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Droit du travail - relations individuelles
Effets d’une démission sans réserve
Mots-clefs : Prise d’acte, Résiliation judiciaire, Démission
La démission sans réserve rendant sans objet la résiliation judiciaire antérieurement sollicitée, un salarié pourra obtenir réparation du préjudice résultant de cette démission à la condition que les griefs invoqués au soutien de sa demande initiale soient justifiés.
Un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur devant la juridiction prud’homale. Débouté de sa demande en première instance, il interjette appel. Quelques mois après, alors que le juge d’appel ne s’est pas encore prononcé, il démissionne sans réserve.
Dans l’affaire rapportée, la question soulevée était de déterminer quels seraient les effets de cette démission sans réserve sur la demande initiale de résiliation judiciaire.
La résiliation judiciaire est la rupture du contrat de travail prononcée par le juge, sur le fondement des articles 1184 du Code civil — qui énonce que la clause résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques lorsqu’une des deux parties ne respecte plus ses engagements —, et L. 1231-1 du Code du travail — qui prévoit la possibilité pour l’employeur ou le salarié de mettre fin au contrat de travail.
Devant se prononcer sur les relations entre la résiliation judiciaire du contrat de travail et la démission, la chambre sociale statue ultra petita et envisage l’hypothèse où la démission aurait été faite avec réserve et qu’elle aurait été requalifiée en prise d'acte à la demande du salarié.
La Cour de cassation a déjà eu l’occasion de préciser dans plusieurs arrêts les relations entre la démission et la prise d’acte lorsque le salarié saisit a posteriori le conseil des prud’hommes pour obtenir la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur.
La prise d’acte est la reconnaissance par le juge que la démission ne résulte pas uniquement de la volonté du salarié, mais aussi du comportement de l’employeur (Soc. 25 juin 2003 ; Soc. 9 mai 2007 : « lorsqu'un salarié démissionne en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d'acte et produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient soit, dans le cas contraire, d'une démission »). Pour requalifier la démission en une prise d’acte, le juge doit donc prendre en considération les manquements de l’employeur et apprécier le bien-fondé des griefs évoqués par le salarié lors de la demande de résiliation judiciaire, bien qu’elle soit devenue sans objet, ou lors de la demande de prise d’acte de la rupture. Le contrat est, dans ces deux cas, rompu unilatéralement par le salarié.
En l’espèce, la chambre sociale considère que la démission du requérant rend sans objet la demande de résiliation judiciaire, puisque le contrat de travail est, du fait de la démission, rompu. La démission sans réserve lui permet toutefois d’obtenir la réparation du préjudice lié aux griefs, et non la transformation de la démission en prise d’acte de la rupture.
Soc. 30 avr. 2014, n°13-10.772
Références
■ Soc 25 juin 2003, 2 arrêts, n°01-43.578, 01-42.335, D. 2003. 2396, et les obs., note J. Pélissier ; Dr. soc. 2003. 817, note G. Couturier et J.-E. Ray.
■ Soc. 9 mai 2007, 4 arrêts, n°05-40.315, 05-41.324 et 05-41.325, 05-40.518, 05-42.301, D. 2007. 3033, obs. E. Dockès, F. Fouvet, C. Géniaut et A. Jeammaud ; RDT 2007. 452, obs. G. Auzero ; D. 2007. 1495, obs. J. Cortot.
« La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.
La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances. »
■ Article L. 1231-1 du Code du travail
« Le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, ou d'un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre.
Ces dispositions ne sont pas applicables pendant la période d'essai. »
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