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Droit pénal spécial
Atteinte à l'intimité de la vie privée de jurés filmés à leur insu
Mots-clefs : Vie privée (atteinte à l’intimité, image, enregistrement, diffusion), Lieu privé (salle de délibéré), Jurés
Commet une atteinte volontaire à l'intimité de la vie privée, au sens de l'article 226-1, alinéa 2, du Code pénal, celui qui filme, en connaissance de cause, le reflet du déroulement du délibéré, à l'insu de la cour et du jury.
Plusieurs jurés avaient porté plainte à la suite de l'enregistrement et de la diffusion, dans le journal télévisé d'une station régionale, d'une scène filmée dans une salle de la cour d'assises où ils s'étaient retirés pour délibérer. Le journaliste, le directeur de publication et le rédacteur de la chaîne de télévision furent cités devant le tribunal correctionnel des chefs d'atteinte à la vie privée et complicité. Le tribunal renvoya le premier des fins des poursuites et, pour les seconds, constata, après requalification des faits en délit de presse, l'extinction de l'action publique. Sur appels de la partie civile et du ministère public, la cour d'appel infirma le jugement entrepris et déclara la prévention établie, au motif que le journaliste avait profité d'une opportunité technique pour filmer une scène se déroulant à l'intérieur d'un lieu où quiconque ne peut pénétrer sans l'autorisation de l'occupant et que l'un des jurés, ainsi filmé à son insu, avait été vu et reconnu par des téléspectateurs.
Par un arrêt du 16 février 2010, la chambre criminelle estime que « la cour d'appel a justifié sa décision au regard de l'article 226-1, alinéa 2, du Code pénal selon lequel constitue une atteinte volontaire à l'intimité de la vie privée le seul fait de fixer, enregistrer et transmettre, sans le consentement de celle-ci l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé ».
L'article 226-1 du Code pénal punit d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende « le fait, au moyen d'un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la vie privée : 1° En captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ; 2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé (…) ». Cette forme duale d'atteinte à la vie privée découle des deux éléments de l'intimité de la vie que sont l'image d'une personne et ses paroles. Par cet arrêt, la Cour précise donc qu’une salle de délibéré doit être considérée comme un lieu privé (v. l’art. 354 C. pr. pén. qui en réglemente l’accès ; sur la définition du lieu privé, v. Crim. 28 nov. 2006) et qu'il est indifférent, au regard de l'incrimination poursuivie, que le prévenu n'ait pas filmé directement la scène litigieuse mais seulement son reflet sur une vitre extérieure, de sorte que l'image portée à l'extérieur par un phénomène de réverbération ne perd pas son caractère confidentiel. Le journaliste aurait dû recourir au procédé du « floutage » de l’image (v. Civ. 1e, 14 juin 2007)
Crim. 16 févr. 2010, 09-81.492
Références :
■ Crim. 28 nov. 2006, Rev. pénit. 2007, n° 1, p. 184, obs. Saint-Pau.
■ Crim. 27 mai 2009, AJ pénal 2009. 367, obs. Ascenci.
■ Civ. 1ère, 14 juin 2007, D. 2007. Pan. 2771, obs. Marino.
■ Art. 354 du Code de procédure pénale
« Le président fait retirer l'accusé de la salle d'audience. Si l'accusé est libre, il lui enjoint de ne pas quitter le palais de justice pendant la durée du délibéré, en indiquant, le cas échéant, le ou les locaux dans lesquels il doit demeurer, et invite le chef du service d'ordre à veiller au respect de cette injonction. Il invite le chef du service d'ordre à faire garder les issues de la chambre des délibérations, dans laquelle nul ne pourra pénétrer, pour quelque cause que ce soit, sans autorisation du président. Le président déclare l'audience suspendue. »
« Est puni d'un an d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende le fait, au moyen d'un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui :
1° En captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ;
2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé. Lorsque les actes mentionnés au présent article ont été accomplis au vu et au su des intéressés sans qu'ils s'y soient opposés, alors qu'ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-ci est présumé. »
« Juridiction répressive compétente, en premier ressort ou en appel, pour juger les crimes. À raison d’une cour d’assises par département, elle est composée de deux catégories de membres délibérant ensemble : d’une part, trois magistrats professionnels qui forment la cour, d’autre part, des jurés de jugement non professionnels qui forment le jury, au nombre de neuf lorsque la cour d’assises statue en premier ressort et de douze lorsqu’elle statue en appel, tous étant désignés par tirages au sort à partir des listes électorales.
Il existe une formation spéciale de la cour d’assises dans le ressort de chaque cour d’appel, chargée de juger les crimes militaires, les crimes de droit commun commis dans l’exécution de leur service par les militaires lorsqu’il y a un risque de divulgation d’un secret de la défense nationale, certains crimes contre les intérêts fondamentaux de la nation, les actes de terrorisme, et, depuis la réforme du Code pénal, les crimes en matière de trafics de stupéfiants. Elle est composée d’un président, et de six ou huit assesseurs, selon qu’elle statue en premier ressort ou en appel, tous magistrats professionnels, ce qui en fait une cour d’assises sans jurés. »
« Élément propre à certaines juridictions, formé de jurés, simples citoyens, appelés, à titre exceptionnel et temporaire, à rendre la justice pénale. »
Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.
■ V. aussi V. Malabat, Droit pénal spécial, 4e éd., Dalloz, coll. « HyperCours », 2009, nos 588 s.
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