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Contrats spéciaux
Action rédhibitoire v. action estimatoire
Mots-clefs : Vente, Vice caché, Option, Action rédhibitoire, Action estimatoire, Résolution, Réduction du prix, Art. 1644 C. civ.
Le choix entre l'action estimatoire et l'action rédhibitoire prévue à l'article 1644 du Code civil appartient à l'acheteur et non au juge qui n'a pas à motiver sa décision sur ce point.
Un litige classique en matière de vente d’immeuble nous offre l’occasion d’un bref rappel sur les effets de la garantie des vices cachés dont est tenu le vendeur à l’égard de l’acquéreur.
En l’espèce, l’acquéreur d’un immeuble à usage d’habitation se plaignait de nuisances acoustiques et d’infiltrations et, étant entendu qu’en l’espèce les conditions de la garantie étaient réunies, il demandait la résolution de la vente. Demande favorablement accueillie par la cour d’appel qui est critiquée par le demandeur au pourvoi, sur ce point précis, au moyen qu’elle n’avait pas motivé sa décision de résoudre la vente et d’exclure, par conséquent, la sanction consistant dans la simple réduction du prix de vente. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi au motif que « le choix entre l’action estimatoire et l’action rédhibitoire prévu à l’article 1644 du Code civil appartient à l’acheteur qui n’a pas à motiver sa décision sur ce point ».
Lorsque les conditions nécessaires à la mise en jeu de la garantie des vices cachés, l’article 1644 du Code civil offre une option à l’acheteur qui peut exercer :
– soit une action rédhibitoire ;
– soit une action estimatoire.
Quand il choisit d’exercer la première action, celle-ci emporte, à l’image d’une action résolutoire dont elle constitue une déclinaison, l’anéantissement de la vente et se traduit donc par la restitution du bien vendu au vendeur et du prix payé à l’acquéreur.
Lorsqu’il choisit d’exercer la seconde branche de l’option légale, l’action provoque une réfaction judiciaire du contrat, via une réduction du prix de vente. Contrairement, donc, à ce qui se produit lorsque l’acquéreur exerce l’action rédhibitoire, la vente est maintenue, mais elle est rééquilibrée.
C’est l’acquéreur qui est, comme le révèle la lettre du texte susvisé, le maître du sort de la vente du bien affecté d’un vice caché. Il peut librement et discrétionnairement exercer son choix, sans avoir à s’en expliquer, sans avoir à motiver ou justifier sa décision. Le juge, quant à lui, est, comme le rappelle notre arrêt, lié par le choix opéré par le titulaire de l’option. Par conséquent, on ne saurait utilement lui reprocher de ne pas avoir motivé sa décision sur ce point, puisqu’il n’en prend aucune et ne fait qu’appliquer la volonté souveraine de l’acquéreur. Par ailleurs, ce dernier n’est pas lié par son choix en cours d’instance, puisque les deux actions ont la même cause. Aussi, pourra-t-il changer son fusil d’épaule en appel, s’il est débouté de son action rédhibitoire en première instance, et opter alors pour l’action estimatoire.
Certains auteurs considèrent que l’option réservée à l’acquéreur devrait être infléchie au regard de la gravité du vice qui devrait constituer un critère en excluant l’action rédhibitoire lorsque le vice est insuffisamment grave pour justifier l’anéantissement rétroactif de la vente. L’argument ne saurait utilement prospérer :
– soit le vice est d’une gravité suffisante pour déclencher la mise en jeu de la garantie, et alors l’option légale doit jouer à plein ;
– soit il ne l’est pas et l’acquéreur ne peut exercer aucune des actions, faute de pouvoir se prévaloir de la garantie légale.
Civ. 3e, 20 oct. 2010, n°09-16.788
Références
« Action en justice par laquelle l’acquéreur d’une chose demande une diminution du prix en raison de vices cachés qui altèrent la valeur de cette chose. »
« Action en justice par laquelle l’acheteur demande la résolution de la vente en raison des vices cachés de la chose. »
« Sanction consistant dans l’effacement rétroactif des obligations nées d’un contrat synallagmatique, lorsque l’une des parties n’exécute pas ses prestations.
Comme la nullité, la résolution a un effet rétroactif, mais, à la différence de la première, elle sanctionne un défaut d’exécution (...).
En cas d’inexécution partielle, les juges du fond apprécient souverainement si cette inexécution a assez d’importance pour entraîner la résolution ou si elle ne sera pas suffisamment réparée par l’allocation de dommages-intérêts.
La résolution est en principe judiciaire. Toutefois, la gravité du comportement d’une partie au contrat peut justifier que l’autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls. »
« Défaut de la chose vendue qui ne se révèle pas à premier examen et qui la rend impropre à l’usage auquel elle est destinée, ou qui diminue tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il l’avait connu. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Code civil
« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. »
« Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie. »
« Dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par experts. »
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