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Droit de la consommation
Clauses abusives dans des conditions générales de transport aérien
Mots-clefs : Transport, Conditions générales, Clauses abusives, Association de consommateurs, Action préventive, Intérêt collectif des consommateurs, Suppression, Publication de la décision (non)
Sont déclarées abusives par la Cour de cassation de nombreuses clauses stipulées dans les conditions générales de transport d’une compagnie aérienne. Toutefois, la Cour refuse la publication de la décision de condamnation de la compagnie.
Une association de consommateurs agréée avait assigné, sur le fondement des nouveaux articles L. 621-1, L. 621-7 et L. 621-8 du Code de la consommation (anc. art. L. 421-1 et L. 421-6) une compagnie aérienne afin que soient déclarées abusives ou illicites des clauses stipulées dans les conditions générales de transport de cette compagnie et obtenir en conséquence leur suppression ainsi que la diffusion d’un communiqué judiciaire relatif au jugement appelé à être rendu.
Rappelons à titre liminaire que les associations régulièrement déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs peuvent, si elles ont été agréées à cette fin, exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs et que celles-ci, dès lors qu’elles agissent dans le cadre prévu par les dispositions précitées peuvent demander à la juridiction civile, statuant sur l'action civile ou à la juridiction répressive, statuant sur l'action civile, d'ordonner au défenseur ou au prévenu, le cas échéant sous astreinte, toute mesure destinée à faire cesser des agissements illicites ou à supprimer dans le contrat ou le type de contrat, en cours ou non, proposé aux consommateurs, une clause illicite. De surcroît, le tribunal qui rend une décision en matière de cessation ou de suppression de clauses abusives peut ordonner la diffusion de cette décision, par tous moyens appropriés, pour informer le public (C. consom., art. L. 621-11 : anc. art. L. 421-9). Il peut ainsi s’agir d’une communication par voie de courrier électronique à des abonnés ou par voie de mention sur la page d’accueil du site internet du professionnel.
En l’espèce, concernant l’abus des clauses dénoncées par l’association, celle-ci a obtenu gain de cause, pour la majorité d’entre elles, devant toutes les juridictions saisies. Ainsi la Cour de cassation condamne-t-elle, confortant ainsi l’appréciation des juges du fond, plusieurs clauses présumées irréfragablement abusives par le pouvoir réglementaire. Elle le fait tout d’abord pour celle faisant référence à la facturation de « frais de services » pour l’émission, notamment, d’un nouveau billet, dans la mesure où cette stipulation, ainsi rédigée sans autre précision ou motivation, laisse au professionnel le pouvoir de déterminer librement les frais en cause sans que le consommateur ait eu préalablement connaissance des règles déterminant leur fixation, contrairement à l’interdiction posée aux articles R. 132-1, 1° (condamnant la clause ayant pour objet ou pour effet, soit de constater l’adhésion du non-professionnel ou du consommateur à des clauses qui ne figurent pas dans l’écrit qu’il accepte ou qui sont reprises dans un autre document auquel il n’est pas fait expressément référence lors de la conclusion du contrat et dont il n’a pas eu connaissance avant sa conclusion) et R. 132-1, 4° (condamnant la clause qui accorde au seul professionnel le droit de déterminer si la chose livrée ou si les services fournis sont conformes ou non aux stipulations du contrat ou lui confère le droit exclusif d’interpréter une quelconque clause du contrat) du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016 relatif à la partie réglementaire de ce code. Également présumée irréfragablement abusive par l’article R. 132-1, 5° du code en raison de son défaut de réciprocité (le texte condamnant la clause qui contraint le non-professionnel ou consommateur à exécuter ses obligations alors que réciproquement, le professionnel n’exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d’un bien ou son obligation de fourniture de services), la Cour juge abusive la clause des conditions générales de la compagnie prévoyant que si des frais, taxes ou redevances, sont réduits ou supprimés, le passager pourra être remboursé des montants réduits ou supprimés et qu’en cas de renoncement du passager sur un vol pour lequel il dispose d’une réservation confirmée, ce passager bénéficiera du remboursement de ses taxes, redevances aéroportuaires et autres frais susvisés dont l’exigibilité est liée à l’embarquement effectif du passager conformément au règlement applicable. La Cour approuve les juges du fond d’avoir considéré qu’à défaut de remboursement automatique ou de mise à la disposition du consommateur d’une information sur l’existence et les caractéristiques d’une procédure permettant d’obtenir le remboursement des sommes indûment versées, le consommateur s’exposait à la perte de son droit à remboursement, risque révélant l’inexécution par le professionnel des obligations mises à sa charge par le texte précité. A nouveau déclarée irréfragablement abusive en raison de l’unilatéralité qu’elle contient, au bénéfice du professionnel et au détriment du consommateur, par l’article R. 132-1, 3° du Code de la consommation (condamnant toute clause qui réserve au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à livrer ou du service à rendre), la Cour fustige la clause stipulant que « le transporteur s’efforcera de satisfaire les demandes du passager concernant les prestations de services à bord, notamment boissons, repas spéciaux, films etc… La responsabilité du transporteur ne saurait toutefois être engagée si des impératifs liés à l’exploitation, à la sécurité et à la sûreté, ne lui permettent pas de fournir les prestations adaptées, même si celles-ci ont été confirmées à la réservation ». L’imprécision de la cause susceptible d’être invoquée par le professionnel pour justifier l’inexécution de son obligation et l’existence d’une faculté discrétionnaire au profit du professionnel de modifier unilatéralement les termes du contrat relatifs aux caractéristiques du service à rendre caractérisaient, pour les juges, l’abus de la clause litigieuse. Enfin, fut également déclarée abusive, en ce que l’article R. 132-1, 6° du Code de la consommation la présume irréfragablement comme telle (condamnant la clause qui supprime ou réduit le droit à réparation du préjudice subi par le non-professionnel ou le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations) la clause des conditions générales prévoyant que « les heures limites d’enregistrement sont variables d’un aéroport à l’autre. Le passager devra impérativement respecter les heures limites d’enregistrement afin de faciliter son voyage et d’éviter que ses réservations ne soient annulées. Le transporteur ou son agent accrédité fournira au passager les informations nécessaires sur l’heure limite d’enregistrement du premier vol sur ses lignes. Si le voyage du passager comporte des parcours ultérieurs, il lui appartient de vérifier qu’il est bien en possession de toutes informations relatives aux heures limites d’enregistrement concernant ces parcours ».
La cour d’appel est néanmoins censurée concernant l’injonction de publication d’un communiqué de sa décision sur le site internet de la compagnie, au motif principal que celle-ci portant sur des clauses ne figurant plus, depuis le 23 mars 2012, dans les nouvelles conditions générales de transport, lesdites clauses n’étaient pas susceptibles d’induire le consommateur en erreur. La décision apporte en ce sens un éclairage opportun sur le motif de la publicité, celle-ci ne devant pas être punitive mais simplement informative. En revanche, les juges avaient préalablement estimé que les demandes de l'association de consommateurs relatives aux clauses des conditions générales exclues des contrats de transports conclus par la société Air France depuis 23 mars 2012 demeuraient recevables dès lors que des contrats soumis aux anciennes conditions générales, pour leur grande majorité abusives, pouvaient avoir été conclus, avant cette date, avec des consommateurs.
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