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Droit pénal général
Application de la loi pénale dans l’espace : réciprocité d’incrimination délictuelle
Mots-clefs : Droit pénal spécial, Loi pénale (application dans l’espace), Réciprocité d’incrimination, Transmission diplomatique, Ordre public
Les délits perpétrés par les français à l’étranger sont susceptibles d’être poursuivis uniquement lorsque « les faits sont punis par la législation du pays où ils ont été commis ». Cette règle de la réciprocité des incriminations est d’ordre public.
Le citoyen français qui commet un délit à l’étranger est, en principe, susceptible d’être poursuivi en France, lorsque la loi du pays incrimine également les faits constitutifs d’un délit pour le droit pénal hexagonal (article 113-6 C. pén.).
En l’espèce, un ressortissant français, Grégory M., était incarcéré en France, et purgeait une peine de deux ans d’emprisonnement pour des faits de vols et d’escroquerie en réunion. La police suisse, dans le cadre d’une enquête sur des faits similaires commis en Suisse à la même époque, identifia le suspect comme étant Grégory M. Les policiers helvètes transmirent alors à la justice française les pièces du dossier, afin que le suspect soit jugé en France pour les faits commis en Suisse.
Le procureur décida de poursuivre le délinquant, et la cour d’appel d’Aix-En-Provence, dans un arrêt en date du 7 septembre 2009, condamna ce dernier à deux ans d’emprisonnement pour vols aggravés et escroquerie, en récidive.
La chambre criminelle casse l’arrêt au visa des articles 113-6 et 113-8 du Code pénal. Sur le premier moyen, elle constate que la cour d’appel n’a pas caractérisé la réciprocité d’incrimination exigée par l’article 113-6 C. pén., disposition d’ordre public (Crim. 10 oct. 1988). Ainsi, la Cour de cassation exige des juridictions de jugement qu’elles constatent que « les faits sont punis par la législation du pays où ils ont été perpétrés » (v. même arrêt).
Sur le second moyen, la chambre criminelle juge qu’au surplus, la simple transmission par les services de police suisses en charge de l’enquête au tribunal français ne constitue pas une dénonciation officielle pas l’autorité du pays où les faits incriminés ont été commis. Dès lors, les conditions de la poursuite n’étaient pas réunies en l’espèce.
On voit ici que l’application de la loi pénale dans l’espace, même avec un pays frontalier et partiellement francophone, n’est pas chose aisée. Elle requiert une phase diplomatique de transmission des dossiers entre ministères de la Justice relativement lourde. Il en est de même au sein de l’Union européenne, avec la Convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959. Cette dernière a été interprétée par la chambre criminelle comme n’apportant « aucune dérogation au principe de la dénonciation entre ministères de la Justice » (Crim. 24 nov. 1998).
Crim. 26 mai 2010, n° 09-86.499, F-P+F
Références
« Au sens large, le délit est synonyme d’infraction.
Au sens strict, le délit est une infraction dont l’auteur est puni de peines correctionnelles.
Les peines correctionnelles encourues par les personnes physiques sont l’emprisonnement (10 ans au plus), l’amende (supérieure ou égale à 3 750 euros), le jour-amende, le stage de citoyenneté, le travail d’intérêt général, des peines privatives ou restrictives de droits, des peines complémentaires, et la sanction-réparation. Pour les personnes morales, les peines applicables sont l’amende, dont le taux maximum est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques, certaines peines privatives ou restrictives de droits dans les cas prévus par la loi, et la sanction-réparation. »
« Délit consistant dans le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. »
« Auteur ou complice d’une infraction pénale, qui peut faire l’objet d’une poursuite de ce chef. »
« Cause d’aggravation de la peine résultant pour un délinquant de la commission d’une seconde infraction dans les conditions précisées par la loi, après avoir été condamné définitivement pour une première infraction. La récidive est dite générale ou spéciale selon qu’elle existe pour deux infractions différentes ou seulement pour deux infractions semblables ; elle est dite perpétuelle ou temporaire selon qu’elle existe quel que soit le délai qui sépare les deux infractions, ou seulement si la seconde infraction est commise dans un certain délai qui court à compter de l’expiration de la première peine. »
Source : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Code pénal
« La loi pénale française est applicable à tout crime commis par un Français hors du territoire de la République.
Elle est applicable aux délits commis par des Français hors du territoire de la République si les faits sont punis par la législation du pays où ils ont été commis.
Elle est applicable aux infractions aux dispositions du règlement (CE) n° 561 / 2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 relatif à l'harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, commises dans un autre État membre de l'Union européenne et constatées en France, sous réserve des dispositions de l'article 692 du code de procédure pénale ou de la justification d'une sanction administrative qui a été exécutée ou ne peut plus être mise à exécution.
Il est fait application du présent article lors même que le prévenu aurait acquis la nationalité française postérieurement au fait qui lui est imputé. »
« Dans les cas prévus aux articles 113-6 et 113-7, la poursuite des délits ne peut être exercée qu'à la requête du ministère public. Elle doit être précédée d'une plainte de la victime ou de ses ayants droit ou d'une dénonciation officielle par l'autorité du pays où le fait a été commis. »
■ Convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959.
■ Crim. 10 oct. 1988, Bull. crim. n° 331.
■ Crim. 24 nov. 1998, Bull. crim. n° 312 ; D. 1999 IR 37 ; Dr. pénal 1999. Comm. 79, note Véron.
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