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Droit administratif des biens
Confirmation par le Conseil d’État de l’annulation de la « taxe trottoir » dans la Cité des Papes
Mots-clefs : Taxe trottoir, Redevance, Occupation du domaine public, Commerçant utilisant le domaine public pour son activité
Une commune ne peut demander une redevance aux commerçants dont l’activité nécessite l’utilisation du domaine public par la clientèle dans les limites ne dépassant pas le droit d’usage appartenant à tous.
Le Conseil d’État vient de mettre un terme au long épisode de la « taxe trottoir », appelée également « taxe kebab ».
Il s’agissait de savoir si le conseil municipal d’une commune, en l’espèce, la commune d’Avignon, pouvait instaurer une redevance d’utilisation de son domaine public applicable, d'une part à tous les propriétaires de distributeurs automatiques installés en façade de bâtiments et accessibles directement depuis les trottoirs (banques), d'autre part aux commerces pratiquant des ventes ou activités diverses au travers de vitrines et comptoirs (sandwicheries, briocheries, boulangeries, kebabs, etc.).
La redevance litigieuse se justifiait-elle par l’occupation du domaine public par les clients en attente de pouvoir retirer de l'argent ou d'être servi ; par l'utilisation indirecte du domaine public par les commerçants situés le long de la voie, sur les trottoirs ?
Le Conseil d’État rejette le pourvoi de la commune d’Avignon qui demandait l’annulation de la décision de la cour administrative d’appel de Marseille (26 juin 2012). Selon les juges du Palais Royal, la cour administrative d’appel n’a pas méconnu les dispositions du Code de la propriété des personnes publiques (art. L. 2122-1, L. 2125-1 et L. 2125-3).
En effet, selon ces dispositions, l’occupation ou l’utilisation du domaine public n'est soumise à la délivrance d'une autorisation que lorsqu'elle constitue un usage privatif de ce domaine public, excédant le droit d'usage appartenant à tous.
Par ailleurs, lorsqu’une telle autorisation est donnée par la personne publique gestionnaire du domaine public concerné, la redevance d'occupation ou d'utilisation du domaine public constitue la contrepartie du droit d'occupation ou d'utilisation privative ainsi accordé.
Il s’ensuit que l'occupation ou l'utilisation du domaine public dans les limites ne dépassant pas le droit d'usage appartenant à tous, qui n'est soumise à la délivrance d'aucune autorisation, ne peut être assujettie au paiement d'une redevance.
Ainsi, la seule présence de la clientèle sur le domaine public, le temps d’une transaction bancaire ou commerciale (caractère momentané de l’utilisation), ne peut entraîner le paiement d’une redevance d’occupation du domaine public pour les établissements bancaires ou commerciaux concernés. En effet, cette présence de clientèle n’est pas constitutive d’un usage privatif du domaine public par ces établissements dès lors qu’ils ne disposent d’aucune installation sur le domaine public.
Le rapporteur public M. Deliancourt, dans ses conclusions relatives à cette même affaire devant la cour administrative d’appel de Marseille, s'interrogeait sur la question de savoir si le fait d’admettre ce type de redevance n’obligerait pas les communes « à soumettre à autorisation et à redevance les personnes qui attendent sur le trottoir l'ouverture d'un cinéma ou d'un supermarché ou qui attendent leur tour pour entrer les jours de forte affluence, les fumeurs obligés de sortir des lieux de restauration pour fumer, les sorties d'églises et de temples, etc. Et pourquoi pas le passant, ou la passante faisant du lèche-vitrines mais qui reste un peu trop devant la devanture se demandant si elle entre et achète ou pas ? ».
CE 31 mars 2014, Commune d’Avignon, n° 362140
Références
■ CAA Marseille, 26 juin 2012, n° 11MA01675, AJDA 2012. 2109 ; RFDA 2012. 902, concl. S. Deliancourt.
■ S. Deliancourt, « L'illégalité de la « taxe trottoir » : l'utilisation momentanée du domaine public par les clients d'un commerce », Conclusions sur cour administrative d'appel de Marseille, 26 juin 2012, M. Chiappinelli et autres, n° 11MA01675, RFDA 2012. 902.
■ Code de la propriété des personnes publiques
« Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous. »
« Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement d'une redevance sauf lorsque l'occupation ou l'utilisation concerne l'installation par l'État des équipements visant à améliorer la sécurité routière ou nécessaires à la liquidation et au constat des irrégularités de paiement de toute taxe perçue au titre de l'usage du domaine public routier.
Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du domaine public peut être délivrée gratuitement :
1° Soit lorsque l'occupation ou l'utilisation est la condition naturelle et forcée de l'exécution de travaux ou de la présence d'un ouvrage, intéressant un service public qui bénéficie gratuitement à tous ;
2° Soit lorsque l'occupation ou l'utilisation contribue directement à assurer la conservation du domaine public lui-même.
En outre, l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du domaine public peut être délivrée gratuitement aux associations à but non lucratif qui concourent à la satisfaction d'un intérêt général. »
« La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation. »
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