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[ 7 avril 2016 ] Imprimer

Procédure pénale

Appel des arrêts de cour d’assises : petit vade mecum à l’usage du Ministère public

Mots-clefs : Cour d’assises, Appel, Arrêt de condamnation, Compétence du procureur de la République, Ministère public

Depuis la loi du 15 juin 2000, les arrêts rendus par les cours d’assises sont susceptibles d’appel. Les dispositions relatives à l'exercice de cette voie de recours sont contenues dans les articles 380-1 à 380-15 du Code de procédure pénale. Reste à bien maîtriser qui peut faire appel et de quoi. C’est ce que vient de rappeler la Cour de cassation dans deux arrêts rendus le même jour à propos de la recevabilité des appels formés par le Ministère public.

Dans la première affaire, la cour d'assises du Bas-Rhin avait condamné deux individus. Le premier pour viols aggravés, agressions sexuelles aggravées et détention d’images à caractère pornographique de mineur, à douze ans de réclusion criminelle, tout en l’acquittant des chefs de captation et transmission en vue de sa diffusion d’image à caractère pornographique de mineur. Le second avait été condamné pour captation et transmission en vue de sa diffusion d’images à caractère pornographique de mineur et détention d’image à caractère pornographique de mineur, à deux ans d’emprisonnement et cinq ans d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole en contact avec les mineurs. Un appel principal avait été interjeté par les accusés et des appels incidents par le procureur de la République visant les condamnations prononcées et par les parties civiles.

Dans la seconde affaire, la cour d'assises de Meurthe-et-Moselle, a condamné à sept ans d’emprisonnement et à une interdiction professionnelle définitive, un individu pour des chefs de viols aggravés et agressions sexuelles aggravées, mais a prononcé un acquittement du chef d’exhibition sexuelle. Le procureur général a interjeté un incident visant la condamnation prononcée. 

En principe, seuls les arrêts de condamnation peuvent faire l'objet d'un appel (C. pr. pén., art. 380-1). Dans ce cas, La faculté d'appeler appartient notamment à l'accusé et à la partie civile, quant à ses intérêts civils (C. pr. pén., art. 380-2). En l’espèce, les appels principaux interjetés par les accusés, ainsi que les appels incidents formés par les parties civiles sont recevables sans difficulté dans les deux affaires. Il en allait autrement des appels formés par le ministère public. S’agissant de ce dernier, la faculté d’appel lui est ouverte concernant les arrêts de condamnation. Dans la première affaire, était donc recevable l’appel incident du procureur de la République visant la condamnation prononcée à l’encontre du second accusé. 

Il en va différemment en matière d'arrêts d'acquittement. La loi n° 2002-307 du 4 mars 2002 complétant la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a donné au seul procureur général le pouvoir d’intervenir (art. 380-2, al. 2). Dès lors, l'appel interjeté par un procureur de la République dans cette hypothèse est irrecevable (Crim. 26 juin 2002, n° 02-84.335 Crim. 23 juill. 2003, n° 03-84.118). Cette impossibilité s’applique également lorsque l'appel du procureur de la République porte sur l'acquittement partiel de l'accusé. (Crim. 21 mai 2003, n° 03-82.466). Tel est le rappel que la Chambre criminelle fait dans la première affaire. L’individu ayant été acquitté des chefs de captation et transmission en vue de sa diffusion d’image à caractère pornographique de mineur, il était impossible au procureur de la République de faire appel.

Par ailleurs, dans les deux affaires, la chambre criminelle précise également que le ministère public, dès lors qu’il a qualité pour remettre en cause la décision rendue, « ne peut cantonner à une partie de la décision son appel, même incident, d’un arrêt pénal rendu par une cour d’assises à l’encontre d’un accusé». Ainsi, dans la seconde affaire, si le procureur général avait bien qualité pour interjeter appel (l’individu ayant été partiellement acquitté), il ne pouvait limiter celui-ci à la seule condamnation. Si l'appel du ministère public peut être limité à certains accusés, en revanche l’appel porte impérativement sur la totalité de l'arrêt, la cour d'assises d'appel se trouvant saisie comme après renvoi de cassation. L'appel ne peut, en aucun cas, être cantonné (Crim. 2 févr. 2005, n°05-80.196).

Crim. 10 février 2016, n° 16-80.468 et 16-80.598.

Références

■ Crim. 26 juin 2002, n° 02-84.335 P, D. 2002. 2654.

■ Crim. 23 juill. 2003, n° 03-84.118 P, AJ pénal 2003. 68, obs. A. P.

■ Crim. 21 mai 2003, n° 03-82.466 P.

■ Crim. 2 févr. 2005, n° 05-80.196 P, D. 2005. 795.

 

Auteur :C. L.

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