur convention collective, dans sa rédaction antérieure à la date de leur embauche, les salariés ne pouvant donc, selon lui, se prévaloir du protocole d’accord la renouvelant en leur faveur dès lors qu’ils avaient été embauchés antérieurement à la date d’entrée en vigueur dudit protocole.
En ce sens, la cour d’appel, pour rejeter leurs demandes, s’appuya sur l’ancienne version de la convention collective pour en déduire que la bonification demandée était perdue en cas de promotion de l'agent à un niveau de qualification supérieure et que, comme elle l’avait plus tôt jugé, n'ayant pas droit à la bonification litigieuse, les salariés devaient, en l’absence de violation du principe « à travail égal, salaire égal », être déboutés de leurs demandes.
Cette décision est cassée par la chambre sociale. Au visa du principe général « à travail égal, salaire égal », elle juge que la seule circonstance que des salariés aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif ne saurait suffire à justifier des différences de rémunération entre eux, et qu'il appartient donc à l'employeur de démontrer qu'il existe d’autres raisons, objectives, à la différence de rémunération entre des salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale dont il revient au juge de contrôler la réalité et la pertinence.
La Cour reproche ainsi aux juges du fond de ne pas avoir recherché si la différence de traitement des salariés engagés avant la date d'entrée en vigueur du protocole d'accord renouvelant les termes de la convention collective par rapport aux salariés engagés après cette date, n'était pas la seule conséquence des modalités d'application du reclassement des emplois, défavorables aux salariés nommés dans ces fonctions avant l'entrée en vigueur du protocole, lesquelles ne constituent pas une raison objective pertinente justifiant la disparité de traitement.
La règle « à travail égal salaire égal » impose d'octroyer les mêmes avantages à tous les salariés placés dans une situation identique (Soc. 28 nov. 2006 ; Soc 28 avr. 2006). Par exemple, à condition que les règles déterminant l'octroi de l'avantage soient préalablement définies et que tous les salariés placés dans une situation identique puissent en bénéficier, l'employeur est en droit d’accorder à certains salariés une rémunération supérieure (Soc. 10 déc. 2008). C’est le cas lorsque les salariés d’une même entreprise bénéficient d’avantages différents du fait de leur appartenance à des catégories professionnels distinctes, peu importe que ceux-ci aient été désignés permanents syndicaux le temps d’un mandat (Soc. 24 sept. 2014).
En revanche, il ressort de la jurisprudence sociale comme, plus particulièrement, de la décision commentée, que la date d’embauche ne peut constituer à elle seule une raison objective justifiant valablement une disparité de traitement. Ainsi avait-il déjà été jugé, au regard du principe “à travail égal, salaire égal”, que la seule circonstance que des salariés aient été engagés avant ou après que l'employeur a décidé de modifier les modalités de calcul d'un avantage salarial résultant d'un usage ne peut suffire à justifier des différences de traitement entre eux (Soc. 18 mars 2009 ; Soc. 4 févr. 2009).
En vertu du même principe, la chambre sociale a également considéré que la seule circonstance que des salariés aient été engagés avant ou après la dénonciation d'un accord collectif ne saurait justifier des différences de traitement entre eux, à l'exception de celles résultant pour les salariés engagés avant la dénonciation des avantages individuels acquis par ces derniers ayant pour objet de compenser, en l'absence de conclusion d'un accord de substitution, le préjudice subi du fait de la dénonciation (Soc. 11 juill. 2007).
En revanche, un salarié engagé postérieurement à la mise en œuvre d'un accord collectif organisant le passage d'une rémunération au pourcentage à une rémunération au fixe ne se trouve pas dans une situation identique à celle des salariés présents dans l'entreprise à la date de conclusion dudit accord et qui subissent, du fait de la modification de la structure de leur rémunération, une diminution de leur salaire de base que l'attribution de l'indemnité différentielle a pour objet de compenser. En conséquence, dans la mesure où il existe une justification objective à la différence de rémunération, cet accord ne méconnaît pas le principe « à travail égal, salaire égal » (Soc. 31 oct. 2006).
Soc. 24 sept. 2014, n°13-10.233 et n°13-10.234
Références
■ Soc. 28 nov. 2006, n° 05-41.414.
■ Soc. 28 avr. 2006, n° 03-47.171.
■ Soc. 10 déc. 2008, n°07-40.911.
■ Soc. 24 sept. 2014, n°13-11.782.
■ Soc. 18 mars 2009, n°07-43.808.
■ Soc. 4 févr. 2009, n°07-41.006, Dr. soc. 2009. 399, note C. Radé.
■ Soc. 11 juill. 2007, n°06-42.128, Dr. soc. 2007. 1122, note C. Radé.
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