Actualité > À la une
À la une
Droit des régimes matrimoniaux
Changement de régime matrimonial en fraude aux droits successoraux d’un enfant dissimulé
Mots-clefs : Changement de régimes, Intérêt de la famille, Enfant, Dissimulation, Droits successoraux, Intention frauduleuse (non)
La dissimulation de l’enfant de l’un des époux né hors mariage n’entraîne pas la nullité de la convention de changement de régime matrimonial dès lors qu’elle n’a pas pour finalité de faire échec aux droits successoraux de l’enfant.
Mariés depuis 41 ans sous le régime de communauté de meubles et acquêts, des époux ont, par convention notariée, puis homologuée par un jugement, adopté le régime de la séparation de biens. Le couple décédé, la fille anciennement dite « naturelle » de l’époux assigna les enfants héritiers en nullité de la convention de changement de régime matrimonial et en réouverture des opérations de liquidation et de partage de la communauté en arguant que son existence avait été dissimulée lors de la procédure de changement entraînant une fraude à ses droits successoraux. En outre, la fille soulignait le fait que le changement avait été motivé par l’introduction d’une instance en recherche de paternité.
La première chambre rejette le pourvoi au motif que la dissimulation n’a pas été dictée par une intention frauduleuse, le choix de recourir à un régime séparatiste n’avait eu que pour effet « d’identifier et séparer les patrimoines respectifs des deux époux et délimiter les masses successorales futures ». Il n’apparaissait donc pas que l’épouse avait été favorisée en vue d’amoindrir le patrimoine du mari et par voie de conséquence les droits successoraux futurs de l’enfant dont l’existence avait été dissimulée.
Rappelons que l’article 1397 du Code civil précise que le changement de régime matrimonial doit s’opérer « dans l’intérêt de la famille », sous-entendu tous ses membres : conjoint et enfants non issus de l’union. L’appréciation de cet intérêt relève du juge qui estime souverainement si une fraude a été commise En l’espèce, un recours à un régime de communauté universelle aurait peut-être changé la solution retenue par la Cour… à la condition toutefois, comme l’a jugé la première chambre civile dans un arrêt en date du 14 juin 2005, que soit rapportée la preuve d'une fraude aux droits de l’enfant et que ce dernier justifie d'un préjudice que lui causerait l'homologation de la convention, alors qu'en outre il bénéficie de l'action en retranchement de l’article 1527 alinéa 2 du Code civil (sur une nullité refusée : Civ. 1re, 14 juin 2005).
Civ. 1re, 17 févr. 2010, n°08-14.441
Références
■ Code civil
« Après deux années d'application du régime matrimonial, les époux peuvent convenir, dans l'intérêt de la famille, de le modifier, ou même d'en changer entièrement, par un acte notarié. A peine de nullité, l'acte notarié contient la liquidation du régime matrimonial modifié si elle est nécessaire.
Les personnes qui avaient été parties dans le contrat modifié et les enfants majeurs de chaque époux sont informés personnellement de la modification envisagée. Chacun d'eux peut s'opposer à la modification dans le délai de trois mois.
Les créanciers sont informés de la modification envisagée par la publication d'un avis dans un journal habilité à recevoir les annonces légales dans l'arrondissement ou le département du domicile des époux. Chacun d'eux peut s'opposer à la modification dans les trois mois suivant la publication.
En cas d'opposition, l'acte notarié est soumis à l'homologation du tribunal du domicile des époux. La demande et la décision d'homologation sont publiées dans les conditions et sous les sanctions prévues au code de procédure civile.
Lorsque l'un ou l'autre des époux a des enfants mineurs, l'acte notarié est obligatoirement soumis à l'homologation du tribunal du domicile des époux.
Le changement a effet entre les parties à la date de l'acte ou du jugement qui le prévoit et, à l'égard des tiers, trois mois après que mention en a été portée en marge de l'acte de mariage. Toutefois, en l'absence même de cette mention, le changement n'en est pas moins opposable aux tiers si, dans les actes passés avec eux, les époux ont déclaré avoir modifié leur régime matrimonial.
Lorsque l'un ou l'autre des époux fait l'objet d'une mesure de protection juridique dans les conditions prévues au titre XI du livre Ier, le changement ou la modification du régime matrimonial est soumis à l'autorisation préalable du juge des tutelles ou du conseil de famille s'il a été constitué.
Il est fait mention de la modification sur la minute du contrat de mariage modifié.
Les créanciers non opposants, s'il a été fait fraude à leurs droits, peuvent attaquer le changement de régime matrimonial dans les conditions de l'article 1167.
Les modalités d'application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d'État. »
« Les avantages que l'un ou l'autre des époux peut retirer des clauses d'une communauté conventionnelle, ainsi que ceux qui peuvent résulter de la confusion du mobilier ou des dettes, ne sont point regardés comme des donations.
Néanmoins, au cas où il y aurait des enfants qui ne seraient pas issus des deux époux, toute convention qui aurait pour conséquence de donner à l'un des époux au-delà de la portion réglée par l'article 1094-1, au titre " Des donations entre vifs et des testaments ", sera sans effet pour tout l'excédent ; mais les simples bénéfices résultant des travaux communs et des économies faites sur les revenus respectifs quoique inégaux, des deux époux, ne sont pas considérés comme un avantage fait au préjudice des enfants d'un autre lit.
Toutefois, ces derniers peuvent, dans les formes prévues aux articles 929 à 930-1, renoncer à demander la réduction de l'avantage matrimonial excessif avant le décès de l'époux survivant. Dans ce cas, ils bénéficient de plein droit du privilège sur les meubles prévu au 3° de l'article 2374 et peuvent demander, nonobstant toute stipulation contraire, qu'il soit dressé inventaire des meubles ainsi qu'état des immeubles. »
■ Civ. 1re, 14 juin 2005, RTD civ. 2005. 818, obs. Vareille.
Autres À la une
-
Droit des biens
[ 22 novembre 2024 ]
Acte de notoriété acquisitive : office du juge quant à l’appréciation de la preuve de l’usucapion
-
Droit des obligations
[ 21 novembre 2024 ]
Appréciation de la date de connaissance d’un vice caché dans une chaîne de contrats
-
Libertés fondamentales - droits de l'homme
[ 20 novembre 2024 ]
Chuuuuuut ! Droit de se taire pour les fonctionnaires poursuivis disciplinairement
-
Droit de la responsabilité civile
[ 19 novembre 2024 ]
Recours en contribution à la dette : recherche d’une faute de conduite de l’élève conducteur
-
Droit de la responsabilité civile
[ 18 novembre 2024 ]
L’autonomie du préjudice extrapatrimonial exceptionnel d’un proche d’une victime handicapée
- >> Toutes les actualités À la une