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Droit de la famille
Autorisation judiciaire de vente du logement familial
Mots-clefs : Mariage, Domicile familial, Vente (habilitation judiciaire), Intérêt de la famille
L'attribution, à titre provisoire, de la jouissance du domicile conjugal à l'un des deux époux par le juge du divorce, ne fait pas obstacle à une autorisation judiciaire de vente du logement familial à la demande de l'autre époux en application de l'article 217 du Code civil.
La solution rendue par la Cour de cassation dans cet arrêt du 30 septembre 2009 confirme que l'article 217 du Code civil organise « une mesure ponctuelle, destinée à dénouer une situation de blocage » (P. Murat (dir.), Droit patrimonial de la famille, Dalloz action 2008/2009, n° 116.42). Ce texte permet en effet au juge d'autoriser un époux à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire, si celui-ci est hors d'état de manifester sa volonté ou si son refus n'est pas justifié par l'intérêt de la famille.
En l'espèce, un époux marié sous le régime de la séparation de biens avait été autorisé par le juge à vendre le domicile conjugal qui lui appartenait en propre mais dont la jouissance avait été attribuée à son épouse au titre des mesures provisoires ordonnées par le juge aux affaires familiales.
Saisie du pourvoi formé par cette dernière, la première chambre civile, opérant une substitution de motif de pur droit (art. 620 et 1015 C. pr. civ.), décide que « l'attribution, à titre provisoire, de la jouissance du domicile conjugal à l'un des époux par le juge du divorce ne fait pas obstacle à une autorisation judiciaire de vente du logement familial à la demande de l'autre époux en application de l'article 217 du code civil ». La cour d'appel ayant procédé à « une appréciation d'ensemble de l'intérêt familial », le pourvoi est rejeté.
Pour contourner le veto du conjoint, ce n'est pas la propriété du bien mais l'appréciation de l'intérêt de la famille qui prévaut. On remarquera que la Cour de cassation ne parle plus de conformité aux intérêts de la famille, au pluriel (Civ. 1re, 22 nov. 2005) mais, plus simplement, d'« appréciation d'ensemble de l'intérêt familial » (ce qui semble exclure l'hypothèse — soulevée en doctrine — d'intérêts pluraux).
À lire l'article 217 du Code à la lettre, il ne s'agit pas tant de savoir si l'acte projeté est conforme à l'intérêt de la famille que de déterminer si le refus de l'autre conjoint est justifié ou non par cet intérêt. En l'espèce, les juges du fond avaient relevé que le budget de l'époux, seul membre du couple à exercer une activité professionnelle rémunérée, présentait un déficit de nature à altérer sérieusement le budget familial et que le paiement de dettes du couple l'avait déjà contraint à vendre des avoirs propres ; l'opposition de l'épouse n'était, pour sa part, nullement justifiée par l'intérêt familial. La Cour indique donc que « la vente projetée en vue de ne pas aggraver un déficit et de parvenir à une gestion de trésorerie plus saine apparaissait conforme à l'intérêt de la famille ».
Civ. 1re, 30 septembre 2009
Références
■ Article 217 du Code civil
« Un époux peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire, si celui-ci est hors d'état de manifester sa volonté ou si son refus n'est pas justifié par l'intérêt de la famille.
L'acte passé dans les conditions fixées par l'autorisation de justice est opposable à l'époux dont le concours ou le consentement a fait défaut, sans qu'il en résulte à sa charge aucune obligation personnelle. »
■ Substitution de motif de pur droit
« La Cour de cassation a la faculté pour justifier une décision attaquée devant elle, de substituer à un motif erroné un motif de pur droit. Mais ce motif substitué doit avoir été implicitement invoqué, en raison de la manière dont les prétentions des parties ont été exposées en fait et en droit. »
Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.
■ Article 620 du Code civil
« La Cour de cassation peut rejeter le pourvoi en substituant un motif de pur droit à un motif erroné ; elle le peut également en faisant abstraction d'un motif de droit erroné mais surabondant.
Elle peut, sauf disposition contraire, casser la décision attaquée en relevant d'office un moyen de pur droit. »
■ Article 1015 du Code de procédure civile
« Le président de la formation doit aviser les parties des moyens susceptibles d'être relevés d'office et les inviter à présenter leurs observations dans le délai qu'il fixe. Il en est de même lorsqu'il envisage de rejeter un moyen par substitution d'un motif de pur droit relevé d'office à un motif erroné. »
■ Civ. 1re, 22 nov. 2005, D. 2006. Pan. 1414, spéc. 1421, obs. Lemouland et Vigneau ; JCP 2006. I. 141, n° 5, obs. Wiederkehr ; Dr. fam. 2006, com. n° 21, note Larribau-Terneyre.
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