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[ 19 octobre 2016 ] Imprimer

Libertés fondamentales - droits de l'homme

État d’urgence et assignation à résidence : absence d’atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’aller et venir et à la liberté personnelle

Mots-clefs : État d’urgence, Référé, Assignation à résidence, Liberté d’aller et venir, Liberté personnelle

Les juges des référés du Conseil d’État refusent de faire droit à une demande de suspension d’une assignation à résidence.

La loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015 prorogeant l'application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence et renforçant l'efficacité de ses dispositions modifie notamment l’article 6 de la loi du 3 avril 1955. Cet article permet désormais au ministre de l’intérieur de prononcer une assignation à résidence à l’égard d’une personne pour laquelle «  il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics » (avec la loi de 2015, cette expression se substitue à « dont l’activité s’avère dangereuse »). 

Le ministre de l’intérieur a notamment la possibilité d’astreindre les personnes assignées à résidence à demeurer dans leur lieu d’habitation pendant une plage horaire fixée dans la limite de douze heures par vingt-quatre heures ; de prescrire à la personne assignée à résidence l’obligation de se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie (V. pour une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie familiale concernant les modalités d’une assignation à résidence : CE, ord., 6 janv. 2016, n° 395622), ainsi que de remettre son passeport ou tout document justifiant de son identité, d’interdire à la personne assignées de se trouver en relation, directement ou indirectement, avec certaines personnes. La personne peut également être placée sous surveillance électronique libre.

En l’espèce, le ministre de l’intérieur avait assigné à résidence un homme sur le territoire de la commune de Vienne avec obligation de se présenter au commissariat de police de cette ville trois fois par jour et de demander un sauf-conduit au préfet en cas de déplacement en dehors de son lieu d’assignation à résidence. 

Cet homme demandait la suspension de l’exécution de son assignation à résidence (CJA, art. L. 521-2), la chambre des référés du tribunal administratif ayant rejeté sa demande, il saisit les juges des référés du Conseil d’État (V. CJA, art. L. 511-2, al. 3) qui confirment l’ordonnance rendue par le tribunal administratif.

Dans cette affaire, l’assigné à résidence avait été condamné en 2012 par le tribunal correctionnel à quatre années d’emprisonnement dont une avec sursis pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Il avait participé à la planification d’attentats en France avec un membre actif de l’organisation terroriste Al Qaida au Magreb Islamique. Depuis juin 2013, il résidait au Brésil, pays duquel il a été expulsé d’urgence par les autorités brésiliennes. Le ministre de l’intérieur français avait donc estimé qu’il existait des raisons sérieuses de penser que cette homme constituait une menace pour l’ordre et la sécurité publics et l’a donc assigné à résidence au retour de son expulsion du Brésil en juillet 2016.

Pour sa défense, cet homme faisait notamment valoir l’ancienneté des faits reprochés (2008-2009). Il soutenait qu’il avait par la suite exercé les fonctions d’enseignant-chercheur dans une université brésilienne et qu’aucun acte similaire à celui pour lesquels il a été condamné ne pouvait lui être reproché. 

Toutefois, les juges des référés du Conseil d’État rappellent la particulière gravité des faits pour lequel cet homme a été condamné (participation à la planification, préparation et financement d’actions terroristes). La réalisation de ses projets d’attentats n’ont pas eu lieu en raison de son arrestation, et son expulsion du Brésil a permis aux autorités françaises de considérer qu’il existait un risque pour la sécurité dans ce pays.

Il s’ensuit que le ministre de l’intérieur n’a pas porté pas une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’aller et venir et à la liberté personnelle de cet homme en décidant de l’assigner à résidence.

CE, ord., 7 oct. 2016, n° 403552

Références

■ CE, ord., 6 janv. 2016, n° 395622, Dalloz Actu Étudiant, 11 janv. 2016 ; AJDA 2016. 11.

■ V. Conseil d’État, Mesures prises au titre de l’état d’urgence (récapitulatif au 18 juill. 2016).

 

Auteur :C. G.

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