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Droit des sûretés et de la publicité foncière
Exclusion du recours subrogatoire de la caution solvens contre la sous-caution
Mots-clefs : Procédures collectives, Cautionnement, Sous-cautionnement, Débiteur principal, Créanciers principaux, Déclaration de créances, Recours subrogatoire (non)
La sous-caution ne garantit pas la dette du débiteur principal envers le créancier, mais la dette de remboursement du débiteur principal envers la caution qui a payé à sa place le créancier.
Une banque avait consenti à une société de transport un prêt à moyen terme. Elle s’était ensuite rendue caution des sommes que cette société pourrait devoir à deux de ses fournisseurs de carburants. La gérante de la société débitrice avait parallèlement elle-même consenti au profit de la banque un cautionnement général des engagements de sa société.
A la suite de la mise en redressement judiciaire de la société débitrice, les fournisseurs avaient déclaré leurs créances au titre des carburants fournis et demandé à la banque, en sa qualité de caution, de procéder à leur règlement. Après y avoir procédé, et obtenu les quittances subrogatives subséquentes, la banque avait assigné, en vertu d’un recours subrogatoire, la gérante de la société en exécution de son engagement de sous-caution. Celle-ci lui avait opposé, pour s’y soustraire, le défaut de déclaration de sa créance.
La cour d’appel la condamna pourtant au paiement, au motif que la caution qui a payé le créancier au lieu et place du débiteur principal peut exercer le recours subrogatoire de l’article 2306 du Code civil, et que dans cette hypothèse, la caution peut se prévaloir de la déclaration de créance faite par le créancier du débiteur principal, en l’espèce les fournisseurs de carburants ; ceux-ci ayant déclaré leurs créances avant de recevoir paiement de la banque, cette dernière n’avait donc pas à déclarer ses créances subrogatoires et pouvait se prévaloir des déclarations de créances de ces fournisseurs. En d’autres termes, la cour d’appel admit que la banque, caution, exerçât un recours subrogatoire contre la gérante, sous-caution, en sorte que la première, qui avait omis de déclarer sa créance à la procédure collective de la débitrice, bénéficie de la déclaration de créances des créanciers, les fournisseurs, au passif de la débitrice, la société redressée.
En effet, avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, une telle omission conduisait à l’extinction de la créance non déclarée, alors qu’elle est désormais simplement sanctionnée par l’inopposabilité de la créance à la procédure collective. Au visa des articles 1251, 3° du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 (V. désormais art. 1346 s.), 2306 du Code civil et L. 621-46 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi précitée du 26 juillet 2005, la chambre commerciale casse cette décision. Elle juge que « la sous-caution ne garantit pas la dette du débiteur principal envers le créancier, mais la dette de remboursement du débiteur principal envers la caution qui a payé à sa place le créancier, de sorte que, ce dernier n’étant titulaire d’aucun droit contre la sous-caution qu’il aurait pu transmettre par voie de subrogation, sa déclaration de créance au passif du débiteur principal ne peut profiter à la caution lorsqu’elle exerce son recours contre la sous-caution ».
La chambre commerciale rappelle que l’engagement de la sous-caution ne garantit que le recours en remboursement de la caution contre le débiteur principal, dans le cas où cette dernière aurait désintéressé ses créanciers à sa place.
Ainsi, en l’espèce, le recours subrogatoire de la banque aurait pu être exercé si elle avait agi directement contre la société débitrice principale. Mais dans la mesure où la sous-caution ne garantit pas la dette du débiteur principal, et que le créancier principal ne détient donc aucun droit contre la sous-caution, ce dernier ne peut transmettre, par la voie subrogative, aucun droit ni action à la caution qui elle seule garantit, et de manière autonome, la dette principale. La sous-caution ne garantit pas la dette du débiteur principal envers le créancier, mais la dette de remboursement du débiteur principal envers la caution qui a payé à sa place le créancier, lequel ne dispose d’aucun droit contre la sous-caution dont la caution de premier rang pourrait profiter.
Ainsi le sous-cautionnement se présente-t-il comme une relation contractuelle également tripartite, en ce qu’il met en relation le débiteur, sa caution et une sous-caution, mais indépendante du cautionnement initial liant, quant à lui, le débiteur, la caution et le créancier. Il ne fait donc naître aucun lien entre le créancier principal et la sous-caution. La garantie offerte par le sous-cautionnement ne couvrant que l’action personnelle de la caution contre le débiteur principal, cette configuration contractuelle exclut du champ de sa garantie le créancier principal. Dans la mesure où le créancier principal ne dispose d’aucune créance à l’égard de la sous-caution, la caution ne peut exercer de recours subrogatoire contre la sous-caution à l’effet de se prévaloir de la déclaration de créance effectuée par le créancier principal au passif du débiteur (V. Com. 30 mars 2005, n° 00-20.733), de même que la sous-caution, en ce qu’elle ne garantit que la créance de la caution à l'égard du débiteur principal et non celle du créancier à l'égard de ce débiteur, ne peut se prévaloir des exceptions inhérentes à la dette du débiteur principal à l'égard de ce créancier, sauf à rechercher la responsabilité de la caution pour avoir fautivement omis d'invoquer lesdites exceptions (V. Com. 27 mai 2008, n° 06-19.075).
Com. 17 mai 2017, n° 15-18.460
Références
■ Com. 30 mars 2005, n° 00-20.733 P, D. 2005. 1151 ; ibid. 2078, obs. P. Crocq.
■ Com. 27 mai 2008, n° 06-19.075 P, D. 2008. 2399, obs. V. Avena-Robardet, note O. Gout ; RTD civ. 2008. 517, obs. P. Crocq ; RTD com. 2008. 611, obs. D. Legeais.
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