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[ 22 octobre 2009 ] Imprimer

Droit pénal spécial

Droit de réponse : inutile de répondre à tout

Mots-clefs : Communication audiovisuelle, Droit de réponse (conditions, refus d'insertion, contenu de la réponse)

Les dispositions relatives à l'exercice du droit de réponse en matière audiovisuelle n'exige pas de répliquer à l'ensemble des imputations diffamatoires diffusées.

La chambre criminelle revient, dans un arrêt du 8 octobre 2009, sur les conditions de mise en œuvre du droit de réponse en matière de communication audiovisuelle et, plus précisément, sur les exigences liées au contenu de la réponse proposée. En l'espèce, une association, mise en cause dans le journal télévisé du 24 janvier 2007, avait sollicité de la chaîne concernée l'insertion d'un texte au titre de l'exercice de son droit de réponse. S'exposant au refus de cette dernière, elle forma une demande en insertion forcée qui fut rejetée par les juges du fond au motif que la réponse proposée, qui ne répliquait pas à toutes les imputations formulées dans le reportage, n'était pas « en étroite corrélation avec l'information diffusée ». Cette décision est censurée par la chambre criminelle au visa de l'article 6 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle.

Si toute personne dispose, selon ce texte, d'un droit de réponse dans le cas où des imputations susceptibles de porter atteinte à son honneur ou à sa réputation (des imputations diffamatoires au sens de l'art. 29 de la loi du 29 juill. 1881 sur la liberté de la presse) auraient été diffusées dans le cadre d'une activité de communication audiovisuelle, la loi impose au demandeur de préciser celles sur lesquelles il souhaite répondre ainsi que la teneur de sa réponse (art. 6 préc., al. 2).

En l'espèce, la cour d'appel reprochait au demandeur de ne pas réfuter, point par point, les imputations diffamatoires diffusées dans le journal. La Cour de cassation rappelle les juges du fond à la lettre de l'article 6 de la loi de 1982 qui « n'exige pas une réplique à l'ensemble des imputations ». C'est donc au titulaire du droit de réponse qu'il appartient de déterminer les imputations auxquelles il souhaite réagir, celui-ci devant seulement, le cas échéant, indiquer dans sa réponse les passages contestés et les réfuter par une argumentation précise (v. l'art. 3 du décr. n° 87-246 du 6 avr. 1987 relatif à l'exercice du droit de réponse dans les services de communication audiovisuelle).

Crim. 8 octobre 2009

 

Références

Droit de réponse

« Prérogative reconnue à une personne nommée ou désignée dans une publication de faire connaître son point de vue, ses explications ou sa contestation sur les circonstances et conditions dans lesquelles elle l’a été. Ce droit de réponse s’impose au directeur de la publication qui doit l’insérer dans les trois jours de la réception de la réponse.

Cette insertion doit être faite à la même place et en mêmes caractères que l’article qui l’aura provoquée et sans aucune intercalation. »

Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.

Article 6 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle

« I. Toute personne physique ou morale dispose d'un droit de réponse dans le cas où les imputations susceptibles de porter atteinte à son honneur ou à sa réputation auraient été diffusées dans le cadre d'une activité de communication audiovisuelle.

Le demandeur doit préciser les imputations sur lesquelles il souhaite répondre et la teneur de la réponse qu'il se propose d'y faire.

La réponse doit être diffusée dans des conditions techniques équivalentes à celles dans lesquelles a été diffusé le message contenant l'imputation invoquée.

Elle doit également être diffusée de manière que lui soit assurée une audience équivalente à celle du message précité.

La demande d'exercice du droit de réponse doit être présentée dans le délai de trois mois suivant celui de la diffusion du message contenant l'imputation qui la fonde. Toutefois, lorsque, à l'occasion de l'exercice de poursuites pénales, ont été diffusées dans le cadre d'une activité de communication audiovisuelle des imputations susceptibles de porter atteinte à l'honneur ou à la réputation d'une personne physique ou morale, ce délai est réouvert à son profit pour la même durée à compter du jour où la décision de non-lieu dont elle fait l'objet est intervenue ou celle de relaxe ou d'acquittement la mettant expressément ou non hors de cause est devenue définitive.

En cas de refus ou de silence gardé sur la demande par son destinataire dans les huit jours suivant celui de sa réception, le demandeur peut saisir le président du tribunal de grande instance, statuant en matière de référés, par la mise en cause de la personne visée au neuvième alinéa du présent article [*action en justice*].

Le président du tribunal peut ordonner sous astreinte la diffusion de la réponse ; il peut déclarer son ordonnance exécutoire sur minute nonobstant appel.

Pendant toute campagne électorale, lorsqu'un candidat est mis en cause, le délai de huit jours prévu au sixième alinéa est réduit à vingt-quatre heures.

Pour l'application des dispositions du présent article, dans toute personne morale qui assure, à quelque titre et sous quelque forme que ce soit, un service de communication audiovisuelle, il doit être désigné un responsable chargé d'assurer l'exécution des obligations se rattachant à l'exercice du droit de réponse.

Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article.

Il précise notamment les modalités et le délai de conservation des documents audiovisuels nécessaires à l'administration de la preuve des imputations visées au premier alinéa du présent article, sans préjudice de l'application des dispositions de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives.

Les dispositions du présent article sont applicables à tout service de communication mis à la disposition du public sous forme de phonogrammes ou de vidéogrammes paraissant à intervalles réguliers.

II. Les associations remplissant les conditions fixées par l'article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse peuvent également exercer le droit de réponse prévu par le présent article dans le cas où des imputations susceptibles de porter atteinte à l'honneur ou à la réputation d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine, de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée auraient été diffusées dans le cadre d'une activité de communication audiovisuelle.

Toutefois, quand les imputations concerneront des personnes considérées individuellement, l'association ne pourra exercer le droit de réponse que si elle justifie avoir reçu leur accord.

Aucune association ne pourra requérir la diffusion d'une réponse en application du présent article dès lors qu'aura été diffusée une réponse à la demande d'une des associations remplissant les conditions prévues par l'article 48-1 précité. »

Article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse

« Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l'identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.

Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure. »

Article 3 du décret n° 87-246 du 6 avril 1987

« La demande indique les références du message ainsi que les circonstances dans lesquelles le message a été mis à la disposition du public. Elle contient la mention des passages contestés et la teneur de la réponse souhaitée.

Pour les services de vidéographie, le demandeur peut, en outre, réclamer la correction ou la suppression du message pendant la période au cours de laquelle le message est encore accessible au public. »

Pour aller plus loin :

TGI Nanterre, réf., 6 nov. 1995, BICC 1996. 351 ; D. 1997. Somm. 87, obs. Hassler et Lapp.

E. Derieux, Droit des médias, 5e éd., LGDJ, 2008, n° 1604.

E. Derieux, Droit des médias, 3e éd., Dalloz , coll. « Connaissance du droit », 2005, p. 101 et s.

 

Auteur :S. L.

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