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Droit des régimes matrimoniaux
Apport en société en fraude d’un époux commun en biens
Mots-clefs : Apport en société, Biens communs, Fraude, Action en nullité, Art. 1427 C. civ.
Exclusivité de l’action en nullité de l’article 1427 du Code civil en cas d’apport en société réalisé avec des biens communs sans l’accord du conjoint.
En vertu de l’alinéa 1er de l’article 1832-2 du Code civil, un époux ne peut employer des biens communs pour faire un apport à une société sans que son conjoint en ait été averti et sans qu'il en soit justifié dans l'acte.
En l’espèce, un homme, marié sous le régime de la communauté, a constitué avec une autre femme que son épouse une SCI aux fins d’acquérir un bien immobilier. L’apport en numéraire ayant été réalisé au moyen de biens communs sans le consentement de l’épouse, cette dernière, au cours de l’instance en divorce, a engagé une action afin d’obtenir la nullité dudit apport.
En effet, selon l’article 1427 du Code civil, si un des époux a outrepassé ses pouvoirs, son conjoint, à moins qu'il n'ait ratifié l'acte, peut en demander l'annulation. Cette action en nullité lui est ouverte pendant deux années à partir du jour où il a eu connaissance de l'acte, sans pouvoir jamais être intentée plus de deux ans après la dissolution de la communauté.
Ainsi en appel, pour prononcer de la nullité de l’apport et celle de la société sur le fondement de la fraude, les juges du fond ont retenu que si l’action en nullité de l’article 1427 était prescrite, elle ne se confondait pas avec l’action fondée sur la fraude dont la prescription est trentenaire.
Une série de questions était alors soulevée : en cas de dépassement de pouvoir d’un époux sur les biens communs pour effectuer un apport en société, le juge du fond pouvaient-ils substituer à l’action prescrite (art. 1427 C. civ.) une autre action (actes frauduleux d’un époux dans la gestion des biens communs : art. 1421 C. civ.) ? La fraude de l’époux doit-elle alors être sanctionnée par la nullité ou l’inopposabilité de l’acte ?
La Haute cour casse l’arrêt d’appel aux visas des articles 1421, 1427 et 1832-2 du Code civil et confirme sa jurisprudence antérieure (Civ. 1re, 30 mars 1999 ; Civ. 1re, 4 déc. 2001) en affirmant que « la nullité de l’action régie par l’article 1427 du Code civil est (…) exclusive de l’action en inopposabilité ouverte par l’article 1421 du Code civil pour sanctionner les actes frauduleux, lequel ne trouve à s’appliquer qu’à défaut d’autre sanction ».
Civ. 1re, 23 mars 2011, n°09-66.512
Références
« Biens mis en commun par les associés lors de la constitution d’une société.
Ces apports peuvent se présenter sous plusieurs formes : en numéraire, en nature ou en industrie (c’est-à-dire en travail ou en services). En contrepartie de ses apports, chaque associé reçoit des droits sociaux (parts ou actions). »
« Régime matrimonial en vertu duquel tout ou partie des biens dont disposent les époux forme une masse commune et partagée après la dissolution du régime. Le régime matrimonial légal, c’est-à-dire celui qui est applicable toutes les fois que les époux n’ont pas conclu un contrat de mariage, est la communauté réduite aux acquêts depuis la loi du 13 juillet 1965. »
« Biens qui font partie de la communauté entre époux et qui sont partagés en principe par moitié après la dissolution du régime matrimonial. »
■ Code civil
« Chacun des époux a le pouvoir d'administrer seul les biens communs et d'en disposer, sauf à répondre des fautes qu'il aurait commises dans sa gestion. Les actes accomplis sans fraude par un conjoint sont opposables à l'autre.
L'époux qui exerce une profession séparée a seul le pouvoir d'accomplir les actes d'administration et de disposition nécessaires à celle-ci.
Le tout sous réserve des articles 1422 à 1425. »
« Si l'un des époux a outrepassé ses pouvoirs sur les biens communs, l'autre, à moins qu'il n'ait ratifié l'acte, peut en demander l'annulation.
L'action en nullité est ouverte au conjoint pendant deux années à partir du jour où il a eu connaissance de l'acte, sans pouvoir jamais être intentée plus de deux ans après la dissolution de la communauté. »
« Un époux ne peut, sous la sanction prévue à l'article 1427, employer des biens communs pour faire un apport à une société ou acquérir des parts sociales non négociables sans que son conjoint en ait été averti et sans qu'il en soit justifié dans l'acte.
La qualité d'associé est reconnue à celui des époux qui fait l'apport ou réalise l'acquisition.
La qualité d'associé est également reconnue, pour la moitié des parts souscrites ou acquises, au conjoint qui a notifié à la société son intention d'être personnellement associé. Lorsqu'il notifie son intention lors de l'apport ou de l'acquisition, l'acceptation ou l'agrément des associés vaut pour les deux époux. Si cette notification est postérieure à l'apport ou à l'acquisition, les clauses d'agrément prévues à cet effet par les statuts sont opposables au conjoint ; lors de la délibération sur l'agrément, l'époux associé ne participe pas au vote et ses parts ne sont pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité.
Les dispositions du présent article ne sont applicables que dans les sociétés dont les parts ne sont pas négociables et seulement jusqu'à la dissolution de la communauté. »
■ Civ. 1re, 30 mars 1999, Bull. civ. I, n°111.
■ Civ. 1re, 4 déc. 2001, Bull. civ. I, n°303 ; D. 2002. 2217, note Bonnet ; ibid. 2002. 2442, obs. Nicod.
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