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Droit des obligations
Charge de la preuve et absence de cause de l’obligation
Mots-clefs : Prêt, Dette, Cause de l’obligation, Fausse cause, Licéité de la cause, Dette, Charge de la preuve
L’obligation qui repose sur une fausse cause est nulle, sauf si le demandeur prouve l’existence d’une autre cause licite.
Un couple vit en concubinage depuis plusieurs années, le concubin dépendant financièrement de sa concubine. Par acte sous seing privé, l’homme s’engage à rembourser à sa concubine 25 000 euros, qu’il déclare avoir reçu à titre de prêt. Toutefois, il ne s’exécute pas et la femme réclame en justice le paiement de la dette.
Devant les juges du fond, elle reconnaît toutefois que la somme concernée ne correspond pas à un prêt accordé par elle mais à des détournements réalisés par le concubin, qui avait utilisé à son insu son chéquier et sa carte bancaire pour ses besoins personnels. Les juges, qui constatent la fausseté de la cause de l’obligation, lui demandent alors d’apporter la preuve que la reconnaissance de dette vise en fait à rembourser les détournements réalisés par le concubin.
L’article 1131 du Code civil fait de la cause une condition de l’existence de l’obligation contractuelle. Et, c’est en principe au demandeur de prouver l’existence d’une obligation (art. 1315 C. civ.), bien qu’une présomption d’existence de la cause de l’obligation soit posée par l’article 1132 du Code civil. Cependant, lorsque le défendeur excipe du défaut ou de l’illicéité de la cause, la charge de la preuve est logiquement renversée à son encontre (Civ. 1re, 19 juin 2008).
Malheureusement, en l’espèce, la requérante avait admis devant les juges que la cause stipulée dans la reconnaissance de dette n’était pas valable, ce qui ôtait au défendeur (son concubin) le besoin de le faire. Ainsi « lorsque la cause de l’obligation est démontrée fausse il incombe au bénéficiaire de prouver que sa créance repose sur une autre cause licite ».
En l’absence de preuves en ce sens, car la femme n’avait pas pu rapporter la preuve des détournements réalisés par le concubin au cours de leur vie commune, les juges du fond ont à bon droit rejeté la demande de la requérante, en estimant que l’obligation était dépourvue de cause, ce qui entraîne sa nullité en vertu de l’article 1131 du Code civil.
Civ. 1re, 12 mai 2011, n° 10-11.618
Références
Article 1131
« L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet. »
Article 1132
« La convention n'est pas moins valable, quoique la cause n'en soit pas exprimée. »
Article 1315
« Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. »
« Dans un sens large, établissement de la réalité d’un fait ou de l’existence d’un acte juridique. Dans un sens plus restreint, procédé utilisé à cette fin (écrit, témoignage…).
Lorsque les moyens de preuve sont préalablement déterminés et imposés par la loi, la preuve est dite légale. Dans le cas contraire, elle est dite libre ou morale. Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »
« Existence de la cause. Dans le droit des obligations, la cause de l’obligation du débiteur est le but immédiat et direct qui le conduit à s’engager. On oppose à la cause, ainsi définie, le motif qui est un mobile personnel, subjectif et lointain. La cause est, au contraire, objective ; nécessaire à la validité des actes juridiques, elle est toujours la même pour chaque catégorie d’actes (par ex. : dans un contrat synallagmatique, la cause de l’obligation de l’une des parties réside dans l’objet de l’obligation de l’autre ; dans un acte à titre gratuit, la cause est l’intention libérale).
Licéité de la cause. La notion de cause, lorsqu’elle est envisagée sous l’aspect de sa licéité ou de sa légalité, recouvre les motifs personnels qui conduisent une partie à contracter. Lorsque le motif est illicite (contraire à la morale, à l’ordre public), il entraîne la nullité de l’acte à la double condition d’être la cause impulsive et déterminante de l’opération et d’avoir été connu de l’autre partie. »
Source : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Civ. 1re, 19 juin 2008 ; D. 2008 AJ 182, obs. Delpech.
■ Sur les mêmes sujets, V. Fiches de révisions Dalloz, La cause de l'obligation, et Les principes directeurs de l’instance : les rôles respectifs des parties et du juge.
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