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[ 7 décembre 2011 ] Imprimer

Droit administratif général

Compétence de la juridiction administrative pour connaître d’un litige entre l’Union des groupements d’achats publics (UGAP) et une société de formation

Mots-clefs : Contrat administratif, UGAP, EPIC, Nature du contrat, Compétence, Tribunal des conflits, Besoins propres de l’établissement, Caractère administratif par détermination de la loi

Un marché conclu pour les besoins propres de l’UGAP est un contrat administratif par détermination de la loi a précisé le Tribunal des conflits dans un arrêt du 14 novembre 2011.

À la suite de la conclusion d’un marché à bon de commande entre l’UGAP et l’EURL C2 Conseils et Formation portant sur la fourniture de prestations de formation à destination des personnels de l’UGAP est né un litige relatif à l’exécution de ce contrat. La société de formation demande, dans un premier temps, réparation de son préjudice financier à la juridiction administrative qui se déclare incompétente en raison de la nature du contrat. Le juge administratif qualifie ce contrat de droit privé car conclu pour les besoins propres de l’UGAP et non en tant que centrale d’achats (TA Melun, 1er déc. 2006). La société de formation saisit alors le juge judiciaire qui fait droit à sa demande (T. com. Meaux, 7 oct. 2008). L’UGAP fait appel du jugement. Au vu des clauses exorbitantes de droit communs présentes dans le contrat les jugent d’appel estiment que seule la juridiction administrative peut statuer (Paris, 18 févr. 2001). Mais en raison de la décision d’incompétence du Tribunal administratif de 2006, la cour d’appel renvoie la question de la compétence devant le Tribunal des conflits.

Le Tribunal des conflits se réfère en l’espèce à l’alinéa 1er de l’article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes à caractère économique et financiers (loi MURCEF), « les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs ». Par ailleurs, en vertu des articles 1er et 17 du décret n° 85-801 du 30 juillet 1985 relatif au statut et au fonctionnement de l’UGAP, cet établissement est un établissement public industriel et commercial (EPIC) soumis, pour la totalité de ses achats, aux dispositions du Code des marchés publics applicables à l'État. Le statut d’EPIC de l’UGAP, conformément à l’article 2 de la loi MURCEF, exclut en principe, qu’un marché conclu par cette centrale pour ses besoins propres entre dans le champ d’application du Code des marchés publics. Mais l’article 17 du décret de 1985 précité permet au juge du Tribunal des conflits de préciser que les marchés conclus par l’UGAP ont le caractère de contrat administratif par détermination de la loi. Il n’y a pas lieu de distinguer les contrats passés par l’établissement en sa qualité de centrale publique d’achats (v. également T. confl. 5 juill. 1999, UGAP c. Sté SNC Activ CSA) ou ceux conclus pour ses besoins propres et cela quelles que soient les modalités selon lesquelles ils ont effectivement été conclus.

T. confl. 14 nov. 2011, Union des groupements d’achats publics c. Eurl C2 Conseils et Formation, n°3813

Références

Établissement public administratif (EPA) et Établissement public industriel et commercial (EPIC)

« (…) D’origine doctrinale et jurisprudentielle, cette distinction est la conséquence de la différenciation entre services publics administratifs (SPA) et services publics industriels et commerciaux (SPIC). Un établissement public qui gère un service public administratif a toutes les chances d’être qualifié d’EPA et celui gérant un service public industriel et commercial, d’EPIC. L’intérêt de la distinction est évident : les EPA sont presque entièrement soumis au droit administratif en raison de leur nature de personne publique et de la nature de leur activité. Les EPIC sont soumis largement au droit privé, conséquence de la nature de l’activité et dans une moindre mesure au droit administratif, conséquence de leur nature de personne publique (Civ. 1re, 21 déc. 1987, BRGM, Bull. civ. I, no 348). Cette distinction pose parfois quelques problèmes au juge, notamment lorsque la qualification de l’établissement public ne correspond pas à la nature de l’activité. Un établissement public peut être qualifié d’EPIC alors qu’il gère en réalité un SPA (établissement public “ à visage inversé ”). Si la qualification résulte de la loi, le juge administratif est lié; il en va différemment quand la qualification est donnée par un décret (CE 4 juill. 1986, Berger, Rec. 564.) Il existe aussi des établissements publics « à double visage » qui sont chargés de gérer une mission de service public à la fois administratif et industriel et commercial. Tout litige porté devant le juge administratif impose donc à ce dernier de rechercher quelle est l’activité précise à l’origine du contentieux. “ Lorsqu’un établissement public tient de la loi la qualité d’établissement public industriel et commercial, les litiges nés de ses activités relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire, à l’exception de ceux relatifs à celles de ses activités qui, telles la réglementation, la police ou le contrôle, ressortissent par leur nature de prérogatives de puissance publique ”. Ainsi le TC a-t-il essayé de simplifier les règles de répartition des compétences, dans une décision du 12 déc. 2005, EURL Croisières lorraines « La Bergamote » c/ Voies navigables de France (AJDA 2006. 1041. Note F. Colly – V. aussi TC 16 oct. 2006, Caisse centrale de réassurance, AJDA 2006. 2382).(…) »

Source : A. Van Lang, G. Gondouin, V. Inserguet-Brisset, Dictionnaire de droit administratif, 6e éd., Sirey, 2011.

T. confl. 5 juill. 1999, UGAP c. Sté SNC Activ CSA, req. no 03167, Lebon 465.

■ Article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes à caractère économique et financiers (loi MURCEF)

« I. - Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs.

Toutefois, le juge judiciaire demeure compétent pour connaître des litiges qui relevaient de sa compétence et qui ont été portés devant lui avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

II. - Les dispositions du I sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

Toutefois, pour leur application, les mots : " les marchés passés en application du code des marchés publics " sont remplacés par les mots : " les marchés entrant dans les définitions du code des marchés publics et passés par l'État, ses établissements publics, la Nouvelle-Calédonie, la collectivité de Polynésie française, celle de Wallis-et-Futuna, les provinces de Nouvelle-Calédonie, les communes de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française ainsi que par leurs établissements publics. " »

■ Décret n° 85-801 du 30 juillet 1985 relatif au statut et au fonctionnement de l’UGAP

Article 1er

I.-L'Union des groupements d'achats publics est un établissement public industriel et commercial placé sous la tutelle du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l'éducation nationale.

Cet établissement constitue une centrale d'achat au sens du code des marchés publics et de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques et privées non soumises au code des marchés publics.

II.-L'établissement a pour mission de passer des marchés publics, de conclure des accords-cadres de travaux, fournitures ou services et d'acquérir des fournitures ou services destinés à tout pouvoir adjudicateur ou à toute entité adjudicatrice soumis au code des marchés publics ou à l'ordonnance du 6 juin 2005 susmentionnée.

III.-L'établissement peut également intervenir au bénéfice de toute institution étrangère tenue de passer ses marchés conformément aux dispositions de l'Accord sur les marchés publics en date du 15 avril 1994 conclu dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce et de toute organisation internationale, intergouvernementale ou non, ayant souscrit aux obligations de transparence, de publicité et de concurrence stipulées dans cet accord.

IV.-Il peut en outre acquérir des biens et services pour tout opérateur économique :

1° Lié à une personne publique par un contrat de partenariat en application de l'article 1er de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat ou de l'article L. 1414-1 du code général des collectivités territoriales ;

2° Assurant une mission d'intérêt général prévue à l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales ou à l'article L. 6148-2 du code de la santé publique ;

3° Titulaire d'un bail régi par l'article L. 2122-15 du code général de la propriété des personnes publiques ;

4° Chargé d'une mission globale régie par l'article 2 de la loi n° 87-432 du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire ou par le I de l'article 3 de la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité ;

5° Ou titulaire d'une délégation de service public en application de l'article 40 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques ou de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales.

Les interventions de l'établissement au service des opérateurs mentionnés aux 1 à 5 ci-dessus ne peuvent porter que sur l'exécution des contrats ou missions qui y sont cités. »

Article 17

« L'établissement est soumis, pour la totalité de ses achats, aux dispositions du code des marchés publics applicables à l'État. »

 

Auteur :C. G.

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