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Droit administratif général
Droit d’usage des eaux surabondantes d’une fontaine publique
Mots-clefs : Compétence, Tribunal des conflits, Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction, Compétence administrative, Eaux alimentant une fontaine publique, Domaine public, Propriété privée
Le juge administratif est compétent pour connaître d’un litige relatif au rétablissement de l’écoulement vers une propriété privée des eaux surabondantes d’une fontaine publique.
Depuis la fin des années 1930, les propriétaires d’une ferme familiale bénéficiaient d’une alimentation en eau grâce au trop-plein d’une fontaine-lavoir de la commune de Rambaud en contrepartie du passage d’une voie de circulation sur leur propriété. La commune ayant décidé de déplacer cette fontaine publique, les propriétaires ont constaté une baisse du débit d’eau et l’on assignée devant le tribunal d’instance en vue de faire constater qu’ils bénéficiaient d’un droit d’eau acquis par prescription trentenaire en application des articles 640 et 642 du Code civil.
Le juge judiciaire s’est d’abord déclaré incompétent en jugeant notamment que les eaux alimentant les fontaines publiques, ainsi que celles qui s’en déversent, sont elles-mêmes publiques et dès lors inaliénables. Le tribunal administratif, ensuite saisi, a demandé au Tribunal des conflits de statuer sur la question de compétence. Celui-ci s’est prononcé sur la compétence du juge administratif au motif que les eaux de source alimentant la fontaine publique et les eaux surabondantes qui s’écoulent de cette fontaine appartiennent au domaine public de la commune. Et par ailleurs, la fontaine municipale et le caniveau situé le long de la voie publique qui assure l’écoulement du trop-plein de la fontaine et qui constitue un accessoire de la voie publique appartiennent également au domaine public municipal. Ainsi le litige opposant la commune et les propriétaires, qui ne disposaient que d’une autorisation précaire et révocable relativement à l’usage de ces eaux, relève de la compétence administrative.
Par cette décision, le Tribunal des conflits confirme les jurisprudences des juges judiciaires et administratifs en ce domaine. En effet, la Cour de cassation a jugé que ces eaux appartiennent au domaine public et sont en conséquence « inaliénables et imprescriptibles » (Civ. 20 août 1861, Cne de Tourvès c/ Épx Natte ; Civ. 30 avr. 1889, Cne d’Alet c/ cie générale des eaux minérales d’Alet). Pour sa part, le Conseil d’État estime que « les eaux captées par une ville afin d’assurer l’alimentation en eau de sa population, ainsi que les ouvrages destinés à les recueillir, constituent, en raison de leur affectation et de leurs aménagements, des éléments du domaine public communal », alors que « les eaux susceptibles d’être recueillies par les ouvrages en cause et non encore captées ne présentent pas ce caractère » (CE 16 nov. 1962, Ville de Grenoble). Par ailleurs, le Conseil d’État a aussi précisé sa jurisprudence en décidant de la précarité et de la révocabilité de l’autorisation accordée à un particulier de capter l’eau d’une fontaine, dépendance du domaine public en raison de son aménagement spécial. Cette autorisation expose son bénéficiaire à supporter sans indemnité la charge résultant pour lui de travaux entrepris conformément à la destination du domaine (CE 23 juin 1976, Cne de Plabennecc/ Pelleau).
T. confl. 18 mars 2013, Cts O. c/ Cne de Rambaud, n° 3887
Références
■ Code civil
« Les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué.
Le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement.
Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur. »
« Celui qui a une source dans son fonds peut toujours user des eaux à sa volonté dans les limites et pour les besoins de son héritage.
Le propriétaire d'une source ne peut plus en user au préjudice des propriétaires des fonds inférieurs qui, depuis plus de trente ans, ont fait et terminé, sur le fonds où jaillit la source, des ouvrages apparents et permanents destinés à utiliser les eaux ou à en faciliter le passage dans leur propriété.
Il ne peut pas non plus en user de manière à enlever aux habitants d'une commune, village ou hameau, l'eau qui leur est nécessaire ; mais si les habitants n'en n'ont pas acquis ou prescrit l'usage, le propriétaire peut réclamer une indemnité, laquelle est réglée par experts. »
■ Civ. 20 août 1861, Cne de Tourvès c/ Épx Natte, DP 1861 1. 585.
■ Civ. 30 avr. 1889, Cne d’Alet c/ cie générale des eaux minérales d’Alet, DP 1889 1. 373.
■ CE 16 nov. 1962, Ville de Grenoble, Lebon 611.
■ CE 23 juin 1976, Cne de Plabennecc/ Pelleau, req. n° 90774, Lebon T. 917.
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