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Divorce : modalités de versement en capital de la prestation compensatoire et office du juge
Selon l’article 275, alinéa 1er, du Code civil, lorsque le débiteur de la prestation compensatoire n’est pas en mesure de verser le capital dans les conditions prévues par l’article 274, le juge fixe les modalités de paiement du capital, dans la limite de huit années, sous forme de versements périodiques indexés selon les règles applicables aux pensions alimentaires. Il appartient au juge qui fait application de ce texte de fixer le montant des versements périodiques.
Civ.1re, 1er juin 2023, n° 21-22.951 B
Pour que les conséquences du divorce se produisent une fois pour toutes dès son prononcé, il convient d’éviter que l’un des anciens époux soit tenu pendant de longues années de payer mensuellement à l’autre une somme d’argent. Le capital constitue donc aux yeux du législateur la plus opportune des modalités d’exécution de la prestation : son versement met immédiatement fin aux relations patrimoniales entre les anciens époux. Dès 1975, « (lorsque) la consistance des biens du débiteur de la prestation compensatoire le (permettait), celle-ci (prenait) la forme d’un capital » (C. civ., anc. art. 274). Mais en pratique, la rente demeurait la solution privilégiée par les tribunaux. Le législateur est donc devenu plus directif : depuis la loi du 30 juin 2000, le pouvoir du juge saisi d’une demande de prestation compensatoire est rigoureusement encadré : le principe est celui du versement de la prestation compensatoire en capital, dans les conditions prévues par l’article 274 [versement d’une somme d’argent, attribution de biens en propriété ou d’un droit temporaire ou viager d’usage, d’habitation ou d’usufruit]. Et lorsqu’elle prend la forme du versement d’une somme d’argent, celle-ci est en principe payable en un seul terme et dès que le divorce est définitif (C. civ., art. 270, al. 2). Ainsi la liberté du juge est-elle déjà restreinte quant au choix de la forme de la prestation : le capital constituant le principe, ce n’est que de façon exceptionnelle qu’il peut accorder une rente.
Toutefois, le débiteur ne dispose pas toujours des moyens suffisants lui permettant de verser de façon immédiate un capital compensant la disparité créée par la rupture. Ce peut être le cas s’il n’a pas le patrimoine suffisant, s’il n’a pas la possibilité d’emprunter, ou s’il a besoin de délais pour vendre des actifs et disposer de liquidités. Si le recours à la rente aurait pu être, dans ce cas, envisagé, le législateur a préféré opter pour l’échelonnement des versements : ainsi, lorsque le débiteur justifie ne pas être en mesure de verser le capital en un seul terme, le juge peut l’autoriser à régler le capital, qui doit être fixé, sous une forme fractionnée, « dans la limite de huit années, sous forme de versements périodiques indexés selon les règles applicables aux pensions alimentaires » (C. civ., art. 275, al. 1).
Dans ce cas qu’illustre l’arrêt rapporté, le juge a l’obligation de fixer le montant et la périodicité des versements. Cette règle est ici rappelée par la Haute juridiction pour casser, faute d’avoir fixé le montant exact des versements mensuels dus par le débiteur de la prestation, un arrêt rendu par la cour d’appel de Paris. (v. déjà, Civ. 1re, 6 févr. 2008, n° 07-14.142, censurant l’arrêt qui avait condamné un époux à verser une prestation compensatoire sous la forme d'un capital de 10 000 euros « payable sur un délai de huit ans au maximum »). En l’espèce, les juges parisiens avaient condamné l’époux à payer une somme de 160 000 euros à titre de prestation compensatoire, en prévoyant qu'il pourrait s'en acquitter par versements mensuels sur une durée maximum de quatre ans. En laissant ainsi indéterminé le montant des versements mensuels, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l’article 275 du Code civil.
Se trouve donc confirmée la règle précitée et en l’espèce ignorée par la juridiction du second degré : le juge doit fixer le montant des versements mensuels, et pas le seul capital à verser.
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