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Droit commercial et des affaires
Bail commercial, nullité d’un congé et indemnité d’éviction
La nullité d’un congé non ou insuffisamment motivé ne prive pas le droit du preneur à l’obtention d’une indemnité d’éviction.
La Cour de cassation dans un arrêt rendu le 28 juin 2018 a rappelé qu’une indemnité d’éviction pouvait être consentie lorsque la nullité relative d’un congé donné par une SCI, propriétaire d’un local commercial, n’est pas soulevée par le preneur.
En l’espèce, une SCI propriétaire d’un local à usage commercial l’avait donné à bail à un locataire. Le bailleur a délivré au locataire un congé avec refus de renouvellement et sans offre d’une indemnité d’éviction, en citant l’article L. 145-17 du Code de commerce relatif aux congés donnés pour motifs graves et légitimes.
Le preneur assigna donc le bailleur en annulation du congé et paiement d’une indemnité d’éviction. Les juges du fond condamnèrent le bailleur au paiement de cette indemnité. La cour d’appel de Colmar confirma cette décision dans un arrêt rendu le 29 mars 2017, en relevant une incertitude quant aux motifs de ce congé ce qui justifiait son annulation sans priver le locataire de son droit à une indemnité d’éviction.
Le bailleur forma alors un pourvoi en cassation en invoquant la violation des articles L. 145-9, L. 145-14 et L. 145-17 du Code de commerce. En effet, il soutint que « la nullité d’un congé entraîne sa disparition rétroactive et laisse subsister le bail dont l’exécution se poursuit jusqu’à ce qu’un nouveau congé soit donné ». Il ajouta que la cour d’appel avait privé sa décision de base légale au regard des articles L. 145-9, L. 145-14 et L. 145-17 du Code de commerce car elle n’avait pas cherché à constater si le locataire avait quitté les lieux et que par conséquent le bail ne pouvait donc plus recevoir exécution.
La Cour de cassation rejeta le pourvoi formé contre l’arrêt d’appel. Elle rappela « qu’un congé délivré sans motif ou pour motifs équivoques par le bailleur produit néanmoins ses effets et met fin au bail commercial, dès lors que le bailleur est en toujours en droit de refuser le renouvellement du bail à la condition de payer une indemnité d’éviction » (V. déjà Civ. 3e, 1er févr. 1995, n° 93-14.808; Civ. 3e, 28 oct. 2009, n° 07-18.520 et 08-16.135). Mais surtout, elle affirma que la nullité, prévue par l’article L. 145-9 du Code de commerce pour ce type de congé, est une nullité relative ; en d’autres termes, une nullité qui ne peut être soulevée que par le preneur. Dès lors deux options s’offrent à ce dernier : soulever le cas de nullité et obtenir ainsi la poursuite du bail ou renoncer à la nullité et obtenir une indemnité d’éviction. Dans cette dernière hypothèse, le preneur est autorisé à se maintenir dans les lieux en attendant le paiement de ladite indemnité (C. com., art. L. 145-28). On comprend ainsi que le maintien ou non du preneur dans les lieux soit sans incidence sur les effets du congé irrégulier : son maintien peut en effet signifier soit la poursuite du bail soit l’attente du paiement de l’indemnité d’éviction.
On rappellera enfin que seul un motif grave et légitime, apprécié par la Cour de cassation (Pour des exemples de cette appréciation voir : Civ. 3e, 8 févr. 2006, n° 04-17.898), permet au bailleur de refuser le renouvellement du bail sans avoir à payer d’indemnité d’éviction.
Civ. 3e, 28 juin 2018, n° 17-18.756
Références
■ Civ. 3e, 1er févr. 1995, n° 93-14.808 P.
■ Civ. 3e, 28 oct. 2009, n° 07-18.520 et 08-16.135 P.
■ Civ. 3e, 8 févr. 2006, n° 04-17.898 P : D. 2006. 653, obs. Y. Rouquet ; ibid. 2007. 1827, obs. L. Rozès ; AJDI 2006. 566, obs. M.-P. Dumont.
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