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Droit de la famille
Divorce : Appréciation souveraine par les juges du fond de la disparité entre les niveaux de vie
Mots-clefs : Divorce, Prestation compensatoire (en capital), Logement familial, Divorce pour faute, Torts exclusifs
La cour de cassation rappelle que les juges du fond apprécient souverainement les conditions de fixation du montant de la prestation compensatoire, en se fondant sur un ensemble de faits caractérisant la disparité entre les niveaux de vie des anciens époux, prévus par l’article 271 du Code civil.
Le passage du statut d’époux à celui de divorcé peut s’accompagner d’un changement des « conditions de vie » de l’un des anciens conjoints. C’est pourquoi l’article 270 du Code civil prévoit le versement d’une « prestation forfaitaire » destinée à « compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée ».
Dans cette affaire, le divorce avait été prononcé aux torts exclusifs du mari, en raison « d’une violation grave ou renouvelé des devoirs et obligations du mariage » (v. art. 242 C. civ.). Cependant, le législateur n’a pas souhaité faire de la faute commise par le conjoint une variable d’ajustement de la prestation compensatoire. Les seuls éléments que les juges peuvent prendre en compte pour fixer le montant de cette prestation sont limitativement énoncés à l’article 271 du Code civil.
En l’espèce, constatant que l’époux disposait d’un patrimoine et de revenus confortables, que l’épouse avait cessé de travailler à la naissance du premier enfant, et que ses droits à la retraite seraient très faibles, la cour d’appel avait décidé de lui attribuer la propriété du logement familial, qui appartenait en propre au mari.
Ce dernier faisait valoir un argument original dans son pourvoi. Reconnaissant l’importance de ses revenus propres, il reprochait à l’arrêt d’avoir voulu « égaliser les fortunes au lieu d’indemniser [l’épouse] de la privation des fruits de son activité professionnelle », en ne cherchant pas à savoir si le travail qu’avait exercé son épouse aurait pu lui permettre de gagner une telle somme d’argent. En d’autres mots, le mari reprochait aux juges du fond d’avoir opéré une harmonisation par le haut.
La Cour de cassation rejette sans surprise le pourvoi. Elle dénonce la manœuvre qui consiste à remettre en cause les appréciations souveraines des juges du fond, qui ont constaté une disparité dans les conditions de vie au détriment de l’épouse, en raison du divorce. Comme la Haute cour l’avait déjà jugé dans d’autres décisions (v. par ex. Civ. 1re, 28 févr. 2006), « C’est dans l’exercice de leur pouvoir souverain que les juges du fond retiennent que la rupture du mariage créera dans les conditions de vie des époux une disparité qu’il convient de compenser par l’attribution d’une prestation ».
Références
« Capital destiné à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux divorcés et dont le paiement a lieu soit sous la forme du versement d’une somme d’argent, soit par l’attribution de biens en propriété ou d’un droit temporaire ou viager d’usage, d’habitation ou d’usufruit.
À titre exceptionnel, lorsque l’âge ou l’état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, le juge peut fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère. »
Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.
■ Civ. 1re, 28 févr. 2006, Bull. civ. I n° 112.
Article 270
« Le divorce met fin au devoir de secours entre époux.
L'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge.
Toutefois, le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si l'équité le commande, soit en considération des critères prévus à l'article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture. »
Article 271
« La prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.
A cet effet, le juge prend en considération notamment :
- la durée du mariage ;
- l'âge et l'état de santé des époux ;
- leur qualification et leur situation professionnelles ;
- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ;
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;
- leurs droits existants et prévisibles ;
- leur situation respective en matière de pensions de retraite. »
Article 272
« Dans le cadre de la fixation d'une prestation compensatoire, par le juge ou par les parties, ou à l'occasion d'une demande de révision, les parties fournissent au juge une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie. (…) »
Article 242
« Le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune. »
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