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Droit des obligations
Extension du domaine de l’implication du véhicule terrestre à moteur
Mots-clefs : Véhicule terrestre à moteur, Implication, Lien de causalité, Responsabilité
Est impliqué dans l’accident le véhicule au volant duquel le conducteur, qui interpelle des cyclistes en train de le doubler, provoque la chute de ces derniers.
Deux cyclistes participent en tandem à une compétition. Ils cherchent à doubler un camion de pompier qui se dirige vers un accident ayant eu lieu plus en avant du parcours. Mécontent, le conducteur du camion les interpelle depuis son véhicule. Surpris, les cyclistes perdent le contrôle de leur tandem et tombent.
Ils recherchent la responsabilité du Service départemental d’incendie et de secours (SDIS), afin d’obtenir réparation du préjudice corporel et matériel subi. En effet, ils prétendent que le véhicule des pompiers était impliqué dans leur chute, même en l’absence de contact avec le tandem.
Les accidents de la circulation obéissent à un régime de responsabilité spécial, prévu par la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985. Cette loi, en son article 1er, exige « l’implication » d’un véhicule terrestre à moteur. Cette notion d’implication ne se confond pas avec le lien de causalité traditionnellement utilisé en matière de responsabilité civile (Civ. 2e, 11 avr. 1986).
Pouvait-on conclure ici à l’implication du véhicule des pompiers dans l’accident, alors que la chute des cyclistes semblait avoir été provoquée par l’interpellation vigoureuse du conducteur à leur encontre ?
En l’espèce, les juges du fond avaient répondu par la négative à cette question, estimant que l’attitude des demandeurs, qui dépassaient un camion de pompiers en pleine intervention de secours, ne démontrait pas l’implication du véhicule dans l’accident, et cela malgré le fait qu’il était établi que l’intervention du pompier avait fait perdre le contrôle du tandem aux cyclistes.
Par le passé, les phares d’un véhicule ont pu constituer une implication, par éblouissement de la victime (Crim. 21 juin 1988), ou encore l’arrêt soudain d’une voiture ayant forcé le cycliste à freiner brutalement et glisser sur la chaussée (Civ. 2e, 15 mai 1992). En l’espèce, la Cour de cassation va plus loin encore dans l’interprétation large de la notion d’implication, et casse l’arrêt d’appel, aux motifs que les victimes, qui dépassaient le camion, avaient été interpellées par le conducteur, ce qui suffisait à caractériser l’implication du véhicule. Ainsi, la seule intervention verbale du chauffeur à l’adresse des cyclistes suffit à caractériser l’implication.
Civ. 1re, 1er juin 2011, n° 10-17.927, FS-P+B
Références
« Notion qui sert de fondement au droit à indemnisation des victimes d’un accident de la circulation (L. no 85-677 du 5 juill. 1985). Pour que le véhicule soit impliqué et, partant, que son conducteur ou gardien soit tenu à réparation, il n’est pas demandé qu’il ait eu une fonction causale ; il suffit que sa présence ait été objectivement nécessaire à la survenance du dommage. Au plan probatoire, la jurisprudence distingue deux situations : ou bien le véhicule, qu’il soit à l’arrêt ou en mouvement, a été heurté et il y a implication ; ou bien la victime n’a pas eu de contact avec le véhicule et il lui incombe de prouver l’implication. »
Source : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation
Article 1er
« Les dispositions du présent chapitre s'appliquent, même lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres. »
Article 3
« Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu'elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l'exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l'accident.
Les victimes désignées à l'alinéa précédent, lorsqu'elles sont âgées de moins de seize ans ou de plus de soixante-dix ans, ou lorsque, quel que soit leur âge, elles sont titulaires, au moment de l'accident, d'un titre leur reconnaissant un taux d'incapacité permanente ou d'invalidité au moins égal à 80 p. 100, sont, dans tous les cas, indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu'elles ont subis.
Toutefois, dans les cas visés aux deux alinéas précédents, la victime n'est pas indemnisée par l'auteur de l'accident des dommages résultant des atteintes à sa personne lorsqu'elle a volontairement recherché le dommage qu'elle a subi. »
■ Civ. 2e, 11 avr. 1986, Bull. civ. II, n° 46 ; Gaz. Pal. 1986. 2. 610, note Jourdain.
■ Crim. 21 juin 1988, Bull. crim. n° 279 ; RTD civ. 1989. 99 obs. Jourdain.
■ Civ. 2e, 15 mai 1992, Bull. civ. II, n° 139.
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