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[ 9 juin 2010 ] Imprimer

Procédure pénale

Garde à vue : la notification des droits, dix minutes après l'interpellation, est légale

Mots-clefs : Garde à vue, Droits (notification, délai, lieu), Interpellation, Voie publique, Première chambre civile

N'est pas tardive, la notification, avec ses droits, du placement en garde à vue, intervenue dès l'arrivée de la personne dans les services de police, dix minutes après son interpellation.

Selon l'article 63-1 du Code de procédure pénale, « toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête, des droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 ainsi que des dispositions relatives à la durée de la garde à vue prévues par l'article 63 ».

En l'espèce, un individu de nationalité tunisienne fut interpellé le 25 février 2009, à 7 h 35, lors d'un contrôle d'identité sur réquisitions du procureur de la République, et reçut notification de ses droits à son arrivée au commissariat de police, à 7 h 50. Le même jour, il fit l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière et d'une décision de maintien en rétention, mesure dont la prolongation fut autorisée par un juge des libertés et de la détention, dont l'ordonnance fut néanmoins infirmée par le premier président de la cour d'appel ; pour dire la procédure irrégulière, celui-ci déduisit le caractère tardif de la notification des droits de l'absence d'obstacle insurmontable interdisant d'y procéder lors de l'interpellation.

Cette décision est censurée par la première chambre civile dans son arrêt du 27 mai qui, au visa des articles 63 et 63-1 du Code de procédure pénale, estime que la notification, avec ses droits, du placement en garde à vue, intervenue dix minutes après l'interpellation de la personne, dès son arrivée dans les services de police, n'est pas tardive. Si l'article 63-1 exige que toute personne placée en garde à vue soit immédiatement informée de ses droits — tout retard injustifié portant nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée (Crim. 30 avr. 1996 ; 3 déc. 1996 ; 2 mai 2002) —, la chambre criminelle considère que cette notification ne peut se faire, dans des conditions satisfaisantes, sur la voie publique, et qu'elle peut donc intervenir dans les locaux de police ou de gendarmerie (v. Crim. 23 mars 1999). En l'espèce, la notification de ses droits à l'intéressé a été réalisée dix minutes après son interpellation, soit dès son arrivée au commissariat de police, et dès son placement effectif en garde à vue. Un délai qui ne saurait être considéré comme excessif, au regard de la jurisprudence de la chambre criminelle (v. par ex. Crim. 27 juin 2000, pour la notification intervenue quinze minutes après l'interpellation).

Civ. 1e, 27 mai 2010, n° 09-12.397, F-P+B+I

Références

■ Juge des libertés et de la détention

« Juge compétent pour ordonner ou prolonger la détention provisoire. Institué par la loi no 2000-516 du 15 juin 2000, il prononce ces mesures en lieu et place du juge d’instruction jusque-là compétent pour le faire. Saisi par ce dernier, le JLD est un magistrat du siège ayant rang de président, premier vice-président ou vice-président. »

Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.

Code de procédure pénale

■ Article 63

« L'officier de police judiciaire peut, pour les nécessités de l'enquête, placer en garde à vue toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Il en informe dès le début de la garde à vue le procureur de la République.

La personne gardée à vue ne peut être retenue plus de vingt-quatre heures. Toutefois, la garde à vue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, sur autorisation écrite du procureur de la République. Ce magistrat peut subordonner cette autorisation à la présentation préalable de la personne gardée à vue.

Sur instructions du procureur de la République, les personnes à l'encontre desquelles les éléments recueillis sont de nature à motiver l'exercice de poursuites sont, à l'issue de la garde à vue, soit remises en liberté, soit déférées devant ce magistrat.

Pour l'application du présent article, les ressorts des tribunaux de grande instance de Paris, Nanterre, Bobigny et Créteil constituent un seul et même ressort. »

■ Article 63-1

« Toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête, des droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 ainsi que des dispositions relatives à la durée de la garde à vue prévues par l'article 63.

Mention de cet avis est portée au procès-verbal et émargée par la personne gardée à vue ; en cas de refus d'émargement, il en est fait mention.

Les informations mentionnées au premier alinéa doivent être communiquées à la personne gardée à vue dans une langue qu'elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits.

Si cette personne est atteinte de surdité et qu'elle ne sait ni lire ni écrire, elle doit être assistée par un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec des sourds. Il peut également être recouru à tout dispositif technique permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité.

Si la personne est remise en liberté à l'issue de la garde à vue sans qu'aucune décision n'ait été prise par le procureur de la République sur l'action publique, les dispositions de l'article 77-2 sont portées à sa connaissance.

Sauf en cas de circonstance insurmontable, les diligences résultant pour les enquêteurs de la communication des droits mentionnés aux articles 63-2 et 63-3 doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a été placée en garde à vue. »

■ Article 63-2

« Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, faire prévenir dans le délai prévu au dernier alinéa de l'article 63-1, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l'un de ses parents en ligne directe, l'un de ses frères et soeurs ou son employeur de la mesure dont elle est l'objet.

Si l'officier de police judiciaire estime, en raison des nécessités de l'enquête, ne pas devoir faire droit à cette demande, il en réfère sans délai au procureur de la République qui décide, s'il y a lieu, d'y faire droit. »

■ Article 63-3

« Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois.

A tout moment, le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire peut d'office désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue.

En l'absence de demande de la personne gardée à vue, du procureur de la République ou de l'officier de police judiciaire, un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande ; le médecin est désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire.

Le médecin examine sans délai la personne gardée à vue. Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l'aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsqu'il est procédé à un examen médical en application de règles particulières. »

■ Article 63-4

« Dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à s'entretenir avec un avocat. Si elle n'est pas en mesure d'en désigner un ou si l'avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu'il lui en soit commis un d'office par le bâtonnier.

Le bâtonnier est informé de cette demande par tous moyens et sans délai.

L'avocat désigné peut communiquer avec la personne gardée à vue dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l'entretien. Il est informé par l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature et de la date présumée de l'infraction sur laquelle porte l'enquête. »

À l'issue de l'entretien dont la durée ne peut excéder trente minutes, l'avocat présente, le cas échéant, des observations écrites qui sont jointes à la procédure.

L'avocat ne peut faire état de cet entretien auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue.

Lorsque la garde à vue fait l'objet d'une prolongation, la personne peut également demander à s'entretenir avec un avocat dès le début de la prolongation, dans les conditions et selon les modalités prévues aux alinéas précédents.

Si la personne est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 4°, 6°, 7°, 8° et 15° de l'article 706-73,l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de quarante-huit heures. Si elle est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 3° et 11° du même article, l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de soixante-douze heures. Le procureur de la République est avisé de la qualification des faits retenue par les enquêteurs dès qu'il est informé par ces derniers du placement en garde à vue. »

■ Crim. 30 avr. 1996Bull. crim. n° 182 ; RSC 1996. 879, obs. Dinthilac.

Crim. 3 déc. 1996Bull. crim. n° 443 ; D. 1997. IR 52 ; Procédures 1997. Comm. 68, obs. Buisson.

■ Crim. 2 mai 2002, n° 01-88.453.

Crim. 23 mars 1999D. 1999. Somm. 324, obs. Pradel.

■ Crim. 27 juin 2000Bull. crim. n° 246.

■ Pour aller plus loin : v. B. Bouloc, Procédure pénale, 22e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2010, n° 420 et 438.

 

Auteur :S. L.


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