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Droit administratif général
Compétence administrative en cas de dommages causés par une fuite de gaz
Mots-clefs : Responsabilité administrative, Dommages de travaux publics, Service public industriel et commercial, Gaz de France, Branchement particulier, Réseau public, Compétence, Juge administratif
Lorsque l’usager d’un service public industriel et commercial demande réparation d’un dommage provenant de la défectuosité d’un ouvrage ne constituant pas un raccordement particulier au réseau public, seul le juge administratif est compétent, rappelle le Tribunal des conflits.
La responsabilité administrative pour dommages de travaux publics est en principe exclue en cas de préjudices subis par les usagers d’un service public à caractère industriel et commercial (SPIC) dont relève Gaz de France. Toutefois, lorsque les travaux ou l’ouvrage par lesquels est survenu le dommage ne portent pas sur le branchement particulier d’un abonné au gaz, la responsabilité redevient extracontractuelle et la théorie des dommages de travaux publics retrouve application ainsi que la compétence du juge administratif. Cette jurisprudence traditionnelle (v. par exemple pour un cas d'intoxication au gaz causée par la défectuosité d'une canalisation desservant l'ensemble d'un immeuble collectif : T. confl. 1er juill. 2002, Mlle Labrosse c. Gaz de France) est illustrée par un récent arrêt du Tribunal des conflits du 19 octobre 2009.
Dans cette affaire, les requérants demandaient réparation d’un préjudice résultant de fuites de gaz survenues à proximité d’un réservoir de propane installé et entretenu par Gaz de France, pour l’ensemble du lotissement dont fait partie leur habitation. Le Tribunal des conflits rappelle d’abord que « si les litiges nés des rapports de droit privé qui lient un service public industriel et commercial de distribution de gaz à ses usagers relèvent de la compétence des juridictions judiciaires, il en va autrement lorsque l’usager demande réparation d’un dommage qui est étranger à la fourniture de la prestation et provient de la défectuosité d’un ouvrage ne constituant pas un raccordement particulier au réseau public ». Le juge constatant que le dommage ayant pour cause la défectuosité d’un raccord situé sur la canalisation reliant le réservoir de propane au réseau public de distribution desservant le lotissement, le litige relève de la compétence de la juridiction administrative.
T. confl. 19 octobre 2009, M. et Mme Blassenat, n° 3700
Références
■ Dommages de travaux publics
« Préjudices causés par l’exécution des travaux publics ou le fonctionnement des ouvrages publics. Le régime d’indemnisation de ces préjudices est fondé sur une responsabilité extra-contractuelle et a été déterminé par la jurisprudence sur la base de la loi du 28 pluviôse an VIII attribuant compétence à la juridiction administrative.
1. La qualification de dommage de travaux publics
La définition du dommage de travaux publics est extensive car elle résulte de l’effet attractif des notions de travaux publics et d’ouvrage public. Sont donc considérés comme des dommages de travaux publics, non seulement ceux qui sont directement provoqués par un travail ou un ouvrage publics, mais aussi ceux qui sont assimilés à de tels dommages. Entrent dans la catégorie des dommages de travaux publics, ceux qui résultent de l’exécution d’un travail ou de la construction d’un ouvrage (accidents subis par des personnes, dommages causés aux immeubles), les dommages résultant de l’inexécution d’un travail ou de l’absence d’un ouvrage, ceux résultant de l’existence d’un ouvrage, les dommages provenant des modalités d’entretien d’un ouvrage ou d’un vice de conception, les dommages résultant du fonctionnement normal ou anormal d’un ouvrage. Dans cette dernière hypothèse, le fait d’exploitation du service public utilisateur de l’ouvrage est désormais assimilé au fait de l’ouvrage. L’exception législative principale à la compétence du juge administratif résulte de la loi du 31 décembre 1957 relative aux dommages causés par les véhicules. À ce titre, les accidents provoqués par des véhicules participant à une opération de travaux publics relèvent de la compétence judiciaire, à condition toutefois que le dommage ne résulte pas de façon déterminante de l’état d’un ouvrage public. Des théories jurisprudentielles ont parallèlement institué des limitations au caractère attractif de la qualification de dommages de travaux publics. Ainsi, les dommages causés aux usagers des services publics industriels et commerciaux relèvent de la compétence judiciaire, sans nécessité de distinguer entre les dommages résultant d’un fait d’exploitation du service utilisant un ouvrage public ou du fait de l’ouvrage lui-même (TC 24 juin 1954, Dme Galland, Minotier, Guyomar, 3 arrêts, Rec. 717). Il en va de même pour les dommages résultant d’une emprise irrégulière ou d’une voie de fait. Si le dommage résulte de l’exécution d’un contrat, c’est la responsabilité contractuelle de son auteur qui est engagée selon des modalités contentieuses variables en fonction de la nature juridique du contrat.
2. Les conditions d’engagement de cette responsabilité
Ces conditions sont définies par la jurisprudence, font l’objet de désaccords doctrinaux. Pour M. Chapus, elles varient en fonction d’une distinction opposant les dommages permanents aux dommages accidentels. En revanche, pour la plupart des autres auteurs, la détermination du régime de responsabilité applicable repose sur l’identification de la qualité de la victime du dommage. Les dommages permanents ou non accidentels ou encore inconvénients et troubles de voisinage sont indemnisés sur la base d’une responsabilité sans faute justifiée par la compensation de la rupture de l’égalité devant les charges publiques. Les modalités de réparation des dommages accidentels de travaux publics varient en fonction de la qualité de la victime. La qualité essentielle est celle d’usager des travaux publics ou d’usager de l’ouvrage public, celles de participants ou de tiers étant résiduelles. Le régime de responsabilité applicable à l’usager est un régime de présomption de faute fondée sur le défaut d’entretien normal de l’ouvrage. Les usagers victimes d’ouvrages publics particulièrement ou exceptionnellement dangereux bénéficient, par dérogation, d’une responsabilité sans faute (CE A. 6 juill. 1973, Dalleau, Rec. 482). Les dommages subis par les participants aux travaux (entrepreneurs et personnels, agents publics) sont réparés sur la base de la faute prouvée imputable au maître de l’ouvrage ou à l’entrepreneur. Si le participant peut être considéré comme un collaborateur occasionnel du service public, il bénéficie néanmoins d’un régime de responsabilité sans faute (CE A. 27 nov. 1970, cons. Appert-Collin, Rec. 709). Les dommages subis par les tiers sont indemnisés sur la base d’une responsabilité sans faute. Le tiers se contentera d’établir le lien de causalité entre l’ouvrage ou le travail public et un dommage anormal et spécial. Le recours de plein contentieux est facilité par l’inapplication des règles habituelles de la décision préalable, de délai, et de ministère d’avocat. »
■ Service public
« Activité d’intérêt général, assurée ou assumée par une personne publique, et régie au moins partiellement par des règles de droit public. Cette définition, largement admise, renvoie à la conception fonctionnelle ou matérielle du service public, en mettant l’accent sur l’activité, la fonction. Elle a supplanté la conception organique ou institutionnelle, qui voit principalement dans le service public un organe, une structure. La doctrine insiste donc sur la difficulté de définir le service public, notion empirique, fonctionnelle, utilisée par le juge administratif comme une “ étiquette ” ou un “ label ”. Pourtant, cette notion, plus politique et idéologique que juridique, occupe une place singulière en droit administratif français : elle constitue, avec la puissance publique, l’une des notions mères de ce droit, l’un des critères d’application du droit administratif et de la compétence du juge administratif. Ce critère s’intéresse aux fins poursuivies. C’est dans la mesure où elle est au service du public et agit dans un but d’intérêt général, que l’Administration est soumise à un droit spécial. »
Source : V. Van Lang, G. Gondouin, V. Inserguet-Brisset, Dictionnaire de droit administratif, 5e éd., Sirey, coll. « Dictionnaire », 2008.
■ T. confl. 1er juill. 2002, Mlle Labrosse c. Gaz de France, Lebon 549, AJDA 2002. 689, note Biget.
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