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Droit pénal européen et international
Condamnation de la France pour des conditions de détention inhumaines et dégradantes
Mots-clefs : Conditions de détention, Traitement inhumain et dégradant, Conv. EDH
La Cour européenne des droits de l'homme juge, dans l'arrêt Khider contre France du 9 juillet 2009, que les conditions de détention du requérant, classé « détenu particulièrement surveillé », soumis à des transfèrements répétés, placé en régime d'isolement à long terme et faisant l'objet de fouilles corporelles intégrales régulières s'analysent, par leur effet combiné et répétitif, en un traitement inhumain et dégradant.
Par l'arrêt Khider, la Cour de Strasbourg durcit son appréciation des conditions de détention applicables, en France, à certains détenus. En l'espèce, le requérant, incarcéré depuis 2001 pour des faits de vol en bande organisée avec arme et concours à tentative d'évasion notamment, invoquait une violation des articles 3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains et dégradants) et 8 (droit au respect de la vie privée) de la Convention en raison de ses transfèrements répétés, de la durée de sa mise à l'isolement et des fouilles corporelles systématiquement pratiquées.
La Cour examine son recours sous l'angle du seul article 3. Après avoir rappelé quelques principes généraux (minimum de gravité du traitement inhumain, v. not. CEDH 4 juill. 2006, Ramirez Sanchez c. France, § 138; motivation substantielle de la décision de prolongation d'une mesure d'isolement ; v. not. le Point 53.1 des règles pénitentiaires européennes ; modalités adéquates et justifiées des fouilles à corps ; v. CEDH 12 juin 2007, Frérot c. France ), elle considère d'abord que les quatorze transfèrements subis sur sept années de détention n'apparaissaient plus, au fil du temps, justifiés par des impératifs de sécurité, lesquels ont primé sur l'exigence d'assurer au détenu des conditions humaines de détention.
Sur le maintien à l'isolement pendant une période totale de quatre ans, la Cour relève ensuite que les mêmes motifs (participation du requérant à une tentative d'évasion en 2001) ont été invoqués au soutien de chaque prolongation et qu'ils ont cessé d'être pertinents à partir de décembre 2004. Elle estime que « la mise à l'isolement pour une si longue période, combinée avec la dégradation de l'état de santé psychologique et somatique du requérant, […] imputable aux prolongations répétées de celle-ci, entre en ligne de compte pour apprécier si le seuil de gravité requis par l'article 3 a été atteint » (§ 122).
S'agissant, enfin, des fouilles corporelles, la Cour renvoie à son arrêt Frérot (préc., § 67) et estime que de telles « fouilles répétées, pratiquées sur un détenu qui présentait des signes d'instabilité psychiatrique et de souffrance psychologique, ont été de nature à accentuer son sentiment d'humiliation et d'avilissement à un degré tel qu'on peut les qualifier de traitement dégradant » (§ 130).
Relevant que « les conditions de détention du requérant […] s'analysent, par leur effet combiné et répétitif, en un traitement inhumain et dégradant » (§ 133), elle conclut, à l'unanimité, à la violation de l'article 3, à laquelle s'ajoute un non-respect de l'article 13, le requérant n'ayant pas disposé de « recours effectifs » pour contester fouilles et transfèrements. 12 000 € lui sont alloués au titre de son préjudice moral.
Documents
CEDH 4 juill. 2006, Ramirez Sanchez c. France, § 138 ; AJ pénal 2005. 121, obs. Céré.
CEDH 12 juin 2007, Frérot c. France ; AJ pénal 2007. 336, obs. Herzog-Evans.
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