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Procédure pénale
Assistance par un avocat pendant la garde à vue : nouvel arrêt de la Chambre criminelle
Mots-clefs : Garde à vue, Avocat (assistance effective), Nullité (acte support), Culpabilité, Preuve, Réforme en cours, Droit à un procès équitable
Par un arrêt du 4 janvier 2010, la Chambre criminelle refuse de censurer l'arrêt qui a annulé la garde à vue pour défaut d'assistance effective par un avocat, eu égard aux conséquences limitées qu'il a eu sur les éléments de preuve fondant la décision de culpabilité.
Par cet arrêt « I » du 4 janvier 2010, la Cour de cassation apporte une nouvelle pierre à l'édifice pour le moins branlant que constitue, dans l'attente de la réforme à venir (au 31 juill. prochain au plus tard ; le projet de loi est débattu à l'Assemblée nationale à compter du 18 janv.), le droit positif applicable à la garde à vue.
En l'espèce, un individu soupçonné d'avoir attiré des gendarmes dans une embuscade avait été placé en garde à vue le 18 novembre 2009 à 6 h 15 ; il s'était entretenu avec un avocat à 11 h 15, après sa première audition. À l'issue de cette mesure, il avait été renvoyé devant la juridiction de jugement par la voie d'une procédure de comparution immédiate ; le tribunal correctionnel avait renvoyé l'affaire et placé l'intéressé sous contrôle judiciaire. Ce dernier avait alors soulevé, sur le fondement de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, l'irrégularité de sa garde à vue. Par jugement avant-dire droit du 3 février 2010, le tribunal correctionnel avait prononcé la nullité de la garde à vue en raison de l'absence d'assistance effective d'un avocat, ainsi que de l'audition et de la perquisition accomplies pendant la durée de cette mesure, mais validé le procès-verbal par lequel il avait été saisi. La cour d'appel avait confirmé cette annulation mais refusé d'en étendre les effets à l'ensemble de la procédure.
La chambre criminelle valide ce raisonnement. Elle constate, à l'instar des juges du fond, que les enquêteurs disposaient déjà d'éléments à charge (témoignage désignant formellement le prévenu ; identification de sa voix sur l'enregistrement téléphonique de l'alerte ; interception, sur un site de partage de vidéos, d'un film le représentant avec une arme) lorsqu'ils ont procédé à l'interpellation du suspect, et estime qu'il pouvait en être déduit que la garde à vue et les procès-verbaux d'audition et de perquisition annulés n'étaient pas le support nécessaire des poursuites. Dès lors, « si c'est à tort que la cour d'appel a prononcé la nullité de la garde à vue avant l'entrée en vigueur de la loi devant, conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, modifier le régime juridique de la garde à vue ou, en l'absence de cette loi, avant le 1er juillet 2011, l'arrêt n'encourt pas la censure dès lors qu'il a eu pour seule conséquence que les actes annulés n'ont pas constitué des éléments de preuve fondant la décision de culpabilité du prévenu ».
Deux propositions semblent découler de cet énoncé, qui doit être lu dans la perspective des deux arrêts du 19 octobre dernier (Crim. 19 oct. 2010). La garde à vue menée sans assistance effective d'un avocat ne peut être annulée en l'état du droit positif, avant l'entrée en vigueur de la réforme, dans les délais posés par le Conseil constitutionnel (Cons. const., décis. n° 2010-14/22 du 30 juill. 2010). En revanche, dès lors qu'une décision de culpabilité ne saurait reposer sur des seuls éléments recueillis illégalement, les juridictions peuvent (doivent ?) écarter les preuves à charge recueillies pendant, ou grâce à, cette mesure.
Crim. 4 janv. 2011, n° 10-85.520, F-P+B+I
Références
« Mesure par laquelle un officier de police judiciaire retient dans les locaux de la police, pendant une durée légalement déterminée, toute personne qui, pour les nécessités de l'enquête, doit rester à la disposition des services de police.
La durée de la garde à vue dépend de la nature de l'infraction : elle est plus longue en cas de criminalité ou de délinquance organisées (terrorisme, trafic de stupéfiants...). »
« Modalité de saisine du tribunal correctionnel qui remplace, depuis la loi du 10 juin 1983, la saisine directe. Elle concerne uniquement les affaires en état d'être jugées, qu'elles soient flagrantes ou non, en dehors du domaine de la minorité pénale, des infractions politiques, des délits de presse et des infractions expressément soumises à des procédures particulières de poursuite. »
■ Nullité d'actes de procédures
« Au-delà de la distinction traditionnelle entre les nullités textuelles requises lorsque la loi indique que la formalité est prévue à peine de nullité et les nullités substantielles ou virtuelles qui peuvent être retenues lorsque la loi est muette dès lors que l'irrégularité est grave et compromet les droits de la défense, la jurisprudence distingue plus globalement les nullités d'ordre public et les nullités à grief.
D'une manière générale toute juridiction, y compris la cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation pour violation des formes prescrites à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles ne peut prononcer la nullité que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie concernée.
Il faut donc établir la preuve d'un grief autrement dit d'un préjudice. Néanmoins cette solution est exclue pour les nullités d'ordre public (par ex. organisation, composition, compétence des juridictions) ou lorsqu'il y a eu une méconnaissance grave des droits de la défense. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Cons. const. 30 juill. 2010, décis. n° 2010-14/22, Dalloz Actu Etudiant 14 sept. 2010.
■ Crim. 19 oct. 2010, n° 10-82.902.
■ Crim. 19 oct. 2010, n° 10-82.306.
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