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Droit des obligations
De la bonne application de l’article 1178 du Code civil relatif à la condition suspensive
Mots-clefs : Contrat, Condition suspensive, Non-exécution, Débiteur, Faute volontaire
Lorsque la condition suspensive a été stipulée dans l’intérêt du seul acquéreur qui n’y avait pas renoncé et que cette condition ne s’est pas réalisée par la faute du vendeur, les dispositions de l’article 1178 du Code civil ne s’appliquent pas.
Sauf clause contraire, un contrat valablement formé déploie tous ses effets. D’une part, les effets édictés par la loi et que produisent tous les contrats, quelle que soit leur qualification et quelles que soient les qualités respectives des parties. Ces effets sont énoncés par l’article 1134 du Code civil qui dispose que tout contrat, d’abord, est intangible, que ce soit par la volonté unilatérale d’un des contractants ou par une décision judiciaire, ensuite, est irrévocable unilatéralement, enfin doit être exécuté de bonne foi. D’autre part, chaque contrat produit une seconde catégorie d’effets qui consiste dans la création d’obligations, lesquelles sont, en principe, pures et simples, entendons par là, qu’elles figurent dès la conclusion du contrat, dans le patrimoine du créancier contractuel, qui peut notamment en réclamer immédiatement l’exécution. Mais en vertu d’une clause contractuelle, et parfois même d’une disposition légale, les obligations engendrées par le contrat sont affectées d’une modalité qui va exercer une influence sur leur effectivité ou leur exigibilité, lesquelles ne seront envisageables que si un événement futur se réalise. Si cet événement est incertain, on parle alors de condition suspensive, s’il est certain, c’est d’un terme suspensif qu’il s’agit.
En l’espèce, un compromis de vente d’un immeuble avait été conclu sous la condition suspensive d’obtention d’un prêt par l’acquéreur et de la présentation par le vendeur d’un certificat négatif relatif à la non-réalisation des murs de clôture. Le délai pour réitérer l’acte de vente étant expiré, le vendeur soutient que les conditions suspensives étaient levées et demande donc la résolution du compromis aux torts de l’acquéreur, ainsi que la condamnation de celui à des dommages-intérêts.
Les juges du fond lui donnent raison au motif que la défaillance de la condition suspensive de présentation du certificat de conformité était imputable au vendeur et qu’elle devait donc être réputée accomplie.
Au visa de l’article 1178 du Code civil, la Cour de cassation a censuré la décision des juges du fond au motif que cette condition suspensive, stipulée dans l’intérêt exclusif de l’acquéreur qui n’y avait pas renoncé, ne s’était pas réalisée par la faute du vendeur.
On comprend donc que ce que reproche la troisième Chambre civile aux juges du fond, c’est d’avoir fait jouer l’article 1178 alors que ses conditions d’application n’étaient pas réunies. Ce texte, en vertu duquel la condition suspensive est réputée accomplie lorsque c’est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l’accomplissement, empêche le débiteur de faire délibérément échec à l’effectivité de l’obligation engendrée par le contrat qu’il a conclu, en provoquant par sa faute volontaire la défaillance de la condition à laquelle est précisément suspendue la vitalité de l’obligation. Or, en l’occurrence, la défaillance de la condition suspensive de présentation du certificat de conformité était imputable non pas au débiteur, l’acquéreur, mais à son contractant, le vendeur. Le jeu de l’article 1178 était donc exclu, la condition ne pouvait donc pas être réputée accomplie et les obligations engendrées par la vente ne pouvaient donc pas être fictivement considérées comme étant effectives. L’inexécution des dites obligations était donc par hypothèse inenvisageable… de même que la résolution du contrat pour inexécution…
Civ. 3e, 6 juill. 2011, pourvoi n°09-72.470
Références
[Droit civil]
« Convention faisant naître une ou plusieurs obligations (bail, entreprise) ou bien créant ou transférant un droit réel (vente, servitude). »
[Droit civil]
« Modalité d’un acte juridique faisant dépendre l’existence d’un droit d’un événement futur dont la réalisation est incertaine.
En fonction de ses effets, on distingue la condition suspensive et la condition résolutoire : si la condition est suspensive, le droit ne naît, rétroactivement, que si l’événement se produit. Si la condition est résolutoire, la survenance de l’événement fait disparaître le droit rétroactivement. »
[Droit civil]
« Sanction consistant dans l’effacement rétroactif des obligations nées d’un contrat synallagmatique, lorsque l’une des parties n’exécute pas ses prestations.
Comme la nullité, la résolution a un effet rétroactif, mais, à la différence de la première, elle sanctionne un défaut d’exécution et non pas un vice existant lors de la formation du contrat.
En cas d’inexécution partielle, les juges du fond apprécient souverainement si cette inexécution a assez d’importance pour entraîner la résolution ou si elle ne sera pas suffisamment réparée par l’allocation de dommages-intérêts.
La résolution est en principe judiciaire. Toutefois, la gravité du comportement d’une partie au contrat peut justifier que l’autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls. »
[Droit civil]
« Qui reporte à une date ultérieure l’exigibilité de l’obligation (terme suspensif) ou qui subordonne la naissance de l’obligation à un événement futur et incertain (condition suspensive). »
■ Code civil
« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.
Elles doivent être exécutées de bonne foi. »
« La condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement. »
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