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[ 2 juin 2010 ] Imprimer

Procédure civile

Caractérisation du déni de justice

Mots-clefs : Article 4 du Code civil, Preuve, Litige (règlement du-), Déni de justice

L’article 4 du Code civil oblige le juge à trancher le litige qui lui est soumis, même en l’absence d’éléments de preuve relatifs à ce litige.

Le 4 mai 2010, la chambre commerciale de la Cour de cassation a rendu un arrêt que dont nous limiterons notre analyse à la première branche du deuxième moyen, qui vise l’article 4 du Code civil, article qui définit le « déni de justice » comme étant le refus « de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi ».

Dans cette affaire, le requérant prétendait que la SCI dans laquelle il était auparavant associé refusait de lui verser les dividendes auxquels il avait droit. La cour d’appel d’Aix-en-Provence avait rejeté ses demandes en réparation du préjudice moral, en considérant « qu’aucun élément ne permettait en l’état de conclure que la SCI refusait de [le] payer ».

Or, l’article 4 du Code civil interdit au juge de refuser de statuer sur un litige. La Cour de cassation a plusieurs fois rappelé aux juges du fond que l’absence de preuves ne constituait pas une raison suffisante pour rejeter les demandes des justiciables (v. Civ. 2e, 28 juin 2006). Dans une telle situation, la cour avait jugé qu’il « appartenait [au tribunal] d’ordonner toute mesure d’instruction nécessaire pour déterminer le montant [de la demande] ».

Dans l’arrêt rendu le 4 mai, la Cour de cassation décide que « le juge doit trancher le litige qui lui est soumis sans en différer l’examen au motif qu’il lui manquerait des éléments de preuve ». Elle reprend les termes d’un arrêt de 1993, qui posait le principe selon lequel « le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l’insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties » (v. Civ. 2e, 21 janv. 1993).

L’article 9 du Code de procédure civile oblige quant à lui les parties à un litige à prouver leurs prétentions. Cependant,  face aux  insuffisances des parties, le juge ne semble plus devoir « exercer tous les pouvoirs qui sont les siens avant de rejeter pour défaut de preuve la demande dont il a été saisi ». Il devra simplement trancher le litige, en se contentant des éléments de preuve disponibles.

Com. 4 mai 2010, n° 08-20.693, FS-P+B

Références

■ Moyens

« Les moyens sont le soutien nécessaire de la demande et de la défense. Ce sont eux qui forment le fondement de la cause. À l’appui de leurs prétentions, les parties font valoir des moyens de fait et de droit, dont les divisions sont appelées des “branches”.

Un moyen nouveau peut être présenté à tout moment en première instance ou en appel, mais non pour la première fois en cassation. Seuls peuvent être invoqués à ce stade des arguments nouveaux. Il n’en va autrement que lorsqu’il s’agit d’un moyen de pur droit ou d’un moyen né de la décision attaquée. Un moyen d’ordre public peut même être soulevé d’office par le juge à toute hauteur de la procédure, y compris au stade du recours en cassation. »

■ Déni de justice

« Selon la loi, « il y a déni de justice lorsque les juges refusent de répondre aux requêtes ou négligent de juger les affaires en état et en tour d’être jugées ». Le déni de justice est non seulement une cause de responsabilité civile, mais aussi un délit pénal exposant son auteur à l’interdiction d’exercer ses fonctions de cinq à vingt ans.

Dans un sens plus moderne et extensif, le déni de justice s’entend du manquement de l’État à son devoir de protection juridictionnelle, par exemple un délai anormal d’audiencement. »

Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.

■ Article 4 du Code civil

« Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice. »

■ Article 9 du Code de procédure civile

« Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »

■ Civ. 2e, 28 juin 2006Bull. civ. II n° 174, RTD civ. 2006. 821, obs. Perrot.

■ Civ. 2e, 21 janv. 1993, Bull. civ. II, n° 28.

 

Auteur :B. H.


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