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Droit de la responsabilité civile
Condamnation in solidum : l’absence d’immunité civile du mineur fautif
Mots-clefs : Responsabilité des parents du fait de leur enfant, Condamnation in solidum, Recours subrogatoire
La condamnation des père et mère sur le fondement de la responsabilité du fait de leur enfant ne fait pas obstacle à ce que le mineur soit civilement condamné in solidum.
L’alinéa 4 de l’article 1384 du Code civil prévoit la responsabilité des père et mère du fait de leur enfant mineur. La responsabilité des parents ne peut être engagée sur ce fondement que si certains critères cumulatifs sont réunis. Ainsi l’enfant doit :
– être mineur non émancipé ;
– être placé sous l’autorité parentale de ses père et mère ;
– cohabiter avec ses parents. On s’attache au lieu de résidence habituelle de l’enfant pour déterminer la cohabitation. À ce titre, le parent n’exerçant qu’un droit de visite et d’hébergement ne peut voir sa responsabilité engagée de plein droit du fait de son enfant (Crim. 29 avr. 2014) ;
– avoir commis un fait dommageable. Depuis la jurisprudence Fullenwarth un fait fautif n’est plus exigé (Ass. plén. 9 mai 1984).
En l’espèce, un mineur avait été déclaré coupable de blessures involontaires.
Statuant sur les intérêts civils, le tribunal pour enfants avait condamné l’auteur ainsi que ses parents in solidum à verser une indemnité à la victime. Le Fonds de garantie, après avoir indemnisé la victime, avait exercé son recours subrogatoire à l’encontre du mineur et de ses parents afin de recouvrer, auprès de ces derniers, la somme transmise.
La cour d’appel ayant accueilli le recours subrogatoire, le mineur fautif s’est pourvu en cassation estimant que la responsabilité des parents du fait de leur enfant mineur faisait obstacle à ce que celui-ci soit personnellement tenu à indemniser la victime.
La Cour de cassation écarte l’argument à travers un attendu de principe sans ambiguïté.
Elle énonce que « la condamnation des père et mère sur le fondement de l’article 1384, alinéa 4, du code civil ne fait pas obstacle à la condamnation personnelle du mineur sur le fondement de l’article 1382 ». Poursuivant, elle précise que « la minorité [de l’auteur] ne fait pas obstacle à sa condamnation à indemniser la victime pour le dommage qu’elle a subi à la suite de sa faute et qu’il doit l’être in solidum avec ses parents ».
Ainsi les Hauts magistrats refusent d’accorder au mineur une immunité civile équivalente à celle dont dispose le préposé sur le fondement de l’article 1384, alinéa 5, du Code civil, lorsqu’il a agi dans les limites de sa mission (Ass. plén. 25 févr. 2000).
La décision est conforme à la position de la chambre criminelle qui « admet de façon constante que cette action civile peut être dirigée non seulement contre l’enfant lui-même sur le fondement de l’article 1382, mais aussi contre ses parents en application de l’article 1384, alinéa 4 » (v. G. Viney et P. Jourdain).
Civ. 2e, 11 sept. 2014, n°13-16.897
Références
■ Crim. 29 avr. 2014, n° 13-84.207, D. 2014. 1620, note L. Perdrix.
■ Ass. plén. 9 mai 1984, n°80-93.481.
■ Ass. plén. 25 févr. 2000, n° 97-17.378, RTD civ. 2000. 582, note P. Jourdain.
■ Code civil
« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
« On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.
Toutefois, celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance ne sera responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable.
Cette disposition ne s'applique pas aux rapports entre propriétaires et locataires, qui demeurent régis par les articles 1733 et 1734 du code civil.
Le père et la mère, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux.
Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ;
Les instituteurs et les artisans, du dommage causé par leurs élèves et apprentis pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance.
La responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les père et mère et les artisans ne prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité.
En ce qui concerne les instituteurs, les fautes, imprudences ou négligences invoquées contre eux comme ayant causé le fait dommageable, devront être prouvées, conformément au droit commun, par le demandeur, à l'instance. »
■ G. Viney et P. Jourdain, Traité de droit civil, les conditions de la responsabilité civile, 2e, éd., LGDJ, 1998, p.1008.
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