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[ 7 novembre 2022 ] Imprimer

Libertés fondamentales - droits de l'homme

Euthanasie : quand les proches s’en mêlent

Dans une affaire concernant la Belgique, la Cour européenne s’est prononcée pour la première fois, à la demande du fils d’une femme décédée, sur la conformité à la Convention d’une euthanasie qui a été pratiquée. Par son arrêt, la Cour livre de précieuses indications dans la perspective des travaux de la Convention citoyenne sur la fin de vie.

CEDH 4 oct. 2022, Mortier c/ Belgique, n° 78017/17

Un regard rétrospectif sur les 20 dernières années de jurisprudence européenne nous enseigne que la CEDH refuse de reconnaître un droit à l’euthanasie ou au suicide assisté. En effet, elle affirme qu’il est impossible d’interpréter l’article 2 de la Convention « comme conférant un droit diamétralement opposé, à savoir un droit à mourir » que ce soit de la main d’un tiers ou avec l’assistance d’une autorité publique (CEDH 29 avr. 2022, Pretty c/ Royaume-Uni, n° 2346/02). En revanche, les juges européens esquissent, à la charge des États, une « obligation positive » de prendre les mesures nécessaires permettant un suicide digne et la consécration d'un droit au suicide assisté, non pas sur le fondement du droit à la vie mais sur le droit au respect de la vie privée (CEDH 20 janv. 2011, Haas c/ Suisse, n° 31322/07). Enfin, la CEDH impose que le suicide assisté, dès lors qu’il est admis, soit strictement et précisément encadré par la loi. Les autorités doivent définir avec clarté l'ampleur de ce droit (CEDH 14 mai 2013, Gross c/ Suisse, n° 67810/10).

Dans l’ensemble du contentieux soumis à la CEDH jusqu’à présent, les requérants revendiquaient, dans le cadre de maladies ou de pathologies graves et incurables (v. aussi CEDH 19 juill. 2012, Koch c/ Allemagne, n° 497/09, § 70) ou en bonne santé (arrêt Gross, préc.) un droit à mourir dans la dignité. L’arrêt rendu le 4 octobre dernier s’inscrit dans une perspective diamétralement opposée : la contestation de l’euthanasie à l’aune des principes conventionnels. Comme le souligne la Cour, « Il s’agit en effet de la première affaire dans laquelle la Cour est amenée à examiner la conformité à la Convention d’une euthanasie qui a été pratiquée. »

En l’espèce, le requérant est le fils d’une femme, diagnostiquée comme étant atteinte de dépression chronique depuis environ quarante ans et suivie à ce titre par un psychiatre depuis plusieurs années. Elle fut adressée à un professeur de médecine qui accepta, au terme d’un entretien, de devenir son médecin traitant dans le cadre de la loi belge relative à l’euthanasie du 28 mai 2002 (modifiée par une L. du 28 févr. 2014 étendant l’euthanasie aux mineurs). Il l’orienta alors vers une psychiatre, pour agir en tant que médecin consultant au sens de la loi de 2002. Plusieurs suivis eurent lieu avec différents praticiens de septembre 2011 à avril 2012 au cours desquels d’une part, elle réitéra sa volonté être euthanasiée et de ne pas vouloir prévenir ses enfants et d’autre part, fut établit le caractère incurable de sa maladie et l’existence d’une souffrance psychique extrême, insupportable. Le 19 avril 2012, le professeur pratiqua l’acte d’euthanasie. Le lendemain le requérant en fut informé par l’hôpital. La Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie (« la Commission ») reçut le document d’enregistrement d’euthanasie rempli par le professeur ayant pratiqué et celle-ci conclut que l’euthanasie avait été effectuée selon les conditions et la procédure prévues par la loi. Le requérant, arguant qu’il n’avait pas eu de possibilité de dire adieu à sa mère et qu’il se trouvait dès lors dans un état de deuil pathologique, demanda alors, par le truchement de son psychiatre, en tant que professionnel de santé officiel, à accéder au dossier médical de sa mère. Ce dernier remarqua notamment que la déclaration de l’euthanasie ne se trouvait pas dans le dossier. Le requérant demanda alors à la Commission une copie du document d’enregistrement de l’euthanasie. D’après le requérant, cette demande demeura sans réponse. Après une nouvelle demande, la Commission refusa de fournir une copie du document au motif que la loi le lui interdisait. Le 4 avril 2014, le requérant déposa une plainte contre X auprès du procureur du Roi concernant l’euthanasie de sa mère. Le 8 mai 2017, le requérant fut informé que sa plainte avait été classée sans suite en raison de l’insuffisance de preuves.

À la suite de cette décision, il saisit la CEDH en novembre 2017 et la requête fut communiquée au Gouvernement le 3 décembre 2018. Contestant l’euthanasie de sa mère pratiquée à son insu et à celui de sa sœur, le requérant soulève des griefs tirés des articles 2, 8 et 13 de la Convention. Avant que la Cour ne rende sa décision, une seconde enquête pénale fut diligentée. En 2 mai 2019, un juge d’instruction fut désigné. De nouveau, l’enquête conclut que l’euthanasie de la mère du requérant avait respecté les conditions de fond et de forme prescrites par la loi.

Deux questions essentielles étaient posées à la Cour européenne :

L’euthanasie est-elle une pratique compatible avec l’article 2 de la Convention ?

La pratique de l’euthanasie emporte-t-elle une violation au droit au respect de la vie privée des proches ?

■ La compatibilité de l’euthanasie au regard du droit à la vie

La cour de Strasbourg admet à titre préalable que le droit à la vie consacré par l’article 2 de la Convention ne saurait être interprété comme interdisant en soi la dépénalisation conditionnelle de l’euthanasie. Néanmoins, pour être compatible avec cet article, la dépénalisation de l’euthanasie doit être encadrée par la mise en place de garanties adéquates et suffisantes visant à éviter les abus et, ainsi, à assurer le respect du droit à la vie.

Compatibilité du principe. Contrairement à ce que soutenait le requérant, la Cour reconnaît que l’article 2 de la Convention ne prohibe pas l’euthanasie. Si cette disposition impose aux États une obligation positive substantielle de protéger le droit à la vie moyennant des mesures positives, une telle obligation ne rend pas ipso facto l’adoption d’une législation autorisant l’euthanasie contraire à l’article 2. Selon la Cour « le droit à la vie consacré par cette disposition ne saurait être interprété comme interdisant en soi la dépénalisation conditionnelle de l’euthanasie ».

Pour parvenir à une telle conclusion, elle examine l’article 2 à la lumière de l’article 8 et du droit au respect de la vie privée ainsi que de « la notion d’autonomie personnelle dans la mesure où le droit d’un individu de décider de quelle manière et à quel moment sa vie doit prendre fin est l’un des aspects du droit au respect de sa vie privée » (arrêt Haas, préc.). L’interprétation du droit à la vie est ici réalisée à la lumière de la dignité et de la liberté de l’homme, lesquels « sont l’essence même de la Convention » (CEDH 11 juill. 2002, Goodwin c/ Royaume-Uni, n° 28957/95). La Cour rappelle « ne pas pouvoir exclure que le fait d’empêcher par la loi une personne d’exercer son choix d’éviter ce qui, à ses yeux, constituera une fin de vie indigne et pénible, représente une atteinte au droit de l’intéressée au respect de sa vie privée, au sens de l’article 8 § 1 de la Convention » (arrêt Pretty, préc.). Or justement, la loi belge a pour finalité de donner à une personne le libre choix d’éviter ce qui constituerait, à ses yeux, une fin de vie indigne et pénible.

Si la Cour reconnaît que l’article 2 de la Convention ne prohibe pas la pratique de l’euthanasie, elle soumet néanmoins sa compatibilité à l’existence « de garanties adéquates et suffisantes visant à éviter les abus ».

La compatibilité de sa mise en œuvre conditionnée. Les garanties exigées par la Cour ressortent d’une part, du cadre légal fixé par l’État autorisant la pratique de l’euthanasie et, d’autre part, de l’existence de procédures de contrôle. Dans sa décision, elle examine successivement le cadre légal, le respect de son application en l’espèce et, enfin, l’effectivité de l’enquête sur les circonstances de l’euthanasie. Seul ce dernier point entraînera la condamnation de la Belgique.

La conformité du cadre législatif belge à l’article 2 et le respect de celui-ci. S’agissant du cadre prévu par la loi, lequel, selon le requérant, ne fournit pas une garantie effective pour protéger le droit à la vie des personnes vulnérables, la Cour examine les griefs du requérant sur le terrain des obligations positives de l’État. Elle admet que les dispositions de la loi belge constituent en principe un cadre législatif propre à assurer la protection du droit à la vie des patients. Le texte tel qu’il était en vigueur à l’époque des faits offrait une garantie effective pour protéger le droit à la vie des personnes vulnérables. Pour parvenir à une telle conclusion, la CEDH reconnaît préalablement que « Le domaine de la fin de vie, et en particulier l’euthanasie, pose des questions juridiques, sociales, morales et éthiques complexes. » Il n’existe pas de consensus au sein des États parties à la Convention. Ils disposent dès lors d’une marge d’appréciation sur la façon de ménager un équilibre entre la protection du droit à la vie du patient et celle du droit au respect de sa vie privée et de son autonomie personnelle.

S’agissant de l’examen des garanties offertes par la loi, la question du consentement, libre et éclairé du patient fait l’objet d’un examen rigoureux. Cet aspect est d’autant plus important, souligne la Cour, qu’en l’espèce, il s’agissait d’une demande d’euthanasie formulée en raison de souffrances psychiques, et non pas physiques, dans le cadre desquelles le décès ne serait manifestement pas intervenu à brève échéance. Dans de telles circonstances, la Cour estime que la loi doit prévoir des garanties renforcées entourant le processus décisionnel relatif à l’euthanasie. Reprenant l’ensemble des garanties matérielles et procédurales prévues par la législation, et soulignant les garanties supplémentaires prévues concernant des souffrances psychiques où le décès n’interviendra pas à court terme, ainsi que l’exigence d’indépendance des différents médecins consultés, tant à l’égard du patient qu’à l’égard du médecin traitant, elle estime que « le cadre législatif relatif aux actes préalables à l’euthanasie mis en place par le législateur belge permet d’assurer que la décision d’un individu de mettre fin à ses jours a été prise librement et en toute connaissance de cause ».

Par ailleurs, en l’espèce, la CEDH considère qu’il ne ressort pas des éléments dont elle dispose que l’acte d’euthanasie de la mère du requérant pratiqué conformément au cadre légal établi ait été effectué en méconnaissance des exigences de l’article 2 de la Convention. Elle rejette ainsi les griefs du requérant quant à la situation médicale qui ne correspondrait pas aux cas prévus par la loi ou au défaut d’indépendance des médecins qui sont intervenus.

Procédure de contrôle : l’existence d’une enquête effective. Classiquement, la CEDH raisonne ici dans le cadre de l’obligation positive procédurale qui impose de veiller à ce que soit en place, pour les cas de décès, un système judiciaire effectif et indépendant. Elle met à la charge de l’État une obligation de mener une enquête efficace. Elle étend cette obligation « dans les cas où une euthanasie qui a été pratiquée fait l’objet d’une dénonciation ou d’une plainte par un proche du défunt, indiquant de manière crédible l’existence de circonstances suspectes ». L’existence d’une enquête ne permet pas à elle seule de conclure que l’État s’est acquitté de son obligation procédurale : il faut que l’enquête permette d’obtenir un résultat, c’est-à-dire qu’elle soit adéquate et effective : elle doit être complète et approfondie, être menée de manière impartiale et transparente avec célérité et diligence.

En l’espèce, deux contrôles ont eu lieu pour vérifier si l’euthanasie de la mère du requérant avait été pratiquée conformément à la loi : le contrôle automatique pour chaque euthanasie pratiquée, prévu par la législation belge, effectué par une « Commission », puis l’enquête pénale ouverte à la suite de la plainte déposée par le requérant. Examinant successivement ces contrôles, le juge européen estime impossible de considérer qu’une enquête effective a été conduite, d’une part en raison du manque d’indépendance de la Commission, d’autre part en raison de la durée de l’enquête pénale menée, ce qui entraîne une violation de l’article 2 de la Convention.

S’agissant d’abord du contrôle effectué par la Commission, la CEDH sanctionne la Belgique pour défaut d’indépendance en raison de sa composition. Si les membres de la Commission sont proposés par une assemblée législative (docteurs en médecine, de professeurs de droit ainsi que de professionnels issus des milieux chargés de la problématique des patients atteints d’une maladie incurable), ce qui constitue une garantie de son indépendance, la législation belge n’empêche pas le médecin qui a pratiqué l’euthanasie de siéger dans la Commission et de voter sur la question de savoir si ses propres actes étaient compatibles avec les exigences matérielles et procédurales du droit interne. Dès lors, même si ce membre peut prendre la décision de garder le silence (à sa discrétion, sic), et que la commission se prononce sur le volet anonyme du rapport (afin de préserver le secret médical), cette pratique est insuffisante pour assurer l’indépendance de la Commission. En l’espèce, le professeur qui avait réalisé l’acte faisait partie de la Commission. La Cour propose à la Belgique une évolution de son cadre législatif : « un tel écueil pouvait être évité, et la confidentialité sauvegardée, par exemple si la Commission était composée d’un nombre de membres plus important que le nombre de ceux qui siègent pour l’examen de chaque affaire. Cela permettrait d’assurer qu’un membre de la Commission qui a pratiqué une euthanasie ne puisse pas siéger lorsque la Commission contrôle l’euthanasie en question ». À bon entendeur…

S’agissant ensuite de l’enquête pénale, c’est le défaut de diligence qui est sanctionné. L’obligation d’offrir aux victimes d’une atteinte au droit à la vie une voie d’action au pénal est imposée par la Cour en cas de recours à la force meurtrière (ex. : CEDH 27 sept. 1995, Mc Cann et autres c/ Royaume-Uni, n° 18984/91), ou d’atteintes involontaires à la vie en matière de catastrophes (CEDH 18 juin 2002, Öneryldiz c/ Turquie, n° 48939/99 ; 30 nov. 2004, gr. ch.). Dans le cadre du décès d’un individu se trouvant sous la responsabilité de professionnels de la santé, et notamment dans le contexte spécifique des négligences médicales, l’accès à une procédure en responsabilité « civile » suffit en principe (CEDH 17 janv. 2002, Calvelli et Ciglio c/ Italie, n° 32967/96 ; CEDH, 8 juill. 2004, Vo c/ France, n° 53924/00). Cette approche est reconduite ici. Selon la Cour, une telle obligation ne s’impose pas en principe quand la mort est le résultat d’une euthanasie pratiquée dans le cadre d’une législation qui autorise l’euthanasie. Par exception, le recours au droit pénal s’impose lorsqu’il y a une dénonciation ou une plainte par un proche du défunt indiquant l’existence de circonstances suspectes. En l’espèce, le fils ayant déposé une plainte alléguait de manière plausible que la loi relative à l’euthanasie n’avait pas été respectée en l’espèce, les autorités belges étaient dans l’obligation de mener une enquête pénale, ce qu’elles ont fait.

Dans cette affaire, lors de la première enquête pénale, menée par le procureur du Roi à la suite de la plainte déposée par le requérant, celle-ci a duré environ trois ans et un mois alors qu’aucun acte d’enquête ne semble avoir été entrepris. La seconde enquête pénale menée sous la direction d’un juge d’instruction après la communication de la requête au Gouvernement par la Cour a, quant à elle, duré environ un an et sept mois. Si la seconde enquête a été approfondie (nomination d’un expert médecin qui a examiné le dossier médical de la mère et présentation de ses conclusions dans un rapport d’expertise détaillé ; audition du professeur ayant pratiqué l’euthanasie), prise dans son ensemble, et eu égard à l’absence de devoirs entrepris au cours de la première enquête, elle n’a pas satisfait à l’exigence de promptitude requise par l’article 2 de la Convention. En revanche, la Cour rappelle que cette obligation ne se confond pas avec le droit de faire condamner pénalement des tiers qui, ne saurait être admis en soi (CEDH 12 févr. 2004, Perez c/ France, n° 47287/99). En l’espèce le fait que l’instruction pénale ait abouti à un non-lieu ne permet pas en soi de conclure que la procédure pénale concernant l’euthanasie de la mère du requérant ne répondait pas aux exigences d’effectivité.

■ L’euthanasie et le droit au respect de la vie privée des proches

Le requérant dénonce également une violation de son droit au respect de sa vie privée et familiale (art. 8) sous deux angles distincts.

En premier lieu, il considère que son droit au respect de la vie privée et familiale a été enfreint du seul fait que sa mère a été euthanasiée, l’euthanasie de sa mère étant contraire à l’article 2 de la Convention. Dans la mesure où la Cour rappelle avoir conclu qu’il n’y a pas eu violation de l’article 2 de la Convention, l’argument est rapidement balayé.

En second lieu le requérant dénonce une violation de l’article 8 en raison du manquement par les autorités nationales à leur devoir d’assurer l’implication des proches dans le processus d’euthanasie. La Cour opère ici mise en balance des intérêts en présence : le souhait du fils d’accompagner sa mère dans les derniers instants de sa vie et le droit de la mère du requérant au respect de sa volonté et de son autonomie personnelle. Appréciant d’abord les dispositions belges, elle relève que la loi relative à l’euthanasie oblige les médecins à s’entretenir de la demande d’euthanasie d’un patient avec ses proches uniquement lorsque c’est la volonté du patient. À défaut, les médecins ne peuvent pas contacter ses proches, conformément à leur devoir de confidentialité et de maintien du secret médical. Puis appréciant la mise en œuvre concrète en l’espèce, elle relève que les médecins impliqués dans la procédure d’euthanasie ont suggéré plusieurs fois une reprise de contact avec les enfants. Or, la patiente s’y est à chaque fois opposée. En conséquence, la Cour estime que les médecins ont fait tout ce qui était raisonnable. Elle reconnaît qu’« Il ne saurait être reproché au législateur d’obliger les médecins à respecter les souhaits de l’intéressée sur ce point, ni de leur imposer un devoir de confidentialité et de maintien du secret médical ». Sur ce dernier point, la Cour rappelle que « le respect du caractère confidentiel des informations sur la santé constitue un principe essentiel du système juridique de toutes les Parties contractantes à la Convention et qu’il est capital non seulement pour protéger la vie privée des malades mais également pour préserver leur confiance dans le corps médical et les services de santé en général ». Selon la Cour, la législation, telle qu’elle a été appliquée en l’espèce, a ménagé un juste équilibre entre les différents intérêts en jeu et réfute toute violation de l’article 8 de la Convention.

À l’heure où Président de la République lance une Convention citoyenne sur la fin de vie dont le pilotage a été confié au Conseil économique, social et environnemental et dont les conclusions sont attendues pour mars 2023 et compte tenu de l’avis sur la fin de vie du Comité consultatif national d’éthique rendu, le 13 septembre dernier (avis 139, disponible ici) qui considère « qu’il existe une voie pour une application éthique de l’aide active à mourir, à certaines conditions strictes avec lesquelles il apparaît inacceptable de transiger », l’éventuel texte qui en résultera devra nécessairement tenir compte des enseignements de cet arrêt rendu contre la Belgique. La France est libre de dépénaliser l’euthanasie à condition de prévoir un encadrement par la mise en place de garanties adéquates et suffisantes visant à éviter les abus. Un tel encadrement supposera de déterminer précisément les cas de recours à cette pratique, une procédure visant à s’assurer d’un consentement libre et éclairé (et sans doute réitéré) et l’existence d’un contrôle destiné à déterminer si les garanties légales sont respectées (a priori ou a posteriori). Enfin, si l’accord ou la participation des proches n’est pas une obligation, l’encouragement du patient à les informer devra également être prévu. Nul doute que si un tel texte voyait le jour, les proches des volontaires, vraisemblablement meurtris par ce décès, contesteront. Prévoir au mieux reste le meilleur moyen à donner aux patients et surtout aux médecins qui s’engageront à leurs côtés.

Références :

■ CEDH 29 avr. 2022, Pretty c/ Royaume-Uni, n° 2346/02 JCP 2003. II. 10062, note Girault ; AJDA 2003. 1383, note B. Le Baut-Ferrarese ; D. 2002. 1596, et les obs. ; RDSS 2002. 475, note P. Pédrot ; RSC 2002. 645, obs. F. Massias ; RTD civ. 2002. 482, obs. J. Hauser ; ibid. 858, obs. J.-P. Marguénaud.

■ CEDH 20 janv. 2011, Haas c/ Suisse, n° 31322/07 D. 2011. 925, et les obs., note E. Martinent, M. Reynier et F. Vialla ; ibid. 2012. 308, obs. J.-C. Galloux et H. Gaumont-Prat ; RTD civ. 2011. 311, obs. J.-P. Marguénaud.

■ CEDH 14 mai 2013, Gross c/ Suisse, n° 67810/10 : D. 2013. 1277, obs. G. Puppinck ; AJ fam. 2013. 329, obs. A. Dionisi-Peyrusse.

■ CEDH 19 juill. 2012, Koch c/ Allemagne, n° 497/09 : RTD civ. 2012. 700, obs. J.-P. Marguénaud ; ibid. 2013. 354, obs. J. Hauser.

■ CEDH 11 juill. 2002, Goodwin c/ Royaume-Uni, n° 28957/95 : AJDA 2002. 1277, chron. J.-F. Flauss ; D. 2003. 525, et les obs., obs. C. Bîrsan ; ibid. 1935, chron. J.-J. Lemouland ; RDSS 2003. 137, obs. F. Monéger ; RTD civ. 2002. 782, obs. J. Hauser ; ibid. 862, obs. J.-P. Marguénaud.

■ CEDH 27 sept. 1995, Mc Cann et autres c/ Royaume-Uni, n° 18984/91 RSC 1996. 184, obs. L.-E. Pettiti ; ibid. 461, obs. R. Koering-Joulin.

■ CEDH 18 juin 2002, Öneryldiz c/ Turquie, n° 48939/99  JCP G 2002.I.157; AJDA 2002. 1277, chron. J.-F. Flauss ; D. 2002. 2568, obs. C. Bîrsan ; gr. ch., 30 nov. 2004 : JCP A 2006, 1002, comm. Ph. Yolka ; C. Lacroix ; AJDA 2005. 1133, note S. Rabiller ; ibid. 2004. 2301 ; ibid. 2005. 541, chron. J.-F. Flauss ; ibid. 1081, édito. Y. Jégouzo ; RDI 2005. 98, obs. F.-G. Trébulle ; RTD civ. 2005. 422, obs. T. Revêt.

■ CEDH 17 janv. 2002, Calvelli et Ciglio c/ Italie, n° 32967/96

■ CEDH, 8 juill. 2004, Vo c/ France, n° 53924/00 AJDA 2004. 1809, chron. J.-F. Flauss ; D. 2004. 2456, et les obs., note J. Pradel ; ibid. 2535, obs. I. Berro-Lefèvre ; ibid. 2754, obs. G. Roujou de Boubée ; ibid. 2801, chron. E. Serverin ; RSC 2005. 135, obs. F. Massias ; RTD civ. 2004. 714, obs. J. Hauser ; ibid. 799, obs. J.-P. Marguénaud.

■ CEDH 12 févr. 2004, Perez c/ France, n° 47287/99 AJDA 2004. 1809, chron. J.-F. Flauss ; D. 2004. 734, et les obs. ; ibid. 2943, chron. D. Roets ; ibid. 2948, chron. P.-F. Divier ; RSC 2004. 698, obs. F. Massias.

 

Auteur :Caroline Lacroix


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