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Droit des biens
Des arbres peuvent anormalement troubler le voisinage !
Mots-clefs : Trouble anormal du voisinage, Notion, Illustration, Arbres hauts, Débordement, Parcelle voisine
La présence d’arbres hauts sur une parcelle voisine peut constituer un trouble anormal du voisinage.
Les propriétaires de plusieurs parcelles de terrain, se plaignant des dommages causés à leur fonds par le débordement d'arbres situés sur la parcelle voisine, avaient assigné la propriétaire de celle-ci en réparation de leur préjudice. La cour d’appel rejeta leur demande au motif qu'il résultait de plusieurs constats d'huissier de justice que les arbres situés sur la parcelle voisine débordaient certes de plusieurs mètres sur leur parcelle dont ils détérioraient le grillage, mais qu'il existait aussi des branches et diverses espèces d'arbres dont des acacias de très grande hauteur implantés sur leurs propres parcelles, lesquels débordaient sur le chemin et touchaient par endroit les fils électriques. Visant le principe selon lequel nul ne peut causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage, cette décision est cassée par la Cour de cassation, reprochant aux juges du fond d’avoir statué par des motifs impropres à exclure l'existence de troubles anormaux de voisinage.
Ce n'est pas tant la notion de trouble qui fonde la théorie des troubles anormaux du voisinage, les troubles susceptibles d’être causés étant innombrables, que celle d’anormalité. Le trouble n'importe que s'il entrave de manière anormale les relations de voisinage, de sorte que c'est son anormalité qui doit avant tout être caractérisée. Si le caractère anormal est une donnée de fait appréciée souverainement par les juges du fond (Civ. 1re, 19 mars 2009, n° 07-22.018), l'anormalité demeure une notion juridique dont les critères constitutifs ont été posés par la Cour de cassation.
D'abord, l'anormalité est celle du trouble, non celle du dommage, car c'est le trouble anormal qui constitue le fait générateur de la responsabilité (F. Caballero, Essai sur la notion juridique de nuisance : LGDJ, préf. J. Rivero, n° 175. – Contra Ph. Malaurie et L. Aynès, Les biens : Defrénois, 3e éd., n° 1071).
Ensuite, le trouble est anormal à la condition de dépasser un certain degré de nuisance au-delà duquel est franchie « la capacité de résistance de l'homme et de son environnement » (Ph. Le Tourneau et alii., Droit de la responsabilité et des contrats : Dalloz, éd. 2008-2009, n° 7183). En ce sens, il convient, d’une part, que le trouble présente un caractère continu ou, du moins, répétitif. D'autre part, le trouble doit revêtir une intensité certaine, laquelle s'apprécie en fonction des circonstances de moment et de lieu.
En l’espèce, la particulière grandeur des arbres et la gêne causée par leur impact sur l’installation électrique caractérisaient l’anormalité du trouble causé aux propriétaires. Estimant qu'aucun trouble de voisinage n'était établi au motif que certains acacias implantés sur la parcelle des demandeurs au pourvoi débordaient sur le chemin et touchaient des fils électriques, cependant que, même à la supposer avérée, cette dernière circonstance n'avait pas pour effet d'effacer le trouble de voisinage imputable à la propriétaire voisine, auquel il devait être mis fin par injonction de leur suppression, la cour d’appel s’était donc déterminée par un motif inopérant justifiant donc que la cassation fut prononcée. En effet, la réciprocité des troubles causés entre voisins n’efface pas le droit du propriétaire troublé de contraindre son voisin de mettre fin au trouble qui lui est imputable, même dans le cas où il serait également victime d’un trouble du même type dont il peut, seulement et au même titre, demander la cessation.
Civ. 3ème, 30 mars 2017, n°15-27.521
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