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Droit des régimes matrimoniaux
Acquisition d’un bien propre d’un époux financé par la communauté : quelle récompense ?
Mots-clefs : Régimes matrimoniaux, Dissolution, Divorce, Bien propre, Emprunt, Communauté, Récompense, Dépense faite, Profit subsistant, Art. 1469 C. civ.
La récompense due à la communauté pour le remboursement d’un emprunt ayant servi à l’acquisition d’un bien propre d’un époux ne peut être moindre que le profit subsistant.
Cet arrêt est une mise en application de la théorie des récompenses et, plus spécifiquement, du mode de calcul du montant de la récompense due par un époux emprunteur à la communauté, reposant sur l’article 1469 du Code civil et faisant appel aux notions de « dépense faite » et de « profit subsistant ».
Le logement familial d’un couple marié sous le régime légal était constitué d’un bien propre de l’époux dont l’acquisition avait été toutefois financée par un prêt remboursé par la communauté. Au prononcé du divorce, une récompense était réclamée à l’ex-époux.
En vertu de l’article 1437 du Code civil, récompense est due à la communauté « toutes les fois que l'un des deux époux a tiré un profit personnel des biens de la communauté ». Mais toute la difficulté réside dans le mode de calcul du montant de la récompense à retenir (art. 1469 C. civ.), ce qui nécessite au préalable de qualifier la nature de la dépense faite : dépense d’acquisition ou dépense nécessaire ?
En l’espèce, les juges du fond avaient estimé que l’emprunt souscrit pour l’acquisition s’analysait en une impense nécessaire et que, de ce fait, la récompense due à la communauté ne pouvait être moindre que la dépense faite (application de l’al. 2 de l’art. 1469 C. civ.).
La Haute Cour censure pour défaut de base légale au visa de l’article 1469 du Code civil en rappelant « qu’il résulte de ce texte que la récompense ne peut être moindre que le profit subsistant quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur ni moindre que la dépense faite quand celle-ci était nécessaire ». Elle souligne que les juges auraient du constater « que le profit subsistant était d’un montant inférieur à la dépense faite ».
Indirectement, la Cour retient donc la qualification de dépense d’acquisition (al. 3). Selon la jurisprudence, peu importe que le bien ait été acquis avant ou pendant le mariage dès lors que le remboursement du prêt s’effectue au cours du mariage avec des deniers communs (Civ. 1re, 5 nov. 1985 ; Civ. 1re, 25 mai 1992). Dans son attendu de principe, elle pose comme règle de calcul la règle du double minimum (al. 2 et 3) : pas moins que le profit subsistant ; pas moins que la dépense faite.
Ainsi rappelons que lorsque la dépense faite par la communauté a contribué à acquérir un bien propre, le calcul de la récompense tient compte du profit subsistant au jour de la liquidation ou au jour le plus proche possible du partage ou encore au jour de l'aliénation du bien. En outre, le profit subsistant doit être déterminé d’après la proportion dans laquelle les fonds communs ont contribué au financement de l’acquisition (Civ. 1re, 11 mars 2009 ; Civ. 1re, 6 mai 1997, ce que soulignaient les avocats de l’époux.
Civ. 1re, 15 déc. 2010, n°09-17.217
Références
« Dans un régime matrimonial de communauté, biens appartenant à l’un ou à l’autre des époux et qui ne tombent pas dans la masse des biens communs. À la dissolution de la communauté, chaque époux reprend ses biens propres. »
« Dépenses faites pour la conservation ou l’amélioration ou l’embellissement d’une chose. Elles donnent droit à une certaine indemnisation à condition d’avoir été nécessaires ou utiles.
La loi no 2009-527 du 12 mai 2009, sur la simplification du droit remplace ce terme par celui de “ dépenses” ».
« Indemnité due, lors de la liquidation de la communauté, par l’époux à cette communauté, lorsque, au détriment de celle-ci, le patrimoine personnel s’est enrichi; due par la communauté à l’époux, lorsque les biens propres de celui-ci ont servi à augmenter la masse commune. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Code civil
« Toutes les fois qu'il est pris sur la communauté une somme, soit pour acquitter les dettes ou charges personnelles à l'un des époux, telles que le prix ou partie du prix d'un bien à lui propre ou le rachat des services fonciers, soit pour le recouvrement, la conservation ou l'amélioration de ses biens personnels, et généralement toutes les fois que l'un des deux époux a tiré un profit personnel des biens de la communauté, il en doit la récompense. »
« La récompense est, en général, égale à la plus faible des deux sommes que représentent la dépense faite et le profit subsistant.
Elle ne peut, toutefois, être moindre que la dépense faite quand celle-ci était nécessaire.
Elle ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, le profit est évalué au jour de l'aliénation ; si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué sur ce nouveau bien. »
■ Civ. 1re, 5 nov. 1985, n° 84-12.572.
■ Civ. 1re, 25 mai 1992, n°90-18.931.
■ Civ. 1re, 11 mars 2009, n°07-21.356 ; Bull. civ. I, n°59 ; D. 2009. AJ. 950.
■ Civ. 1re, 6 mai 1997, Bull. civ. I, n°138.
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