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[ 5 novembre 2014 ] Imprimer

Procédure pénale

Exception de l’autorité de la chose jugée à l’étranger : nécessité d’un jugement définitif

Mots-clefs : Compétence, Infraction, Étranger, Autorité de la chose jugée

En vertu des articles 692 du Code de procédure pénale et 113-9 du Code pénal, l’exception d’autorité de la chose jugée ne s'applique qu’à des procédures dans lesquelles est intervenu un jugement définitif. Tel n’est pas le cas d’une décision de relaxe frappée d’un pourvoi devant la Cour de cassation, lequel est en cours d’examen.

Le fait qu’une infraction soit commise à l'étranger n’exclut pas la compétence de la loi pénale française (C. pén., 113-6 et 113-7) et la compétence des juridictions françaises.

Selon l'article 113-9 du Code pénal, aucune poursuite ne peut être exercée contre une personne justifiant qu'elle a été jugée définitivement à l'étranger pour les mêmes faits et, en cas de condamnation, que la peine a été subie ou prescrite. Parallèlement, l'article 692 du Code de procédure pénale dispose que, pour des crimes commis hors du territoire de la République, aucune poursuite ne peut être exercée contre une personne justifiant qu'elle a été jugée définitivement à l'étranger pour les mêmes faits et, en cas de condamnation, que la peine a été subie ou prescrite.

Ces dispositions permettent de mettre en œuvre le principe non bis in idem, consacré à l’article 4.1 du Protocole n° 7 de la Convention européenne des droits de l’homme qui dispose que : « Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même État en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet État ».

L’exclusion de la compétence française repose donc sur l’existence d’un jugement définitif rendu à l’étranger et, en cas de condamnation, d’une peine subie ou prescrite. Or, tel n’était pas le cas en l’espèce.

Poursuivie pour des faits de complicité de meurtre commis sur le territoire de la République de Madagascar et renvoyée devant la cour d’assises de Paris par la chambre de l'instruction, l’accusée avait soulevé l’exception d’autorité de la chose jugée arguant qu’elle avait bénéficié, pour les mêmes faits, d’une décision d’acquittement prononcée, le 2 avril 2008, par une cour criminelle malgache.

La chambre criminelle approuve les juges d’avoir rejeté cette exception au motif que cette décision n’a toujours pas acquis un caractère définitif, étant frappée d’un pourvoi devant la Cour de cassation de Madagascar, lequel est en cours d’examen.

La Haute juridiction reconnaît donc que la règle non bis in idem n’interdit pas de poursuivre une personne pour des faits dont elle a été acquittée par une décision ne pouvant faire l’objet que d’une voie de recours extraordinaire.

Rappelons qu’il en est de même en cas de décision étrangère de classement sans suite laquelle n'a pas valeur de jugement définitif (Crim. 6 déc. 2005 ; Crim. 12 mai 2009).

Crim. 10 sept. 2014, n°14-84.186 F-P+B 

Références

 Crim. 6 déc. 2005, n° 04-86.378.

■ Crim. 12 mai 2009, n° 07-85.875, D. 2009. 2258, note D. Brach-Thiel AJ pénal 2009. 309, obs. E. Péchillon.

■ Article 692 du Code de procédure pénale

« Dans les cas prévus au chapitre précédent, aucune poursuite ne peut être exercée contre une personne justifiant qu'elle a été jugée définitivement à l'étranger pour les mêmes faits et, en cas de condamnation, que la peine a été subie ou prescrite. »

■ Code pénal

Article 113-6

« La loi pénale française est applicable à tout crime commis par un Français hors du territoire de la République.

Elle est applicable aux délits commis par des Français hors du territoire de la République si les faits sont punis par la législation du pays où ils ont été commis.

Elle est applicable aux infractions aux dispositions du règlement (CE) n° 561/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 relatif à l'harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, commises dans un autre Etat membre de l'Union européenne et constatées en France, sous réserve des dispositions de l'article 692 du code de procédure pénale ou de la justification d'une sanction administrative qui a été exécutée ou ne peut plus être mise à exécution.

Il est fait application du présent article lors même que le prévenu aurait acquis la nationalité française postérieurement au fait qui lui est imputé. »

Article 113-7 

« La loi pénale française est applicable à tout crime, ainsi qu'à tout délit puni d'emprisonnement, commis par un Français ou par un étranger hors du territoire de la République lorsque la victime est de nationalité française au moment de l'infraction. »

Article 113-9

« Dans les cas prévus aux articles 113-6 et 113-7, aucune poursuite ne peut être exercée contre une personne justifiant qu'elle a été jugée définitivement à l'étranger pour les mêmes faits et, en cas de condamnation, que la peine a été subie ou prescrite. »

■ Protocole n° 7 de la Convention européenne des droits de l’homme

Article 4 – Droit à ne pas être jugé ou puni deux fois

« 1. Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat.

2. Les dispositions du paragraphe précédent n'empêchent pas la réouverture du procès, conformément à la loi et à la procédure pénale de l'Etat concerné, si des faits nouveaux ou nouvellement révélés ou un vice fondamental dans la procédure précédente sont de nature à affecter le jugement intervenu.

3. Aucune dérogation n'est autorisée au présent article au titre de l'article 15 de la Convention. »

 

Auteur :C. L.


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