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[ 19 avril 2012 ] Imprimer

Droit administratif général

Albert Camus peut fumer tranquille…

Mots-clefs : Tribunal administratif, Loi Évin, Publicité en faveur du tabac, Santé publique, Affiche, Cigarette, Annulation, Erreur manifeste d’appréciation

La photographie d’Albert Camus avec une cigarette aux lèvres apposée sur le mur d’une médiathèque portant son nom ne saurait constituer par elle-même un acte de propagande ou de publicité, directe ou indirecte en faveur du tabac au sens de la loi Évin.

Un conseiller municipal de la commune de Clapiers dans l’Hérault a saisi le tribunal administratif de Montpellier d’une demande d’annulation de refus implicite du président de la communauté d’agglomération de Montpellier de procéder au remplacement de la photographie d’Albert Camus avec une cigarette aux lèvres par une autre photographie ne le représentant pas en action de consommation tabagique. Cette photographie, de 4 mètres par 3, est apposée sur le mur de la médiathèque de Clapiers baptisée du nom du prix Nobel de littérature et gérée par cette communauté d’agglomération.

Après avoir rappelé les dispositions de la loi Évin applicables au litige (CSP, art. L. 3511-2L. 3511-2-1L. 3511-3L. 3511-4L. 3512-2 et D. 3511-15), les magistrats montpelliérains ont considéré qu’il ne résultait pas de l’instruction que « la vocation de cette affiche est d’encourager délibérément ou de suggérer la consommation tabagique aux jeunes usagers de la médiathèque ou aux tiers passant à proximité ; qu’elle vise seulement à mettre un visage sur le nom de l’écrivain philosophe, sans faire toutefois mention d’une marque de tabac » dès lors, « elle ne saurait constituer par elle-même un acte de propagande ou de publicité, directe ou indirecte, en faveur du tabac ou des produits du tabac au sens des dispositions invoquées de l'article L. 3511-3 du code de la santé publique ». Par ailleurs les juges administratifs ont également constaté une absence d’erreur manifeste d’appréciation dans le refus de remplacement de la photographie litigieuse par le président de la communauté d’agglomération même si le choix d’une autre photographie d’Albert Camus sans cigarette aurait été préférable. La cigarette d’Albert Camus est associée à son image, celle-ci peut être exposée au public de façon durable, son objet n’étant pas de promouvoir le tabac. Enfin, le refus de changement de photographie n’est pas contraire aux objectifs de santé publique bien que la médiathèque accueille essentiellement un jeune public et se situe à proximité d’équipements sportifs et de loisirs et d’une pharmacie.

TA Montpellier, 6 avril 2012, n° 1002975

Références

■ Code de la santé publique

Article L. 3511-2

« Sont interdites la fabrication, la vente, la distribution ou l'offre à titre gratuit des produits destinés à usage oral, à l'exception de ceux qui sont destinés à être fumés ou chiqués, constitués totalement ou partiellement de tabac, sous forme de poudre, de particules fines ou toutes combinaisons de ces formes, notamment ceux qui sont présentés en sachets-portions ou en sachets poreux, ou sous une forme évoquant une denrée comestible.

Sont interdites la vente, la distribution ou l'offre à titre gratuit de paquets de moins de vingt cigarettes et de paquets de plus de vingt qui ne sont pas composés d'un nombre de cigarettes multiple de cinq ainsi que des contenants de moins de trente grammes de tabacs fine coupe destinés à rouler des cigarettes, quel que soit leur conditionnement.

Est interdite la vente de produits du tabac en distributeurs automatiques. 

Sont interdites la vente, la distribution ou l'offre à titre gratuit de cigarettes aromatisées dont la teneur en ingrédients donnant une saveur sucrée ou acidulée dépasse des seuils fixés par décret. »

Article L. 3511-2-1

« Il est interdit de vendre ou d'offrir gratuitement, dans les débits de tabac et tous commerces ou lieux publics, des produits du tabac ou des ingrédients définis au deuxième alinéa de l'article L. 3511-1 à des mineurs de moins de dix-huit ans. »

Article L. 3511-3

« La propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur du tabac, des produits du tabac ou des ingrédients définis au deuxième alinéa de l'article L. 3511-1 ainsi que toute distribution gratuite ou vente d'un produit du tabac à un prix inférieur à celui mentionné à l'article 572 du code général des impôts sont interdites. 

Ces dispositions ne s'appliquent pas aux enseignes des débits de tabac, ni aux affichettes disposées à l'intérieur de ces établissements, non visibles de l'extérieur, à condition que ces enseignes ou ces affichettes soient conformes à des caractéristiques définies par arrêté interministériel.

Elles ne s'appliquent pas non plus : 

1° Aux publications et services de communication en ligne édités par les organisations professionnelles de producteurs, fabricants et distributeurs des produits du tabac, réservés à leurs adhérents, ni aux publications professionnelles spécialisées dont la liste est établie par arrêté ministériel signé par les ministres chargés de la santé et de la communication ; ni aux services de communication en ligne édités à titre professionnel qui ne sont accessibles qu'aux professionnels de la production, de la fabrication et de la distribution des produits du tabac ; 

2° Aux publications imprimées et éditées et aux services de communication en ligne mis à disposition du public par des personnes établies dans un pays n'appartenant pas à l'Union européenne ou à l'Espace économique européen, lorsque ces publications et services de communication en ligne ne sont pas principalement destinés au marché communautaire. 

Toute opération de parrainage est interdite lorsqu'elle a pour objet ou pour effet la propagande ou la publicité directe ou indirecte en faveur du tabac, des produits du tabac ou des ingrédients définis au deuxième alinéa de l'article L. 3511-1. »

Article L. 3511-4

« Est considérée comme propagande ou publicité indirecte la propagande ou la publicité en faveur d'un organisme, d'un service, d'une activité, d'un produit ou d'un article autre que le tabac, un produit du tabac ou un ingrédient défini au deuxième alinéa de l'article L. 3511-1 lorsque, par son graphisme, sa présentation, l'utilisation d'une marque, d'un emblème publicitaire ou un autre signe distinctif, elle rappelle le tabac, un produit du tabac ou un ingrédient défini au deuxième alinéa de l'article L. 3511-1. 

Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables à la propagande ou à la publicité en faveur d'un produit autre que le tabac, un produit du tabac ou un ingrédient défini au deuxième alinéa de l'article L. 3511-1 qui a été mis sur le marché avant le 1er janvier 1990 par une entreprise juridiquement et financièrement distincte de toute entreprise qui fabrique, importe ou commercialise du tabac un produit du tabac ou un ingrédient défini au deuxième alinéa de l'article L. 3511-1. La création d'un lien juridique ou financier entre ces entreprises rend caduque cette dérogation. »

Article L. 3512-2

« Les infractions aux dispositions des articles L. 3511-2, L. 3511-3 et L. 3511-6 sont punies de 100 000 euros d'amende. En cas de propagande ou de publicité interdite, le maximum de l'amende peut être porté à 50 % du montant des dépenses consacrées à l'opération illégale. 

En cas de récidive, le tribunal peut interdire pendant une durée de un à cinq ans la vente des produits qui ont fait l'objet de l'opération illégale. 

Le tribunal ordonne, s'il y a lieu, la suppression, l'enlèvement ou la confiscation de la publicité interdite aux frais des délinquants. 

Le tribunal peut, compte tenu des circonstances de fait, décider que les personnes morales sont en totalité ou en partie solidairement responsables du paiement des amendes et des frais de justice mis à la charge de leurs dirigeants ou de leurs préposés. 

La cessation de la publicité peut être ordonnée soit sur réquisition du ministère public, soit d'office par le juge d'instruction ou le tribunal saisi des poursuites. La mesure ainsi prise est exécutoire nonobstant toutes voies de recours. Mainlevée peut en être donnée par la juridiction qui l'a ordonnée ou qui est saisie du dossier. La mesure cesse d'avoir effet en cas de décision de non-lieu ou de relaxe. 

Les décisions statuant sur les demandes de mainlevée peuvent faire l'objet d'un recours devant la chambre de l'instruction ou devant la cour d'appel selon qu'elles ont été prononcées par un juge d'instruction ou par le tribunal saisi des poursuites. 

La chambre de l'instruction ou la cour d'appel statue dans un délai de dix jours à compter de la réception des pièces. »

Article D. 3511-15

« Une affiche rappelant les dispositions de l'article L. 3511-2-1 est placée à la vue du public dans les établissements des débitants de tabac, des titulaires du statut d'acheteur-revendeur et des revendeurs, mentionnés au premier alinéa de l'article 568 du code général des impôts. 

Le modèle de cette affiche est déterminé par arrêté du ministre chargé des douanes et des droits indirects et du ministre chargé de la santé. »

 

Auteur :C. G.


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