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Libertés fondamentales - droits de l'homme
Dissolutions d’associations fondées sur les discriminations à caractère racial et religieux et sur les actes de terrorisme
Mots-clefs : Association, Discrimination, Haine, Violence, Code de la sécurité intérieure, Terrorisme, Police des associations, Mosquée, Groupement terroriste, Dissolution administrative
Le Président de la République a fait une exacte application des dispositions des 6° et 7° de l'article L. 212-1 du Code de la sécurité intérieure en prononçant les dissolutions d’associations revendiquant un islam radical, rejetant des valeurs et certaines lois de la République ou encore souhaitant accomplir des actes de terrorisme.
Dissoudre une association peut paraître de prime abord en contradiction avec la philosophie même de la loi de 1901. Toutefois, il est essentiel que l’administration puisse disposer de moyens afin de faire disparaître une association qui ne respecterait pas les fondements même de l’État de droit. Il s’agit de la dissolution administrative, procédure très strictement encadrée, prononcée par décret en Conseil des ministres, qui ne peut intervenir qu’en présence de dispositions législatives expresses. Actuellement celles-ci sont prévues par le Code de la sécurité intérieure aux articles L. 212-1 (groupes de combat et de milices privées) et L. 212-2 (associations de supporters). Une autre procédure de dissolution administrative a également été prévue par la loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015 créant un article 6-1 à la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence.
Les espèces ci-après rapportées font uniquement référence à l’article L. 212-1 du Code de la sécurité intérieure. Cet article, issu de la codification de l’article 1er de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et milices privées, prévoit diverses possibilités de dissolutions administratives des associations ou groupement de fait.
La dissolution fondée sur les discriminations à caractère racial et religieux (CSI, art. L. 212-1, 6°)
Cette dissolution est prononcée lorsque les membres de l’association ont provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence envers des personnes à raison de leur appartenance à une race ou une religion déterminée et propagé des idées ou des théories à caractère raciste ou antisémite.
Dans la première espèce, une association assurant la gestion d’une mosquée a été dissoute par décret du Président de la République le 4 mai 2017 sur le fondement notamment des dispositions du Code de la sécurité intérieure précitées (CE 26 janv. 2018, Assoc. Rahma de Torcy Marne-la-Vallée, n° 412312).
La note blanche versée au dossier et les transcriptions de prêche fournies en défense par cette association font état de ce que l'imam de cette mosquée et son adjoint, respectivement président et membre du conseil d'administration de l'association, prêchaient au sein de la mosquée, avant la fermeture de celle-ci par un arrêté préfectoral en date du 10 avril 2017, un islamisme radical, marqué par une forte hostilité à l'égard des chrétiens, des juifs et des chiites, prônant un rejet des valeurs et de certaines lois de la République.
Ils affichaient dans ces prêches leur soutien au djihad armé et à certains membres d'une cellule terroriste ayant fréquenté régulièrement la mosquée, poursuivis pour avoir perpétré un attentat contre un magasin d'alimentation casher en 2012.
La mosquée a également accueilli des conférenciers ayant tenu des propos de même nature.
Par ailleurs, l'imam de la mosquée, professeur de mathématiques dans divers établissements publics d'enseignement, a fait l'objet d'une procédure disciplinaire ayant justifié sa suspension, pour manquement à son devoir de réserve, au principe de neutralité et pour propos publics incompatibles avec les valeurs de la République.
Eu égard à ces éléments, qui caractérisent l'existence de discours et de faits provoquant à la discrimination, à la haine ou à la violence ou les justifiant, et en dépit d'attestations de fidèles de la mosquée réfutant l'existence de prêches à caractère radical, le Président de la République a fait une exacte application des dispositions du 6° de l'article L. 212-1 du Code de la sécurité intérieure en prononçant sa dissolution, sans incidence sur ce point étant la circonstance que cette dernière n'a pas été poursuivie dans le cadre de la procédure judiciaire engagée à l'encontre des membres de la cellule terroriste fréquentant la mosquée (V. CE, réf., 23 déc. 2016, n° 406012) et qu'elle aurait, avant sa dissolution, entretenu de bonnes relations avec les collectivités locales (V. également CE 17 nov. 2006, n° 296214 : dissolution d’une association justifiant et encourageant la discrimination, la haine et la violence raciales, notamment à l'encontre des personnes qui ne sont pas de couleur noire, et prônant également l'antisémitisme; CE 26 juill. 2016, n° 401379 : dissolution d’une association ayant des activités d'endoctrinement, de recrutement et d'acheminement de candidats vers le djihad armé).
La dissolution fondée sur les actes de terrorisme (CSI, art. L. 212-1, 7°)
Cette procédure permet au Gouvernement de prononcer la dissolution des associations qui se livrent, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l'étranger.
Dans la seconde affaire (CE 26 janv. 2018, Assoc. Fraternité musulmane Sanâbil-Les Epis, n° 407220), il s’agissait de la dissolution d'une association qui était en lien avec de nombreuses personnes fortement et activement engagées dans la pratique d'un islam radical qui, sous couvert d'une assistance morale, logistique ou de bienfaisance aux personnes détenues de confession musulmane et à leur famille, a développé, au travers de ses activités, un important réseau relationnel dans le cadre duquel elle manifeste de la sympathie et apporte son soutien à des individus en lien avec la mouvance terroriste se revendiquant de l'islamisme radical.
Il s’ensuit que le Président de la République a fait, en l’espèce, une exacte application des dispositions du 7° de l'article L. 212-1 du Code de la sécurité intérieure en prononçant la dissolution de cette association en raison de l'action menée par cette dernière en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l'étranger, étant sans incidence sur ce point la circonstance que ni celle-ci ni aucun de ses membres n'a fait l'objet de poursuites ou de condamnations pénales (V. CE, réf., 23 déc. 2016, n° 406012).
CE 26 janv. 2018, Assoc. Rahma de Torcy Marne-la-Vallée, n° 412312
CE 26 janv. 2018, Assoc. Fraternité musulmane Sanâbil-Les Epis, n° 407220
Références
■ CE, réf., 23 déc. 2016, n° 406012.
■ CE 17 nov. 2006, n° 296214 : Lebon ; AJDA 2006. 2256 ; D. 2006. 3009.
■ CE 26 juill. 2016, n° 401379.
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