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[ 16 juin 2014 ] Imprimer

Droit des assurances

Catastrophe naturelle : indemnisation de l’acquéreur par l’assureur du vendeur

Mots-clefs : Assurance, Sinistre, Cession, Catastrophe naturelle, Garantie

Sauf clause contraire, les acquéreurs d’un bien immobilier peuvent bénéficier de l’indemnité d'assurance versée au titre d’un sinistre lié à une période de sécheresse par l’assureur des vendeurs garantissant les risques de catastrophe naturelle, alors même qu’ils n’étaient pas propriétaires à la date du dommage.

À la suite d’une période de sécheresse, les propriétaires d’une maison d’habitation constatent en 2005, l’apparition de lézardes et de fissures sur leurs biens, et le signalent au maire. En 2007, ils vendent leur bien immobilier. En 2008, un arrêté reconnaît l’état de catastrophe naturelle pour la période de sécheresse. Les nouveaux propriétaires demandent alors à l’assureur des vendeurs la prise en charge des travaux de reprise sur la maison, au titre de l’article L. 121-10 et L. 125-1 du Code des assurances.

L’article L. 121-10 du Code des assurances prévoit la continuité de plein droit du contrat d’assurance au profit de l’acquéreur, en cas de décès ou d’aliénation de la chose assurée, sous la condition d’exécution de toutes les obligations dont l’assuré initial était tenu envers l’assureur.

Cet arrêt soulève, à nouveau, une question, qui faisait l’objet d’un conflit jurisprudentiel : l’acquéreur d’un immeuble a-t-il la qualité pour agir en paiement des indemnités d’assurance contre l’assureur des vendeurs garantissant les risques de catastrophe naturelle, alors même qu’il n’est pas encore propriétaire au moment des faits ?

En effet, par un arrêt du 18 juillet 2000 (Civ. 1re, 18 juill. 2000) reprenant une jurisprudence antérieure (Civ. 1re, 20 nov. 1990 ; Civ. 1re, 10 juin 1997) la première chambre de la Cour de cassation répondait clairement par la négative, estimant que « n'ayant pas été propriétaire de l'immeuble au moment du dommage, cette dernière ne pouvait prétendre au bénéfice de la garantie, même si l'arrêté interministériel ayant constaté l'état de catastrophe naturelle n'avait été pris que postérieurement ». La qualité de propriétaire au moment des faits et au moment de l’indemnisation était donc nécessaire.

Toutefois, la deuxième chambre civile, soutenant une autre interprétation de l’article L. 121-10 du Code des assurances, estima que « l'assureur garantissant les risques de catastrophe naturelle au moment du sinistre survenu avant la vente de l'immeuble, pendant la période visée par l'arrêté constatant cette catastrophe naturelle, était tenu d'accorder sa garantie aux acquéreurs de ce bien, en l'absence de résiliation du contrat d'assurance » (Civ. 2e, 4 nov. 2010).

Dans l’affaire rapportée, la cour d’appel avait débouté les acquéreurs, conditionnant le bénéfice de l’indemnité d’assurance à la qualité de propriétaire au moment du sinistre. L’arrêt est cassé par les juges de la troisième chambre civile qui confirment la position retenue par la deuxième chambre : « sauf clause contraire, l'acquéreur d'un immeuble a qualité à agir en paiement des indemnités d'assurance contre l'assureur des vendeurs garantissant les risques de catastrophe naturelle, même pour les dommages nés antérieurement à la vente ».

Civ. 3e, 7 mai 2014, n° 13-16.400

Références

 Civ. 1re, 20 nov. 1990, n° 89-12.534.

■ Civ. 1re, 10 juin 1997, n° 95-15.523 ; RCA 1997, n° 314, note Courtieu.

 Civ. 1re, 18 juill. 2000, n° 98-12.272 ; RCA 2000, n° 344

■ Civ. 2e, 4 nov. 2010, n° 09-71.677 ; RGDA 2011. 202, note Abravanel-Jolly.

■ Code des assurances

Article L. 121-10

« En cas de décès de l'assuré ou d'aliénation de la chose assurée, l'assurance continue de plein droit au profit de l'héritier ou de l'acquéreur, à charge par celui-ci d'exécuter toutes les obligations dont l'assuré était tenu vis-à-vis de l'assureur en vertu du contrat.

Il est loisible, toutefois, soit à l'assureur, soit à l'héritier ou à l'acquéreur de résilier le contrat. L'assureur peut résilier le contrat dans un délai de trois mois à partir du jour où l'attributaire définitif des objets assurés a demandé le transfert de la police à son nom.

En cas d'aliénation de la chose assurée, celui qui aliène reste tenu vis-à-vis de l'assureur au paiement des primes échues, mais il est libéré, même comme garant des primes à échoir, à partir du moment où il a informé l'assureur de l'aliénation par lettre recommandée.

Lorsqu'il y a plusieurs héritiers ou plusieurs acquéreurs, si l'assurance continue, ils sont tenus solidairement du paiement des primes.

Il ne peut être prévu le paiement d'une indemnité à l'assureur dans les cas de résiliation susmentionnés.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables au cas d'aliénation d'un véhicule terrestre à moteur. »

Article L. 125-1

« Les contrats d'assurance, souscrits par toute personne physique ou morale autre que l'État et garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles, dont ceux des affaissements de terrain dus à des cavités souterraines et à des marnières sur les biens faisant l'objet de tels contrats.

En outre, si l'assuré est couvert contre les pertes d'exploitation, cette garantie est étendue aux effets des catastrophes naturelles, dans les conditions prévues au contrat correspondant.

Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs  non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises.

L'état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s'est située la catastrophe ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci couverts par la garantie visée au premier alinéa du présent article. Cet arrêté précise, pour chaque commune ayant demandé la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, la décision des ministres. Cette décision est ensuite notifiée à chaque commune concernée par le représentant de l'État dans le département, assortie d'une motivation. L'arrêté doit être publié au Journal officiel dans un délai de trois mois à compter du dépôt des demandes à la préfecture. De manière exceptionnelle, si la durée des enquêtes diligentées par le représentant de l'État dans le département est supérieure à deux mois, l'arrêté est publié au plus tard deux mois après la réception du dossier par le ministre chargé de la sécurité civile.

Aucune demande communale de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ne peut donner lieu à une décision favorable de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle par arrêté interministériel lorsqu'elle intervient dix-huit mois après le début de l'événement naturel qui y donne naissance. Ce délai s'applique aux événements naturels ayant débuté après le 1er janvier 2007. Pour les événements naturels survenus avant le 1er janvier 2007, les demandes communales de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle doivent être déposées à la préfecture dont dépend la commune avant le 30 juin 2008.

Les cavités souterraines considérées peuvent être naturelles ou d'origine humaine. Dans ce dernier cas, sont exclus de l'application du présent chapitre les dommages résultant de l'exploitation passée ou en cours d'une mine. »

 

Auteur :M. R.


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