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Propriété littéraire et artistique
Compilation : atteinte au droit moral
Mots-clefs : Droit d’auteur, Droits voisins, Droit moral
Le droit imprescriptible reconnu à l’artiste-interprète au respect de son interprétation lui permet de s’opposer à toute reproduction altérée de celle-ci, quand bien même l’altération de l’interprétation procéderait de l’enregistrement d’origine et serait appréciée au regard de l’écoulement du temps et de l’évolution technique.
Régulièrement, la Cour de cassation a à se prononcer sur le sort de l’artiste-interprète qui considère qu’une compilation de quelques-unes de ses chansons porte atteinte à son droit moral. Et souvent, ses décisions vont dans le sens d’un renforcement des prérogatives de l’artiste qui est, rappelons-le, le seul titulaire de droits voisins à bénéficier d’un tel avantage extrapatrimonial, les autres (producteurs, etc.) ne disposant pas de droit moral. Dans l’arrêt rendu le 24 septembre 2009 par la première chambre civile, deux précisions sont apportées garantissant, une fois encore, le respect dû à l’interprétation.
En l’espèce, Henri Salvador (instance reprise par son héritière, le chanteur étant décédé entre-temps), reproche à un producteur, d’une part, d’avoir réalisé, sans son autorisation (mais elle n’était pas ici nécessaire les chansons étant tombées dans le domaine public), une compilation de dix-huit de ses chansons enregistrées entre 1948 et 1952, puis de l’avoir commercialisée au prix d’un euro dans la grande distribution et, d’autre part, d’avoir utilisé l’une de ses photographies sur la pochette du disque, ce dernier point, relatif au droit à l’image (3e moyen), ne faisant pas ici l’objet d’observations particulières. Sont invoqués le droit moral de l’artiste et de l’auteur, six des dix-huit chansons litigieuses ayant été écrites par Henri Salvador. Sur les deux aspects du droit moral (art. L. 212-2 et L. 121-1 CPI), la Cour de cassation considère que la compilation étant « d’une qualité sonore de grande médiocrité », l’atteinte au droit moral de l’artiste est caractérisée et que la commercialisation d’une compilation d’une qualité sonore d’une grande médiocrité, vendue au prix dérisoire d’un euro, était de nature à déprécier l’œuvre et portait également atteinte à la considération de l’auteur à son droit moral. Par conséquent, le seul fait d’être fidèle à l’enregistrement original ne suffit pas à se protéger contre la violation du droit moral qui a la particularité d’être imprescriptible.
Civ. 1re, 24 septembre 2009, F-P+B, n° 08-11.112
Références
■ Droit moral
« Droit de l’auteur d’une œuvre littéraire, artistique ou scientifique de la divulguer, d’en fixer les conditions d’exploitation et d’en défendre l’intégrité.
On oppose le droit moral au droit pécuniaire portant sur les profits obtenus par l’exploitation de l’œuvre. »
■ Droits voisins
« Droits reconnus aux artistes-interprètes, aux producteurs de phonogrammes ou de vidéogrammes et aux entreprises de communication audiovisuelle, ainsi dénommées parce qu’ils ont des ressemblances marquées avec le droit d’auteur (l’expression complète est : droits voisins du droit d’auteur). »
Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.
■ Code de la propriété intellectuelle
Article L. 121-1
« L'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre.
Ce droit est attaché à sa personne.
Il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible.
Il est transmissible à cause de mort aux héritiers de l'auteur.
L'exercice peut être conféré à un tiers en vertu de dispositions testamentaires. »
Article L. 212-2
« L'artiste-interprète a le droit au respect de son nom, de sa qualité et de son interprétation.
Ce droit inaliénable et imprescriptible est attaché à sa personne.
Il est transmissible à ses héritiers pour la protection de l'interprétation et de la mémoire du défunt. »
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