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Droit des obligations
Chronique de droit privé
Mots-clefs : Consensualisme, Liberté contractuelle, Mandat, Liberté de forme, Accident de la circulation, Indemnisation, Perte de chance
Un rapide coup d’œil sur quelques arrêts de la Cour de cassation qui constituent l’occasion de revenir sur de grands principes (consensualisme), des évolutions importantes (indemnisation d’un accident de la circulation) et des notions qui ne le sont pas moins (perte d’une chance).
Certains arrêts n’ont a priori qu’un relatif intérêt, ne serait-ce que parce qu’ils ne présentent pas l’attrait de la nouveauté et qu’ils s’inscrivent dans une jurisprudence constante et dépourvue d’originalité. Pourtant, ils revêtent parfois un intérêt pédagogique, pourrait-on dire, parce qu’ils permettent de revenir sur des principes qui font tellement partie de notre paysage juridique qu’on ne prend plus guère le temps de les observer.
Tel est, par exemple, le cas du principe du consensualisme, déclinaison du principe de liberté contractuelle, qui signifie, au stade de la validité du contrat, non pas l’absence de forme, comme on le dit parfois faussement, mais la liberté de la forme. Précisément, sauf disposition légale ou volonté contraire, la validité du contrat n’est soumise à aucune condition de forme ; peu importe donc, celle dans laquelle la volonté de conclure le contrat s’est manifestée : écrite, orale, manuelle, gestuelle, tout est permis… C’est ce que rappelle la troisième chambre civile de la Cour de cassation, dans une décision rendue le 15 septembre 2010 à propos d’un contrat de mandat dont l’existence était contestée. Dans le chapeau de son arrêt, la Cour affirme que « le mandat peut être donné par acte authentique ou par acte sous seing privé, même par lettre ; il peut être aussi donné verbalement ». Liberté de la forme, en somme.
D’autres arrêts ont le mérite d’illustrer, en dépit d’un aspect technique quelque peu aride, une évolution fondamentale de la matière dans laquelle il est rendu. Ainsi en est-il de la décision du 16 septembre 2010 qui porte sur l’indemnisation d’un accident de la circulation. Les amateurs de responsabilité civile savent qu’une des tendances lourdes de ce droit de chair et de sang réside dans la déjudiciarisation des procédures d’indemnisation. Par souci d’améliorer la situation des victimes d’accidents, corporels notamment, le législateur contemporain privilégie parfois, dans les grandes lois d’indemnisation qui ont jalonné ces trois dernières décennies, l’accélération de la réparation du préjudice sur l’intégralité de celle-ci. Concrètement, c’est la voie de la transaction entre le débiteur d’indemnité (la compagnie d’assurance) et la victime qui a été légalement substituée à l’intervention du juge, dans une certaine mesure du moins. Le débiteur doit adresser, dans un délai assez court, une offre d’indemnité, laquelle est minutieusement réglementée et le contrat de transaction est conclu si la victime accepte cette proposition, ce qui permet une indemnisation plus rapide que si elle avait emprunté la voie judiciaire, même si la voie du contrat est moins généreuse que la voie judiciaire. C’est sur le régime de cette offre que se prononce la Cour, dans un arrêt qui illustre parfaitement les vices et les vertus de ce mouvement de déjudiciarisation des procédures d’indemnisation.
Le dernier arrêt qui aura les « honneurs » de cette petite chronique illustre parfaitement une notion à laquelle les juges ont de plus en plus souvent recours en matière de responsabilité civile, à savoir l’énigmatique perte de chance. Perte de chance qui, contrairement à ce qu’on lit parfois, n’est pas un ersatz de dommage, mais un préjudice à part entière qui suppose qu’une personne avait au moment des faits un certain nombre de chances d’obtenir un gain et qu’une autre par son comportement fautif lui a fait perdre les chances en question. Reste à évaluer ce préjudice dont la réparation ne sera pas partielle mais intégrale, sauf à commettre une nouvelle erreur en pensant qu’indemniser une perte de chance revient à réparer partiellement un préjudice éventuel. Dans l’espèce qui a donné lieu à l’arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation, en date du 16 septembre 2010, la faute de l’avocat, qui n’avait pas renouvelé l’inscription de l’hypothèque qui garantissait la créance de son client avait fait perdre à celui-ci la chance d’en obtenir le règlement. Préjudice autonome qui devait donc être intégralement réparé.
Civ. 3e, 15 septembre 2010, n°09-13.442
Civ 2e, 16 septembre 2010, n°09-14.210
Civ. 1re, 16 septembre 2010, n°09-65.909
Références
« Principe déduit de la théorie de l’autonomie de la volonté en vertu duquel un acte juridique n’est soumis à aucune forme particulière pour sa validité, le consentement ayant à lui seul le pouvoir de créer des obligations. »
« Droit réel accessoire grevant un immeuble et constitué au profit d’un créancier en garantie du paiement de la dette. L’hypothèque n’entraîne pas dessaisissement du propriétaire.
L’hypothèque autorise le créancier non payé à l’échéance à faire saisir et vendre l’immeuble en quelque main qu’il se trouve (droit de suite) et à se payer sur le prix avant les créanciers chirographaires (droit de préférence).
Entre les créanciers, l’hypothèque n’a de rang que du jour de l’inscription prise à la conservation des hypothèques par le créancier.
Le créancier hypothécaire peut demander en justice que l’immeuble lui demeure en paiement.
L’hypothèque est ou légale, ou judiciaire, ou conventionnelle. Elle ne s’applique qu’aux biens immobiliers. Toutefois, il existe quelques cas d’hypothèques mobilières (navires, aéronefs). »
« Principe général du droit, directement issu de la théorie de l’autonomie de la volonté, selon lequel les sujets de droit sont libres de conclure ou non un contrat et de déterminer leurs obligations réciproques. »
« Acte par lequel une personne est chargée d’en représenter une autre pour l’accomplissement d’un ou de plusieurs actes juridiques.
Le mandat est conventionnel lorsqu’il résulte d’un contrat conclu entre le représenté (ou mandant) et le représentant (ou mandataire). Il peut aussi résulter de la loi ou d’un jugement. »
« Préjudice résultant de la disparition, due au fait d’un tiers, de la probabilité d’un événement favorable et donnant lieu à une réparation mesurée sur la valeur de la chance perdue déterminée par un calcul de probabilités et qui ne peut être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
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