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[ 6 novembre 2009 ] Imprimer

Procédure pénale

Dépistage d'alcoolémie : nullité soumise à grief

Mots-clefs : Circulation routière, Alcoolémie (dépistage), Éthylomètre, Nullité (grief), Procédure pénale

Pour entrainer la nullité de l'opération de dépistage d'alcoolémie, le prévenu doit établir que le non-respect du délai d'attente de trente minutes entre l'absorption du produit et le contrôle effectué lui a causé un grief.

Condamné à 300 euros d'amende et quatre mois de suspension du permis de conduire pour conduite en état d'ivresse caractérisée par la présence dans le sang d'un taux d'alcool égal ou supérieur à 0,4 mg par litre d'air expiré (art. L. 234-1 C. route), le prévenu contestait, à l'appui de son pourvoi, la régularité des opérations de dépistage en faisant valoir que le temps d'attente de trente minutes entre l'absorption du produit et la mesure de contrôle par l'air expiré au moyen d'un éthylomètre prévu par l'arrêté du 8 juillet 2003 n'avait pas été respecté. Selon lui, ce grief constituait, en application des articles 385, 388 et 429 du Code de procédure pénale, un moyen de nullité de la procédure qui devait emporter nullité du procès-verbal de constatation de l'infraction. Il estimait encore n'avoir pas été correctement informé sur la nature et la cause de la prévention (en raison de la requalification des faits opérée par les juges du premier degré, infirmée par la cour d'appel, en violation du principe du contradictoire ; v. l'art. 6 § 3 Conv. EDH) et avoir été contraint, en méconnaissance du principe de la présomption d'innocence, de s'auto-incriminer.

Pour unique réponse, la Cour de cassation se contente d'indiquer, au soutien du rejet de son pourvoi, que le prévenu ne rapporte pas la preuve d'un grief résultant du non-respect allégué du délai d'attente. La solution tend à intégrer le moyen tiré du non-respect du délai d'attente dans les nullités soumises à la preuve d'un grief prévues à l'article 802 du Code de procédure pénale. Pour autant, l'on pouvait se demander si le grief ne résultait pas du non-respect du délai d'attente lui-même (qui pouvait faire pencher la balance en dessous du seuil requis par la loi, d'autant qu'un taux de 0,43 mg a été mesuré en l'espèce), de sorte qu'il était peut-être envisageable d'en faire une nullité à grief présumé.

 

Crim. 13 oct. 2009

 

Références

Présomption d'innocence

« Principe selon lequel, en matière pénale, toute personne poursuivie est considérée comme innocente des faits qui lui sont reprochés, tant qu’elle n’a pas été déclarée coupable par la juridiction compétente. Inscrite dans la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen et ayant à ce titre valeur constitutionnelle, cette présomption a notamment pour effet de faire bénéficier du doute la personne concernée. Ce principe jusqu’alors affirmé dans le Code civil qui en organisait la protection judiciaire est aujourd’hui solennellement exprimé dans un article placé en exergue du Code de procédure pénale. »

Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.

Article L. 234-1 du Code de la route

« I. - Même en l'absence de tout signe d'ivresse manifeste, le fait de conduire un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,80 gramme par litre ou par une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,40 milligramme par litre est puni de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende.
II. - Le fait de conduire un véhicule en état d'ivresse manifeste est puni des mêmes peines.
III. - Dans les cas prévus au I et II du présent article, l'immobilisation peut être prescrite dans les conditions prévues aux articles L. 325-1 à L. 325-3.
IV. - Ces délits donnent lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre maximal de points du permis de conduire.
V. - Les dispositions du présent article sont applicables à l'accompagnateur d'un élève conducteur. »

Article 6 §  3 de la Convention européenne des droits de l’homme -Droit à un procès équitable

« 3. Tout accusé a droit notamment à :
a. être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui ;
b. disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;
c. se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les intérêts de la justice l'exigent ;
d. interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ;
e. se faire assister gratuitement d'un interprète, s'il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience. »

Code de procédure pénale

Article 385

« Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction.
Toutefois, dans le cas où l'ordonnance ou l'arrêt qui l'a saisi n'a pas été porté à la connaissance des parties dans les conditions prévues, selon le cas, par le quatrième alinéa de l'article 183 ou par l'article 217, ou si l'ordonnance n'a pas été rendue conformément aux dispositions de l'article 184, le tribunal renvoie la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau la juridiction d'instruction afin que la procédure soit régularisée.
Lorsque l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction a été rendue sans que les conditions prévues par l'article 175 aient été respectées, les parties demeurent recevables, par dérogation aux dispositions du premier alinéa, à soulever devant le tribunal correctionnel les nullités de la procédure.
Lorsque la procédure dont il est saisi n'est pas renvoyée devant lui par la juridiction d'instruction, le tribunal statue sur les exceptions tirées de la nullité de la procédure antérieure.
La nullité de la citation ne peut être prononcée que dans les conditions prévues par l'article 565.
Dans tous les cas, les exceptions de nullité doivent être présentées avant toute défense au fond. »

Article 388

« Le tribunal correctionnel est saisi des infractions de sa compétence soit par la comparution volontaire des parties, soit par la citation, soit par la convocation par procès-verbal, soit par la comparution immédiate, soit enfin par le renvoi ordonné par la juridiction d'instruction. »

Article 429

« Tout procès-verbal ou rapport n'a de valeur probante que s'il est régulier en la forme, si son auteur a agi dans l'exercice de ses fonctions et a rapporté sur une matière de sa compétence ce qu'il a vu, entendu ou constaté personnellement.
Tout procès-verbal d'interrogatoire ou d'audition doit comporter les questions auxquelles il est répondu. »

Article 802

« En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la nullité que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne. »

■ Pour aller plus loin

Crim. 12 nov. 2008, Dalloz actualité, 9 déc. 2008, obs. Darsonville ; D. 2009. AJ. 23 ; AJ pénal 2009. 73, obs. Céré.

Rép. pén. Dalloz, V° « « Conduite sous influence, par J.-P. Céré.

B. Bouloc, Procédure pénale, Dalloz, coll. « Précis », 21e éd., 2008, nos 778 s. (mise en œuvre des nullités).

 

Auteur :S. L.


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