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[ 11 février 2010 ] Imprimer

Droit de la responsabilité civile

Enfant né polyhandicapé : réparation de la perte d'une chance

Mots-clefs : Handicap, Naissance, Perte d'une chance, Fautes (lien de causalité), Responsabilité médicale, Rapports d'expertise (dénaturation, non)

Le médecin, l'obstétricien et la clinique employant la sage-femme doivent être déclarés responsables in solidum de la perte de chance subie par un enfant polyhandicapé de voir limiter son infirmité cérébrale, dès lors que les rapports d'expertise montrent que les fautes médicales commises au cours de la grossesse et pendant l'accouchement ont été au moins pour partie à l'origine du handicap, peu important que l'origine première du handicap soit affectée d'un degré d'incertitude.

Par un arrêt du 28 janvier 2010, la première chambre civile accueille favorablement l'action en indemnisation intentée par les parents d'un enfant souffrant, depuis sa naissance, d'un polyhandicap sévère lié à des atteintes neurologiques, à l'encontre du médecin généraliste de la mère, de l'obstétricien ayant suivi la grossesse et de la clinique employant la sage-femme ayant réalisé l'accouchement. La Haute Cour rejette les moyens qui contestaient l'établissement du lien de causalité entre les fautes commises et l'état de l'enfant, et invoquaient, par ailleurs, une dénaturation des rapports d'expertise ; il était, en effet, établi en l'espèce que la mère souffrait, avant d'être enceinte, d'une affection qui était responsable, dans une certaine mesure, des déficits de l'enfant et qui ne pouvait être décelée au moment de la grossesse.

La Cour de cassation rejette le grief de dénaturation (pour un ex. d'admission, v. Civ. 2e, 21 janv. 1966) et refuse, par ailleurs, de censurer les juges du fond pour avoir relevé l'existence d'un rapport de causalité entre les différentes fautes et le dommage. La condamnation in solidum des différents intervenants, en ce qu'ils ont tous contribué à la survenance du dommage, est, en l'espèce, justifiée, peu important que l'origine première du handicap soit incertaine. Précisément, pour tenir compte de cette incertitude, la réparation du préjudice se fait par référence à la notion de perte d'une chance. Ainsi, s'il n'est pas possible, compte tenu de l'affection initiale de la mère, de supposer que, sans les fautes médicales, l'enfant ne serait pas né handicapé, il faut cependant considérer que la chance de limiter ce handicap valait quelque chose, ce dont l'enfant a été privé.

Civ. 1re, 28 janv. 2010

 

Références

Obligation « in solidum »

« Obligations de plusieurs personnes tenues chacune pour le tout envers le créancier, alors qu’il n’existe entre elles aucun lien de représentation. L’obligation in solidum créée par la jurisprudence, a permis en particulier à la victime d’un dommage d’obtenir réparation de l’intégralité du préjudice en poursuivant l’un quelconque des coauteurs; sous cet aspect elle constitue une garantie de solvabilité. »

Perte d’une chance

« Préjudice résultant de la disparition, due au fait d’un tiers, de la probabilité d’un événement favorable et donnant lieu à une réparation partielle, mesurée sur la valeur de la chance perdue déterminée par un calcul de probabilités. »

Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.

Civ. 2e, 21 janv. 1966, Bull. civ. II, n° 97.

 

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