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[ 22 janvier 2019 ] Imprimer

Droit de l'entreprise en difficulté

Cautionnement et procédure collective : une collection de précisions

Par sa décision du 21 novembre 2018, la chambre commerciale de la Cour de cassation apporte de nombreux éclaircissements permettant d’apprécier l’engagement de la caution personne physique.

En l’espèce, une personne physique par un acte du 3 avril 2009 s’était rendue caution, à concurrence d’un certain montant, de tous les engagements d’une société envers une banque. Postérieurement, par un nouvel acte du 20 juillet 2011, la même personne physique s’est à nouveau rendue caution d’un prêt consenti par la banque à la société. Cette dernière ayant été placée en liquidation judiciaire, la banque assigna la caution en exécution de ses engagements.     

La cour d’appel de Poitiers, dans un arrêt rendu le 26 janvier 2016, annule le cautionnement souscrit le 3 avril 2009, mais pas celui du 20 juillet 2011. La caution décide donc de former un pourvoi en cassation, composé de quatre moyens. Le premier moyen, divisé en trois branches, se fonde sur l’ancien article L. 341-2 du Code de la consommation (nouvel art. L. 331-1) pour obtenir l’annulation de l’acte signé le 20 juillet 2011 : la signature aurait été apposée en amont et non en aval de la mention manuscrite et le débiteur principal de la dette garantie ne serait pas correctement identifié, empêchant ainsi la caution de connaître le sens et la portée de son engagement. Le deuxième moyen soutient l’existence d’une disproportion du cautionnement car ce dernier doit être apprécié en considération de tous les engagements souscrits par la caution envers le créancier selon l’ancien article L. 341-4 du Code de la consommation (nouvel art. L. 332-1). Le troisième moyen envisage le non-respect des formalités prévues par l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier, lequel impose une obligation annuelle d’information à la charge du créancier. Enfin, le quatrième moyen utilise l’article L. 650-1 du Code de commerce : les concours excessifs consentis par la banque à son débiteur auraient dû permettre de retenir sa responsabilité, même en l’absence de fraude.   

La Cour de cassation casse et annule pour manque de base légale l’arrêt rendu par la cour d’appel de Poitiers, mais seulement en ce qui concerne l’obligation d’information annuelle. Les juges du fond s’étaient en effet contentés de mentionner l’existence de courriers d’information sans justifier que ceux-ci contenaient les précisions informatives imposées par l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier. La chambre commerciale rejette donc les moyens fondés les irrégularités de forme de l’engagement de caution, sa disproportion et la responsabilité pour soutien abusif. 

Concernant la mention manuscrite imposée par l’ancien article L. 341-2 du Code de la consommation, la Cour de cassation considère que ce vice ne peut être soulevé que par la caution et non d’office par les juges du fond. Or, la caution n’avait pas soutenu devant la cour d’appel que la signature précédait la mention manuscrite. 

S’agissant de la disproportion du cautionnement, la Cour de cassation précise que l’acte du 3 avril 2009 ayant été annulé, ce dernier ne pouvait être pris en considération pour apprécier ladite disproportion : « si la disproportion doit être appréciée en prenant en considération l’endettement global de la caution, y compris celui résultant d’autres engagements de caution, il ne peut être tenu compte d’un cautionnement antérieur que le juge déclare nul, et qui est ainsi anéanti rétroactivement » (il faut ajouter que la Cour de cassation impose aux juges de prendre en considération l’endettement global de la caution dont le créancier avait ou pouvait avoir connaissance, y compris l’endettement résultant d’autres engagements bancaires antérieurs de la caution. V. : Com. 22 mai 2013, n° 11-24.812).

S’agissant enfin de la responsabilité de la banque, la Cour de cassation rappelle que « lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis qu'en cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou de disproportion des garanties prises, et si les concours consentis sont en eux-mêmes fautifs ». 

Com. 21 nov. 2018, n° 16-25.128 

Références

■ Fiche d’orientation Dalloz : Cautionnement 

■ Com. 22 mai 2013, n° 11-24.812 P : Dalloz actualité, 31 mai 2013, obs. V. Avena-Robardet ; D. 2013. 1340, obs. V. Avena-Robardet ; ibid. 1706, obs. P. Crocq ; ibid. 2551, chron. A.-C. Le Bras, H. Guillou, F. Arbellot et J. Lecaroz ; RTD civ. 2013. 607, obs. H. Barbier.

 

Auteur :Fernanda Sabrinni

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